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02.07.2024
Présentation de Selectra, la startup made in Sciences Po qui dépasse les 100M€ de chiffre d’affaires
Incubée en 2010 au sein du centre pour l’entrepreneuriat, la start-up Selectra a bien grandi. En 2024, le comparateur de prix des contrats de la maison qui compte 2 200 collaborateurs dépassera, pour la première fois, la barre symbolique des 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. Voici quelques-unes des clés de son succès, livrées par ses cofondateurs : Aurian de Maupeou et Xavier Pinon.
Des associés très complémentaires
Ne vous fiez pas aux CV d’Aurian et Xavier pour juger de leur complémentarité. Tous deux sont diplômés du master Finance et Stratégie de Sciences Po, le premier en double-diplôme avec l’université suisse de Saint-Gall, le second en double-diplôme avec Columbia University (New York). Tous deux ont fait presque toute leur carrière en tant que codirigeants de Selectra.
Aurian est le geek du duo, complètement autodidacte sur les sujets techs, mais désormais assez expérimenté. CRM, systèmes de téléphonie, hébergement de sites, CMS, développement d’applications internes ou externes, Aurian est à la manœuvre sur tout ce qui peut contenir une ligne de code. Rapide et impatient, il adore innover et débuter des chantiers avant de s’en lasser et de passer à autre chose une fois la première version achevée. Le projet passe alors dans les mains de Xavier, pour être structuré et développé afin de faire advenir une version plus aboutie. Les compétences de ce dernier relèvent davantage de la gestion de projet, du management et du marketing.
Un lancement très tôt à l’international
Selectra s’est lancée dès 2013 dans une diversification internationale qui a porté ses fruits. C’est l’Espagne que Selectra a choisi pour ses premiers pas à l’étranger. “J’ai rencontré lors d’une soirée deux espagnols qui m’ont demandé ce que je faisais dans la vie. Ils m’ont demandé si ça paraissait faisable en Espagne. J’ai dit pourquoi pas ! Ils ont démissionné de leurs jobs en France, nous nous sommes associés et ils se sont mis au travail !” raconte Aurian. L’Espagne est aujourd’hui le premier marché de Selectra, devant la France.
Après divers pays européens, Selectra n’a pas hésité à tenter sa chance dans des contrées plus exotiques. “Il est devenu possible de choisir son fournisseur d’énergie au Japon à partir du 1er avril 2016 et ce pays est soudainement devenu le plus grand marché ouvert à la concurrence du monde ! Nous ne pouvions pas rater ça !” s’enthousiasme Xavier. Les deux associés avaient tous deux étudié au Japon dans le cadre de leur troisième année à Sciences Po, Xavier à l’Université de Tokyo et Aurian à l’Université Waseda. “Si nous n’avions pas été au Japon avec Sciences Po, un lancement dans un pays si différent nous aurait fait peur. D’ailleurs, aucun de nos concurrents européens ne nous suit là-bas !” explique Xavier. “J’ai découvert le concept de croyance limitante en m’intéressant au sujet du coaching. Depuis, j’essaie d’encourager tout le monde à les identifier et à les chasser de son esprit pour éviter de se fermer des opportunités.” ajoute-t-il.
C’est aujourd’hui vers l’Amérique Latine que se tournent les regards de Selectra, avec des lancements récents et prometteurs sur les marchés mexicain, péruvien, argentin, chilien et colombien.
La culture de l’échec rapide
“On nous a encouragés à Sciences Po à nous lancer vite pour tester, et changer notre fusil d’épaule tout aussi vite si ça ne marche pas.” se rappelle Aurian. Le développement international n’a ainsi pas été une évidence dans tous les pays, avec des échecs rencontrés sur de nombreux marchés comme les Etats-Unis, le Canada, la Pologne ou encore le Brésil, qui ont tous fait l’objet d’un retrait.
En interne, Selectra promeut la capacité à penser et exécuter rapidement des “pivots stratégiques” pour faire face à l’échec en abordant des problématiques business sous de nouveaux angles. Par exemple, à ses débuts, Selectra était concentrée sur la proposition de services de comparaison aux consommateurs souhaitant changer de fournisseur d’énergie, à une époque où l’ouverture des marchés de l’énergie ne faisait pas recette et où les particuliers étaient très attachés au fournisseur historique. Le succès n’est venu que lorsque Selectra a ciblé les consommateurs en situation de déménagement en leur promettant une solution pour transférer tous leurs contrats de la maison (électricité, gaz naturel, entretien chaudière, box Internet, assurance habitation). Un pivot stratégique qui ne s’est pas démenti depuis, les partenariats avec les agences immobilières pour gérer les démarches de leurs clients en situation de déménagement étant en croissance constante.
En 2024, c’est le lancement du Selectra Score qui illustre une nouvelle tentative de pivot stratégique. Inspiré par le Nutriscore pour les produits alimentaires, le Selectra Score consiste en une note de A à E reflétant l’appréciation par Selectra du rapport qualité-prix de chaque offre de fourniture d’énergie du marché. Sont pris en considération la compétitivité prix de chaque offre, mais également son impact environnemental, ses taux de litige devant le Médiateur de l’énergie, ses avis clients sur le web, et les garanties prémunissant le consommateur contre une hausse de prix. L’idée est d’innover pour fournir un nouvel outil aux consommateurs dans la comparaison de prix : plutôt que de remplir un fastidieux formulaire de comparaison, se distinguer par la mise à disposition d’une information synthétique, lisible et immédiatement accessible.
