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06.04.2022

Le mal logement de la communauté Roms dans cinq villes européennes

Les discriminations et le mal logement des communautés Roms sont, malheureusement, devenus des lieux communs de nombreuses villes européennes (Paris, Barcelone, Milan, Gyöngyös, Miskolc) ; ces phénomènes de misère nécessitent des investissements publics et humains nouveaux. À travers son enquête, Piégés dans un taudis ? Discrimination et privation des Roms en matière de logement dans les villes européennes publiée en mars 2022, Tommaso Vitale (enseignant checheur à Sciences Po au Centre d’études européennes et de politique comparée) retrace les trajectoires uniques d’individus éprouvant bien plus que des difficultés à se loger.

Une misère socialement admise

En donnant la parole à plus d’une centaine de Roms, l’enquête dirigée par Tommaso Vitale permet de comprendre que « les conditions de logement dépendent de nombreux facteurs socio-géographiques urbains divers, notamment la ségrégation résidentielle, ethnique et sociale, le manque d'infrastructures et de services publics ».

Les 128 entretiens qualitatifs menés ont permis de souligner des similarités dans les conditions d’habitation des personnes interrogées, au-delà des villes et des pays. Certaines situations, telles que vivre dans une seule pièce commune au foyer, mais également avoir un accès limité à l’eau courante et aux énergies (électricité et gaz) sont très rependues.

Des dispositifs d’aide sociale luttant contre cette forte précarité existent. Pour autant, ils connaissent un accueil mitigé de la part des personnes interrogées. Certaines solutions parviennent à répondre aux besoins immédiats en logement, mais à quel prix ? Elles comprennent bon nombre de défaillances, et parfois ne permettent pas d’accéder aux éléments rudimentaires d’un logement décent.

Tommaso Vitale établit un lien entre la détérioration des conditions de logement et de vie de la plus grande minorité ethnique d’Europe et des politiques publiques fondées sur le principe « selon lequel il faut d'abord s'intégrer, puis éventuellement obtenir une maison ». Les volontés et les comportements des décideurs publics doivent ainsi être observés pour comprendre la mise en œuvre concrète des politiques de logement en faveur des Roms dans les villes analysées.

Des politiques urbaines inadaptées

Les volontés publiques et politiques de lutte contre le mal-logement des populations Roms existent et sont régulièrement mobilisées dans le cadre des politiques de la ville. Ce rapport met en exergue l’importance de la formation et du développement des compétences du personnel et des travailleurs sociaux. Les approches du corps administratif et social, vis-à-vis des publics visés, apparaissent comme des éléments déterminants sur lesquels reposent l’attribution d’un logement et le devenir social de ses habitants. C'est pourquoi la recherche a également inclus 10 entretiens collectifs (focus groups), deux dans chaque pays, avec des activistes, des travailleurs sociaux, des administrateurs locaux et des représentants d'agences gouvernementales.

« Trop de tentatives démagogiques n'ont pas produit de solutions durables : nous devons changer de perspective. Le logement familial peut être un point de départ fondamental pour tout parcours d'intégration : il garantit la stabilité nécessaire à la scolarisation, à la formation et au travail. Traditionnellement, cependant, il est considéré comme le point d'arrivée, qui est atteint lorsque d'autres conditions préalables ont été remplies. Placer le logement au sommet de la liste des priorités, c'est mettre l'accent sur un droit qui n'est pas protégé pour de nombreuses catégories de la population. En particulier pour les Roms ». Luciano Gualzetti, (Directeur de Caritas Ambrosiana)

Le manque de transparence concernant les règles d’attribution des logements, les discriminations ethniques et raciales, la non-écoute des besoins effectifs des populations ne permettent donc pas l’application de mesures équitables et témoignent ainsi de politiques publiques non-pensées pour une complète insertion sociale des Roms en Europe.

Après avoir réaffirmé politiquement la primauté du droit au logement, l’enquête insiste sur le renforcement du travail social envers les populations Roms. Cet accompagnement doit s’effectuer sur un temps long et s’orienter vers une approche préventive face aux difficultés financières que rencontrent les familles.

Lire l’enquête Piégés dans un taudis ? Discrimination et privation des Roms en matière de logement dans les villes européennes.

Un projet et des séminaires dédiés

Le projet R-Home mené par le CEE entend bouleverser ces mécanismes d’exclusion en plaçant au centre les personnes et familles montrant « un engagement très fort à aller au-delà de leur propre condition ». Projet de recherche sur le logement et les Roms, il étudie les conditions de logement des minorités Roms dans la plupart des pays membres de l’Union Européenne. Les mécanismes et les processus de discrimination et d’exclusion sont étudiés de manière systématique et comparative, afin de pouvoir cibler les instruments de politiques publiques et les réglementations et améliorer ce qui permet de mieux inclure les minorités.

Consultez le projet R-Home et ses contenus

Projet R-Home (Roma : Housing, Opportunities, Mobilisation and Empowerment), cofinancé par le programme Droits, Egalité et Citoyenneté, appel : REC-AG-2018 de la Commission Européenne