Les migrations polarisent fortement l’opinion mais sont paradoxalement souvent réduit à un petit répertoire d’images soit misérabilistes soit menaçantes qui sensationnalisent un fait social en réalité plutôt discret pour le transformer en spectacle médiatique: des bateaux en train de sombrer, des passages de murs ou de barbelés, des cadavres échoués… Les représentations de personnes migrantes ou d’origine étrangères reposent quant à elles souvent sur des stéréotypes culturels, genrés ou raciaux: les images de corps noirs ou encore de femmes voilées sont par exemple fréquemment mobilisées pour représenter ce qui constituerait une altérité migrante radicale.
L’usage des images renvoie à des questions éthiques, pour des médias de plus en plus « visuels », sur ce qui est montré ou pas et comment. Si les images en disent plus long que les mots, il est essentiel de prendre le temps de s’interroger sur les non-dits du visuel. Quelles sont les conditions de réalisation de ces images? Comment se passe leur sélection et leur diffusion? Comment sont-elles reçues et quel est leur impact? Dans un contexte où l’immédiateté et la rapidité de circulation des informations et des images rencontrent l’intelligence artificielle, qui peut transformer de plus en plus facilement et efficacement les images et vidéos proposées par les médias. La manipulation digitale des images est loin de n’être qu’une question technique et rejoint les enjeux fondamentaux de la représentation médiatique des migrations, notamment par l’image.
Journalistes et chercheuse-eur-s débattront de vrai et de faux, à l'ère de l'I.A., mais aussi d’éthique et de politique de l’image.
Introduction : Nora el Qadim, Université Paris 8 Hélène Thiollet, CNRS CERI Sciences Po, projet PACE
Intervenantes : Marianne AMAR est historienne. Ses travaux en cours portent sur une histoire sociale de la photographie en migration (années 1920-1970) et sur les réfugiés des années 1930-1950. Elle a notamment codirigé avec Nancy Green l’ouvrage collectif « Migrations d’élites », publié aux Presses universitaires François Rabelais en 2022. Elle est responsable du département de la recherche du Musée national de l’histoire de l’immigration depuis son ouverture en 2007.
Pascal LABORDERIE, professeur des universités en sciences de l’information et de la communication à l’université de Reims Champagne-Ardenne. Il est spécialiste des questions qui croisent éducation et images, sous toutes leurs formes. Dans le domaine de la médiation interculturelle au moyen de l'audiovisuel, il a codirigé avec Dounia Mimouni un ouvrage qui vient d'être publié, fin novembre, par L'Harmattan, et qui s'intitule : "Images de migrants. Éducation, médiation et réception audiovisuelles."
Mohammad Arif ULLAH, journaliste à France24 pour le site InfoMigrants