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Thèmes de recherche

De nombreuses recherches sont menées en Afrique par les membres de la faculté permanente, les post-docs, les doctorants et les étudiants de Sciences Po. Ces travaux, individuels et collectifs, mobilisent diverses disciplines (histoire, science politique & relations internationales, droit, sociologie & anthropologie, économie politique, études urbaines, sciences numériques, épidémiologie pour l’essentiel) et traitent de sujets variés : la question coloniale et postcoloniale, la citoyenneté et l’urbanité, les mouvements sociaux, la guerre, les enjeux de sécurité et de maintien de l’ordre, la santé publique, la révolution numérique et biométrique, les productions artistiques et culturelles, etc. 

 

- La question coloniale et postcoloniale, l’esclavage et le post-esclavage

L’histoire coloniale et postcoloniale est abondamment traitée par les enseignants-chercheurs et étudiants du Centre d’histoire. Florence Bernault travaille sur l'histoire de l'Afrique centrale du XIXe au XXIe siècle, et dirige deux thèses. L'une porte sur la culture de la coercion au Nigeria colonial et postcoloniale (Ebun Iyamu), et l'autre sur l'histoire intellectuelle des Luo du Kenya (Esther Ginestet, en co-tutelle avec l'université de Northwestern). 

Des recherches sont également menées sur l’histoire de l’esclavage et ses héritages contemporains. M’hamed Oualdi dirige depuis 2019 un projet financé par le European Research Council sur les fins d’esclavage au Maghreb et en Méditerranée du milieu du XVIIIe siècle aux années 1930. Le post-esclavage est également abordé en science politique par Gabriel André qui, pour sa thèse de doctorat, travaille sur les luttes de pouvoir et les controverses historiographiques autour du passé esclavagiste au Fouta Djalon, en Guinée. 

Anna Osterlow travaille sur l'histoire de l'informatique et des technologies en Afrique post-coloniale sous la direction de Jakob Vogel et Maëlle Gelin travaille sur les circulations et les contestations de la négritude dans l'espace atlantique au second XXe siècle, sous la direction de Pap Ndiaye et d'Emmanuelle Loyer.

Dans le même esprit, un nouveau programme de recherche, Competing for the past: academic and vernacular histories of Africa, a débuté en 2023 avec Columbia University, codirigé par Laurent Fourchard (CERI) et Gregory Mann (Columbia University). Il interroge les historicités vernaculaires et les réécritures de l’histoire, savantes ou populaires, c'est-à-dire toutes les formes de production de l'histoire par des acteurs sociaux qui ne sont pas nécessairement historiens. Il s’interroge sur la façon dont l’histoire de l’Afrique devient une cause, pour analyser les réécritures et réinterprétations possibles du passé du continent.

On notera également l’étude interdisciplinaire de la question coloniale et postcoloniale, ainsi que de l’esclavage et le post-esclavage, au sein du Globinar (anciennement PILAGG) piloté par Horatia Muir-Watt (Ecole de droit), et notamment sa version actuelle intitulée Recitals (https://globinar.pubpub.org/ ou https://www.sciencespo.fr/ecole-recherche/en/news/globinar-30-recitals-fondements-fictions-et-traductions/), en collaboration avec Helena Alviar (Ecole de droit), Astrid von Busekist et Ariel Colomonos (Théorie politique) 

Le Séminaire sur les Approches Postcoloniales (SAP), lancé en 2019 par le CERI avec le Ceped (Centre population et développement : Université Paris Cité & IRD) et dont la quatrième saison a débuté en septembre 2023, a pour objectif de consolider l’espace de réflexion et de discussion académique sur les problématiques intersectionnelles de la postcolonialité. Placé sous la responsabilité de Chiara Ruffa (CERI) et Mina Kleiche-Dray (Université Paris cité), il part du constat que les approches postcoloniales (anti-coloniales, études subalternes, postcoloniales, décoloniales) occupent une place mineure dans l’enseignement et la recherche en sciences sociales en France, alors qu’elles occupent une place significative dans l’espace international.

La critique politique de la relation coloniale est un thème étudié depuis longtemps au CERI. De nombreuses publications ont jalonné cette histoire controversée, depuis l’ouvrage de Jean-François Bayart sur La politique africaine de François Mitterrand (Paris, Karthala, 1984), jusqu’aux recherches les plus récentes sur les ingérences militaires au Sahel (Roland Marchal, Léonard Colomba-Petteng, Ayrton Aubry notamment), en passant par un dossier spécial France-Afrique, sortir du pacte colonial (Politique africaine, n° 105, 2007) ou une analyse de la politique d’intervention française vue d’en bas. Dans la même direction, des recherches menées au médialab par Guillaume Lachenal et Gaëtan Thomas explorent comment la relation coloniale et post-coloniale entre la France et les pays africains concerne également l’histoire de la santé et du développement, permettant une relecture « post-coloniale » de pans entier de l’histoire de la médecine en France, en revenant en particulier sur l’ère de la « Coopération ».

