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Axe de recherche : État et politiques publiques

Section #presentation

Présentation de l'axe État et politiques publiques

Quelles sont les transformations en cours des États contemporains ? Pris dans de multiples interdépendances, ils sont soumis à des dynamiques de changement à la fois externes – la globalisation, des formes diverses d’intégration régionales/multilatérales/transnationales, les mutations du capitalisme, les reconfigurations du champ social et politique au sens large – et internes – les réformes de décentralisation et de privatisation, les mobilisations, les pressions des extrêmes politiques, la mise en cause de la légitimité, les mutations des formes des bureaucraties publiques (par exemple leur néo-managérialisation) et l’introduction de nouvelles technologies (par exemple numériques avec la dématérialisation).

Dans ce contexte de mutations profondes, ces États contemporains restent massivement des policy states, c’est-à-dire 1) des États producteurs de politiques publiques qui opèrent un travail continu de sélection et hiérarchisation des problèmes publics et, à l’inverse, de désinvestissement / démantèlement de domaines d’action publique antérieurs, de renouvellement des formes d’instrumentation ; mais aussi 2) des États qui se transforment sous l’effet des politiques publiques qu’ils contribuent à développer et qui les affectent en retour. Ce phénomène n’est d’ailleurs pas restreint aux seuls États-nations, mais s’étend à des entités supranationales, comme l’Union européenne, et à des systèmes politiques opérant parfois en l’absence d’État.

Section #programme-23-27

Programme scientifique 2023-2027

Au cours de la période 2023-2027, l’axe poursuivra l’analyse des recompositions des États (notamment des membres de l’Union européenne) et des politiques publiques, dans le contexte des grandes transformations qui affectent les interventions des premiers et l’organisation des secondes : transition écologique et numérique, aggravation des inégalités sociales, crises multiples (pandémie, réfugiés, ressources naturelles, sécurité et terrorisme), recomposition des politiques économiques et budgétaires, tensions géopolitiques croissantes et montée du protectionnisme, transformations du champ politique marqué par la polarisation et par des formes aiguës de défiance à l’égard des pouvoirs publics. Ces mutations complexifient les processus d’action publique, questionnent les modes d’organisation existants, accentuent les contradictions entre les différentes interventions des États et requièrent des formes inédites d’articulation voire d’intégration entre politiques publiques. Elles donnent lieu ce faisant à une attention renouvelée à la planification et au développement d’un pilotage par les objectifs et les résultats.

Ces recompositions seront explorées dans une perspective comparée (entre contextes politiques, entre secteurs et entre pays), et selon quatre dimensions permettant des interfaces fructueuses avec les autres axes.

Ces mutations s'observent dans une variété de politiques publiques en Europe. Une attention particulière sera accordée à la construction, au pilotage et aux effets des enjeux de transition écologique sur les politiques publiques (Charlotte Halpern, Ulrike Lepont, Matteo Mandelli, Nathalie Morel, thèses de Jean-Baptiste Bonnet et Marta Tramezzani).

Le contexte est paradoxal : d’une part, les problèmes publics semblent réactiver et relégitimer le rôle des États, mais d’autre part ces derniers n’en ont plus forcément les moyens, doivent s’appuyer sur les capacités d’autres échelons de gouvernance ou des acteurs du privé, et suscitent parfois la défiance des citoyens. A titre d’exemple, les États peuvent subir un encadrement européen plus étroit de leurs capacités à dépenser et à s'endetter (Patrick Le Lidec). Les caractéristiques de l’État en transformation (régulateur, stratège, vert, investisseur, etc.) seront analysées, par exemple dans le cadre de travaux sur les conséquences du Brexit et le possible démembrement du Royaume-Uni (Florence Faucher, Colin Hay, Patrick Le Galès, Takuya Onoda), dans les contextes de régimes illibéraux en Europe et au-delà, ou à partir de réflexions sur les liens entre organisations criminelles ou mafieuses et organisations étatiques (Gabriel Feltran, Federico Varese).

Les nouvelles dynamiques de recomposition seront appréhendées en prenant en compte la poursuite de l’érosion du monopole des États, l’importance des processus de circulation et de transfert de modèles et la variété des acteurs collectifs engagés dans ces politiques : mobilisations sociales, acteurs privés, associations, groupes d’intérêt, élites gouvernementales non-élues, experts, etc. (William Genieys, Takuya Onoda, thèses de Marie Inès Harté, Arno Lizet, Francesco Nardone, Marta Tramezzani).

Les politiques publiques contemporaines s’appuient sur des normes, des représentations, des modes de publicisation, des techniques d’activation et de participation des citoyens, ou des dispositifs de suivi de l’opinion, qui sont susceptibles de transformer les rapports à l’État des citoyens-ressortissants-bénéficiaires. Plusieurs recherches menées au CEE placent ainsi au cœur de leurs réflexions les bénéficiaires et les assujettis ou plus largement les citoyens exposés à des politiques publiques, qu’il s’agisse des politiques de justice restaurative et transitionnelle (Sandrine Lefranc), des politiques territoriales destinés à créer du lien social (thèse d’Arno Lizet) ou des politiques symboliques menées par le gouvernement français dans ses réponses aux attentats ou à la pandémie (Laurie Boussaguet, Florence Faucher, Sandrine Lefranc, thèse de Francesco Nardone).