La curiosité d’esprit et la lecture de la presse
“Nous lisions la presse quand nous étions à Sciences Po, tous les jours, juste par envie de comprendre comment fonctionne le monde autour de nous.” confie Xavier. C’est dans un magazine d’information économique distribué en Péniche que les deux cofondateurs découvrent, en mars 2007, que le marché de détail de l’électricité et du gaz s’apprête à s’ouvrir à la concurrence, leur donnant l’idée de créer l’entreprise. “Choisir la forme juridique de son entreprise, payer ses cotisations sociales et ses impôts, gérer les problèmes de droit du travail… J’ai l’impression que la lecture de la presse m’a fait gagner énormément de temps sur tous ces sujets.” précise-t-il.
Faire à sa manière plutôt que d’imiter le succès
“Avant, quand quelqu’un réussissait dans mon secteur, je regardais ce qu’il faisait et j’essayais de faire la même chose. Ça n'a jamais marché.” indique Xavier. Les entrepreneurs en herbe ont ainsi progressivement appris à faire confiance à leur propre manière de faire plutôt qu’à essayer de répliquer le succès des autres. Pour maximiser leurs chances de succès, les projets de développement stratégiques ne sont lancés que s’ils reposent sur des croyances fortes qui reflètent l’ADN du groupe. Les managers sont également encouragés à développer leur propre style de management, afin de se sentir profondément alignés avec leurs valeurs et leur personnalité.
L’ADN de l’entreprise a d’ailleurs été clarifié dans un livre rédigé par Xavier et intitulé “Le guide du management en mode startup”, publié en 2022 aux éditions Baudelaire, en français et en anglais. Après 15 ans aux commandes de Selectra, les cofondateurs ont gagné en certitude sur l’identité de l’entreprise et peuvent affirmer des convictions fortes, comme l’importance de se donner à soi-même l’ambition d’une obligation de résultat, la nécessité de lutter contre l’omniprésence des réunions dans les emplois du temps, ou l’utilité de respecter le principe MECE (mutually exclusive, collectively exhaustive) dans toute production interne. Cet ouvrage est transmis par email à chaque candidat faisant l’objet d’une proposition d’embauche, afin d’éviter toute surprise sur les spécificités de l’environnement de travail.
S’entourer des bons prestataires-partenaires
Les prestataires font l’objet d’une sélection attentive puis c’est une relation partenariale qui se noue avec eux, davantage qu’une relation classique de prestataire à donneur d’ordre. “Je connais des donneurs d’ordre qui n’hésitent pas à exiger de leurs prestataires une remise immédiate de 30% sous la menace de la fin d’un partenariat. Je pense qu’à long terme, ces comportements sont très préjudiciables non seulement aux prestataires, mais aussi au donneur d’ordre.” explique Aurian. Seul un attachement sincère et bipartite au partenariat permet en effet de créer les conditions nécessaires à son plein épanouissement.
Parmi les réussites de cette politique, la collaboration avec Removall, un développeur de projets environnementaux. Selectra a organisé en 2023 un grand sondage en interne pour présenter à l’ensemble de ses collaborateurs différents projets environnementaux à soutenir, leur laissant le choix de sélectionner celui qui leur plaisait le plus. Malgré son prix, le plus élevé du panel, c’est le projet Hamparan de Removall, opéré par Gree Energy qui a été choisi, Selectra s’engageant à acheter pour une durée de sept ans l’ensemble des crédits carbone générés par le projet, soit un total prévisionnel de 232 667 tonnes CO2 eq pour un investissement de plusieurs millions d’euros. Le projet consiste dans le traitement d’eaux usées issues d’industries agroalimentaires en Indonésie visant à la récupération du méthane et à la production d’électricité. Le choix du prestataire a été bien inspiré, le projet ayant remporté en 2024 un prix au World Government Summit de Dubaï, suite à une sélection parmi 2 638 autres initiatives.
La mobilisation du réseau des Sciences Po
Xavier est aujourd’hui Président du groupe Entreprendre des Alumni de Sciences Po, un réseau qu’il a fréquemment mobilisé par le passé pour atteindre des objectifs business. “Il y a une vraie solidarité dans la communauté. Quand vous voulez aborder une grande entreprise et que vous ne savez pas comment vous y prendre, il y a toujours un Sciences Po dans l’annuaire des Alumni pour vous filer un coup de main, répondre à vos questions et vous souhaiter bonne chance.” Un coup de pouce bienvenu au moment de la négociation de partenariats ou pour prendre un avis sur les performances d’un prestataire potentiel.
La conscience de la nécessité de se réinventer en continu
Le monde étant caractérisé par son impermanence, toute entreprise est toujours en sursis et se doit de trouver les innovations et stratégies qui vont constituer le succès de demain. Se projeter dans le futur permet de comprendre que son business model est déjà obsolète et qu’il est temps de le réinventer.
Ces réflexions n’ont rien de théorique chez Selectra, dont l’activité devrait être bouleversée à plus d’un titre par l’intelligence artificielle. Cette technologie entraînera-t-elle le remplacement de conseillers téléphoniques et de gestionnaires de contenus de sites web par une machine, ou leur servira-t-elle uniquement de support ? L’intelligence artificielle va-t-elle réduire le trafic sur Internet issu des moteurs de recherche, qui contribuent aujourd’hui beaucoup à l’activité de Selectra ?
Chez Selectra, on a conscience que rien n’est jamais acquis d’avance.
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