Les manifestations les plus récentes contre la politique de la France en Afrique de l’Ouest, sont actuellement étudiées dans le cadre d’un projet collaboratif, mené avec la plateforme citoyenne Tournons la page qui a pour thème : "De quoi le ‘sentiment anti-français’ en Afrique de l'Ouest est-il le nom ? Les mouvements citoyens face aux ingérences extérieures”. Il s’agit d’une enquête comparatiste (quantitative et qualitative), conduite dans six pays (Bénin, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Niger, Tchad) en collaboration avec des équipes locales, sous la coordination de Richard Banégas et Dan Sanaren.

 

- Citoyenneté, identité(s) et mouvements civiques

De nombreuses recherches croisent les problématiques de la citoyenneté, abordées sous les angles historiques, politiques, juridiques, culturels. Elles prolongent des travaux plus anciens sur l’Etat en Afrique et le « politique par le bas » initiés par Jean-François Bayart, Achille Mbembe, Comi Toulabor et Denis-Constant Martin au CERI dans les années 1980-90.

Un groupe de recherche (GDR) du CERI est dédié à ces enjeux : « Afrique : citoyenneté, violence et politique ». Lancé en 2012 et placé sous la responsabilité de Richard BanégasLaurent FourchardRoland Marchal et Sandrine Perrot, il organise un séminaire mensuel sur les crises de la citoyenneté et les violences politiques au sud du Sahara. L’hypothèse qui guide ce GDR est que nombre de conflits du continent portent sur la question des droits (politiques, sociaux, économiques, fonciers et autres), de leur reconnaissance et des contours imaginaires et sociaux de la cité, fussent-ils redéfinis par la violence.

Pendant plusieurs années, un programme de recherche transnationale The arts of Citizenship in Africa a réuni des chercheurs de Sciences Po, de Columbia et d’universités partenaires en du continent pour travailler sur les nouvelles formes de mobilisation civique, les parlements de la rue et les recompositions de la cité. Deux colloques internationaux se sont tenus sur la Politique de la rue, faisant dialoguer chercheurs, artistes et activistes. 

Depuis lors, cette thématique des mouvements civiques continue de mobiliser chercheurs et étudiants qui ont produit sur ce sujet des dizaines de papiers de recherche et des mémoires de master. Cette thématique croise également des recherches menées au Médialab sur l’espace public et ses reconfigurations à l’ère numérique (démocratie, médias, désinformation), avec notamment une thèse en cours par Camille Chanial au Congo (Brazzaville).

La question citoyenne est aussi abordée sous l’angle des identités légales et de l’identification des personnes. Le programme ANR PIAF sur La vie sociale des papiers d'identification en Afrique a réuni pendant cinq ans (2015-2021) une quinzaine de chercheurs sur une douzaine de pays d'Afrique. Il visait à repenser les problématiques de la citoyenneté à travers les technologies d'identification : papiers ou biométrie. Il a donné lieu à deux numéros de revue, un ouvrage collectif, de nombreux articles, une web-série et un livre ID Wars in Côte d'Ivoire à paraître chez Oxford University Press en 2024. 

Les questions de citoyenneté et d'identités sont aussi travaillées par les dynamiques migratoires, qu'il s'agisse de migrations dites volontaires ou économiques ou de déplacements forcés. Dans le contexte Est africain, Hélène Thiollet et Sandrine Perrot s'intéressent aux politiques de l'identité et de la mobilité articulées en contexte colonial et postcolonial et jusqu'à la période contemporaine en Ouganda, au Kenya, au Soudan, au Rwanda, en Erythrée et en Ethiopie.  

 

- Guerre, post-conflit, sécurité et maintien de l'ordre 

Les thématiques de la guerre et de la violence en Afrique constituent un axe de recherche ancien et fécond. Roland Marchal, en particulier, a publié sur le sujet des travaux de référence, dont un livre comparatiste (Guerre et société, Karthala, 2003) co-édité avec Pierre Hassner. Sandrine Perrot et Richard Banégas ont aussi travaillé sur les mouvements rebelles et miliciens, tandis que Laurent Fourchard retraçait les formes de violence, de policing et de vigilantisme (Trier, exclure et policer au Nigeria et en Afrique du Sud, Presses de Sciences Po 2018) et Adam Baczko étudiait l’Etat dans la guerre au Mali. 

