Accueil>L’opinion mondiale face au changement climatique

04.05.2023

L’opinion mondiale face au changement climatique

L’Observatoire international Climat et opinions publiques (Obs’COP) est une enquête mondiale réalisée tous les ans depuis 2019 par EDF et Ipsos auprès de 24 000 personnes dans 30 pays qui diffèrent par leur climat, leur culture, leurs régimes politiques, leurs enjeux économiques et sociaux. Dans un livre collectif que vient de publier EDF sous la direction de Didier Witkowski (EDF) et Daniel Boy (Sciences Po, Cevipof), une vingtaine de spécialistes de sciences sociales se sont penchés sur différentes thématiques ou sur les résultats d’un pays en particulier. Cinq membres du CEE y ont contribué : Emiliano Grossman et Charlotte Halpern ont examiné l’opinion des populations sur les politiques publiques du climat, Richard Balme s’est penché sur les données concernant la Chine tandis que Lucien Thabourey et Florence Faucher ont analysé celles du Royaume-Uni. Ci-dessous, une brève présentation de quelques résultats marquants.

Politiques publiques du climat : des attitudes globalement favorables mais des marges de manoeuvre réduites

Face à la résistance que peuvent rencontrer les mesures de politiques publiques en faveur du climat, de quelles marges de manœuvre disposent les gouvernants ? 13 items de l’enquête portant sur l’opinion relative à des mesures politiques (telles que la création d’un péage pour l’accès aux centres urbains, le développement des éoliennes en mer, l’interdiction des vols de courte distance…) ont permis à Emiliano Grossman et Charlotte Halpern d’explorer cette question. En moyenne, les mesures favorables au climat sont plutôt soutenues par les populations, mais ce soutien tend à s’affaiblir entre 2019 et 2022. Une analyse plus fine montre que ce soutien diminue avec le niveau de richesse du pays (graphique ci-dessous). La France se situe parmi les pays les moins favorables, comme la plupart des pays riches. Parmi les pays à faible PIB, certains sont aussi aux premières loges des conséquences du changement climatique, tout en ayant une part plus faible de responsabilité dans les causes.

Soutien moyen aux mesures en faveur du climat en fonction du niveau de PIB par habitant

graphique montrant le soutien à différentes mesures de politiques publiques en fonction du niveau de richesse des pays

Comment expliquer cette relation ? Une hypothèse est que le niveau de soutien varie en fonction de la perception que se font les répondants de la réalité ou de la probabilité de mise en œuvre des mesures. Dans les pays à faible revenu, où ces questions restent relativement abstraites et la probabilité de mesures contraignantes est plus faible, on observe la position la plus favorable aux mesures proposées. Du côté des pays plus riches, la réalité est inverse : les mesures déjà prises sont plus ambitieuses, leur mise en œuvre est source de contraintes plus importantes et leur coût en termes de changement de comportement loin d’être négligeable pour une plus grande partie de la population, d’où l’existence de contestations.

Patriotisme environnemental et techno-optimisme en Chine

D’après les données de l’enquête, analysées par Richard Balme, les Chinois font preuve d’un « patriotisme environnemental » attesté par l’attachement à l’environnement, la préoccupation pour les problèmes environnementaux et une perception très positive de l’engagement des autorités pour y faire face – des données en décalage avec l’image de la Chine comme premier pollueur mondial. L’inquiétude des Chinois, plus élevée que pour la moyenne des 30 pays, s’accompagne d’optimisme et d’adhésion à la transition écologique : 57 % (+ 9 points par rapport à la moyenne des 30 pays) pensent qu’il faut donner priorité à l’environnement même si cela doit ralentir la croissance et détruire des emplois ; 59 % (le record des pays interrogés) pensent que leur pays donnera la priorité à l’environnement plutôt qu’à l’économie dans les mois à venir (graphique ci-dessous). Cet optimisme est fortement teinté d’une confiance dans les solutions technologiques puisque 43 % des Chinois placent le progrès technique et les innovations devant les changements de comportement comme solution face au changement climatique (+ 12 points par rapport à la moyenne, + 21 points par rapport à la France).

Priorité à l’environnement ou à la croissance : arbitrage et prédictions des Chinois

graphiques montrant que les Chinois sont majoritaires à penser qu'il faut donner la priorité à l'environnement sur l'économie, et que leur pays le fera.

Passivité et pessimisme au Royaume-Uni

Bien que le Royaume-Uni soit le berceau de mouvements de protection de l’environnement et que des mouvements écologistes récents puissent donner l’impression d’une population mobilisée face aux enjeux climatiques, les données de l’enquête analysées par Lucien Thabourey et Florence Faucher offrent des résultats contrastés. Les Britanniques placent certes l'environnement assez haut dans leurs priorités (43 % contre 40 % pour la moyenne des 30 pays) mais sont en moyenne moins inquiets qu'ailleurs (62 % contre 69 %). Ils font preuve d'une relative passivité politique (voir par exemple le graphique ci-dessous) et individuelle, préférant s’en remettre à leur gouvernement (74 % des Britanniques le citent comme acteur devant agir en priorité, contre 68 % en moyenne et 66 % en France). Ils font néanmoins preuve de pessimisme sur la capacité de leur gouvernement à arbitrer en faveur de la préservation de l’environnement face à la croissance économique : seuls 18 % pensent que leur pays donnera dans les prochains mois la priorité à l’environnement, contre 32 % en moyenne mondiale.

Part des citoyens ayant participé ou comptant participer à une manifestation pour le climat

graphique montrant que les Britanniques sont moins nombreux que les Français ou que la moyenne mondiale à avoir déjà manifesté pour le climat ou à envisager de le faire

Pour aller plus loin

Retrouver plus de détails sur les résultats exposés ci-dessus, et d’autres aspects de l’enquête, dans l’ouvrage collectif : 
Witkowski, Didier & Boy, Daniel (dir.), Une planète mobilisée ? L’opinion mondiale face au changement climatique, Paris, EDF, 2023
À télécharger en PDF sur : www.edf.fr/observatoire