Les nouvelles formes de la violence djihadiste en Afrique constituent un autre axe important de recherche : cf. les travaux de Roland Marchal sur la Corne et en Afrique centrale ou ceux de Luis Martinez qui, après avoir étudié la guerre civile en Algérie et en Libye, enquête sur les insurrections djihadistes au Sahel.

D’autres travaux sont consacrés aux ingérences armées et aux situations dites « post-conflit ». Chiara Ruffa les aborde sous l’angle des relations internationales, du multilatéralisme et des opérations de paix des Nations unies. D’autres recherches les étudient plutôt dans une démarche de sociologie politique « par le bas ».

Dans le cadre du projet européen MAGYC, Hélène Thiollet s'est intéressée à la Corne de l'Afrique comme frontière de l'externalisation des politiques migratoires et des politiques d'asile européennes. Le projet a permis d'initier une réflexion sur les enjeux migratoires en Afrique de l'Est à la fois comme objet de politique d'intervention et comme dynamiques locales et régionales. 

Plusieurs thèse de doctorat sont (ou ont été) consacrées à ces enjeux de sécurité, de violence et de maintien de l’ordre : celles de Léonard Collomba Petteng sur les dispositifs EUCAP Sahel au Niger, d’Ayrton Aubry sur l’africanisation de la sécurité au Sénégal, de Romane Da Cunha Dupuy sur les groupes d’autodéfense koglweogo au Burkina Faso, de Kamina Diallo sur les ex-combattant.e.s rebelles en Côte d’Ivoire, entre autres.

Deux observatoires de la conflictualité ont été mis sur pied. L’Observatoire de l’Afrique de l’Est (2017-2020), coordonné par le CEDEJ Khartoum (MAEDI-CNRS USR 3123) et le CERI s'est inscrit dans la continuité de l’Observatoire de la Corne de l’Afrique qu’il a remplacé et dont il a élargi le champ d’étude. Sa vocation était de produire des notes d'analyse et d'actualité autour de thématiques telles que les violences politiques, les menaces sécuritaires, les dynamiques religieuses contemporaines. 

 

- Les enjeux de l'urbanité

Au sein de l'École urbaine, les travaux sur les villes mondiales incluent le continent africain. Le programme de recherche de l’École Cities are back in town produit des travaux systématiques sur les processus d’urbanisation entre des villes et des régions urbaines du monde. Il est le principal lieu d’échange entre chercheurs sur les villes et les questions urbaines à Sciences Po. Il a été coordonné pendant trois ans par Fatoumata Diallo et Côme Salvaire. Le research track de l’école urbaine coordonné par Laurent Fourchard, permet de bénéficier d'un enseignement axé sur la recherche et de préparer les étudiants qui souhaitent s’orienter en thèse en sociologie ou en science politique. 

Les travaux menés sur les métropoles d’Afrique à l’Ecole urbaine sont comparatistes. Côme Salvaire a soutenu sa thèse sur la sociologie des autonomies populaires à Lagos et à Mexico. Fatoumata Diallo finit sa thèse sur les modèles voyageurs des transports rapides de bus au Cap, à Lagos et en Ile-de-France. Juliette Reflé et Joel Ansah s’intéressent aux enjeux du dérèglement climatique (inondations ou recul du trait de côte) et à leurs impacts environnementaux, sociaux et politiques sur les métropoles de l’Afrique de l’Ouest. Enfin Laurent Fourchard prépare un ouvrage sur le syndicat des transports à Lagos et Ibadan et la façon dont ils façonnent et révèlent l’organisation politique des territoires. Sur ce sujet, une conférence sur la régulation des transports a été coorganisée entre Sciences Po et Columbia en 2022.

 

- Santé, épidémies et environnement dans l’Anthropocène africain

Le Médialab, laboratoire de sciences sociales numériques, développe des recherches sur les épidémies dans l’Anthropocène, sujet à l’interface entre épidémiologie, histoire environnementale et sciences sociales. Ces recherches explorent des manières de croiser enquêtes socio-historiques et données biologiques, par exemple à propos de l’histoire du VIH-Sida  (Guillaume Lachenal et Gaëtan Thomas, qui ont publié un Atlas historique des épidémies en 2024), des épidémies de virus Ebola en RDC (thèse de Jules Villa) et du monkeypox en RCA dans le cadre du postdoctorat de Camille Besombes (médecin épidémiologique, lauréate du Fonds Latour). Ces recherches se nourrissent du dialogue avec l’histoire environnementale en particulier dans le cadre du séminaire du CHSP La matière du politique coordonné par Giacomo Parrinello et Guillaume Lachenal. 

 

- Arts, productions culturelles et politique

Depuis les premiers travaux du politique « par le bas », une tradition de recherche s’est constituée au CERI autour des productions artistiques et culturelles, notamment la musique, abordées sous l’angle des cultures et des imaginaires politiques, comme des OPNI (Objets politiques non identifiés, Denis-Constant Martin). Des enquêtes plus récentes menées sur les mouvements citoyens ont redonné une large place à l’analyse des relations entre arts, culture et politique, avec un focus particulier sur le rôle des artistes dans les manifestations de rue et les revendications démocratiques

Un programme de recherche comparatiste sur les industries culturelles et créatives s’est terminé en 2023 auquel ont participé des chercheurs de Sciences Po qui a accueilli le colloque terminal. Menée dans six pays du continent avec le soutien du FASOPO et de l’AFD, cette enquête visait à comprendre les effets de la transformation des ICC (privatisation, internationalisation, digitalisation, plateformisation) sur les liens sociaux et la fabrique des communautés imaginées. 

Des conversations entre chercheurs et artistes sont régulièrement organisées, en particulier sur les liens entre musique, interpellation politique et question sociale en Afrique. Les artistes de hip hop fondateurs du mouvement Y en a marre au Sénégal (Simon Kouka, Keur Gui, Fou Malade) ont été plusieurs fois invités, de même que le rappeur camerounais Valsero, venu notamment témoigner de sa propre incarcération lors du colloque Captifs sans motifs dédié à Roland Marchal et Fariba Adelkhah, alors prisonniers scientifiques en Iran.

Dans le cadre du nouveau Programme Afrique, un cycle d'invitation d'écrivains sur le thème Littérature et sciences sociales a débuté en 2023, en lien avec la Maison des arts de Sciences Po. Il est coordonné par Elara Bertho (CNRS-LAM) et Elgas (écrivain et chercheur sénégalais). Parmi les premiers invités : Sami Tchak, Armand Gauz, Hemley Boum, Beata Umubeyi, Johary Ravaloson.

 

- Les défis économiques et sociaux du continent africain

Il existe également une longue tradition de recherche en économie politique des sociétés africaines, depuis les premiers travaux de Béatrice Hibou sur l’ajustement structurel, la privatisation et la criminalisation des Etats, la bureaucratisation néolibérale et l’économie politique de la domination jusqu’aux débats les plus récents sur l’avenir du franc CFA et du régionalisme, en passant par les travaux de Roland Marchal sur les économies de guerre. Ces travaux ont également intégré une dimension internationale en travaillant sur le rôle des bailleurs de fonds et de leurs politiques, sur les dimensions économiques de l’extraversion des sociétés africaines et l’insertion internationale du continent ou sur l’ONGisation continue des économies africaines.

Aujourd’hui, de nouvelles recherches interrogent les évolutions les plus récentes du capitalisme digital sur le continent, ainsi que les formes prises par la prétention à la souveraineté économique qui s’impose aux dirigeants et à l’élite politique et économique comme à la société civile ou aux organisations internationales. Michael Bourdon mène une recherche doctorale sur les startups en Afrique de l'Ouest comme vecteurs de recomposition de l'Etat et du capitalisme depuis septembre 2023. Ce projet conduit en collaboration avec les universités d’Oxford et de Wits à Johannesburg renforce l'axe digital exploré par le Medialab et le projet PIAF sur la biométrie et la vie sociale des documents d’identité.

Le projet Ethnographies of African Work Worlds lancé en octobre 2023 dans le cadre de la TIER Alliance avec Columbia University, vise à repenser la question du travail en Afrique. Il est co-animé par Mamadou Diouf, Brian Larkin, Jinny Prais (Columbia University) et Richard Banégas (CERI).



 

Africa programme

Directrice scientifique

  •  Florence Bernault (CHSP)

Co-directrice internationale

Conseil scientifique:

  • Richard BANEGAS (CERI)
  • Florence BERNAULT (CHSP)
  • Sandrine PERROT (CERI)
  • Laurent FOURCHARD (CERI)
  • Jules VILLA (Medialab)
  • Maëlle GÉLIN (CHSP)

Contact éditorial