Pour favoriser le développement de ce programme de recherche, l’axe s’est doté d’un cycle de séminaires, les « Policy state conversations ».

Section #programme-17-22

Programme scientifique 2017-2022

Sur un plan conceptuel et théorique, l’analyse systématique des policy states dans différents contextes (Europe, États-Unis, Amérique Latine) a permis d’avancer dans l’identification des mécanismes les plus puissants de transformation de l’État. Sur un plan empirique, le travail collectif réalisé dans cet axe a produit quelques études de cas (Grande-Bretagne, France, Italie, Mexique, Brésil). Mobilisant un nombre important de membres du laboratoire, ce travail a été réalisé dans une perspective comparative et au croisement des différents apports des sociologies de l’État et de l’action publique, des recherches sur les bureaucraties publiques, et de la sociologie des mobilisations. Trois orientations structurantes ont été suivies.

Pour rendre compte des reconfigurations en cours des États contemporains, les phénomènes de redistribution et de relocalisation des rapports de pouvoir en tant que saisis par les politiques publiques et les institutions ont été étudiés empiriquement. Ceci a permis d’analyser les processus, conflits et résistances à travers lesquels se redéfinissent les juridictions, les frontières et les capacités d’exercice de l’autorité politique entre ces instances, et la façon dont les politiques publiques voient leur rôle renforcé en tant que vecteur d’intervention par et sur les autorités étatiques dans de multiples domaines.

Plusieurs recherches ont été lancées en ce sens au CEE sur :

  • les transformations des périmètres entre les ministères, les agences et leurs bureaucraties respectives (projet SOG-PRO, Philippe Bezes) ;
  • les politiques de réforme territoriale et la transformation des formes d’organisation des relations État-local (Patrick Le Lidec) ;
  • les nouvelles hybridation public/privé à travers les politiques de contrôle des migrations et des frontières (Virginie Guiraudon) ;
  • les politiques de transport, de logement, de la transition énergétique et du climat (projets CREATE, MORE et SUMP-PLUS de Charlotte Halpern, travaux de Patrick Le Galès, Richard Balme, Roberto Rodriguez, Alvaro Artigas) ;
  • la nature de la stateness dans le processus post-Brexit de “démembrement” du Royaume-Uni (Colin Hay), sur l'État dans une perspective comparée au-delà du contexte européen (Patrick Le Galès, Ruggero Gambacurta-Scopello).
  • les unelected governmental elites du secteur de l’assurance maladie et la reconfiguration des États en France et aux États-Unis (William Genieys).
  • la politisation de « l'État régulateur » en Angleterre, en France, au Japon et dans d'autres pays industrialisés, notamment dans le domaine des politiques de santé et pharmaceutiques mais aussi d’autres secteurs des services publics, et son implication pour l'autorité et la légitimité de l'État (Cyril Benoit, Takuya Onoda)
  • les politiques sociales-écologiques. Quel est l’impact du changement climatique sur les inégalités sociales ? Quels sont les risques sociaux générés par le changement climatique ? Quelles sont les politiques sociales susceptibles de prendre en charge ces nouveaux risques sociaux ? (Bruno Palier, Colin Hay, Tom Chevalier)

Les travaux sur la production législative française ou européenne (Observatoire des institutions européennes, Olivier Rozenberg en partenariat avec l’EUI) ou encore sur les liens entre intégration et politiques de l’UE (Charlotte Halpern) s’inscrivent aussi dans cette réflexion sur les redistributions des rapports de pouvoir.

Les formes à travers lesquelles les États exercent leur activité de gouvernement (au sens large, de direction, de régulation, de contrôle et d’anticipation) et se renouvellent en lien avec le renforcement des rationalités politiques néo-libérale et néo-managériale constituent une seconde orientation de recherche. Ceci donne lieu au développement de technologies (dispositifs, savoirs, expertises, instruments, etc.) de plus en plus rationnelles et dépolitisées (par exemple, les indicateurs, la prédiction et la futurologie, des procédures de “bon gouvernement” et de réduction de la charge réglementaire, des technologies numériques, des bases de données, etc.). Ces technologies sont fabriquées et circulent dans et entre les nouveaux gouvernements, y compris les États, mais aussi et surtout dans les espaces transnationaux. Les activités de gouvernement s’en trouvent profondément bouleversées et ont constitué en tant que telles un objet d’investigation privilégié dans les recherches du CEE. Ceci inclut les travaux sur la gouvernance du futur dans les systèmes politiques et les relations entre les sciences sociales et les policy analysis en lien avec la prédiction, la prospective et la planification (Jenny Andersson), sur le champ du transhumanisme et des futurs post-humains (thèse d’Apolline Taillandier), sur la place des dispositifs dans l’étude comparée et pluridisciplinaire des politiques fiscales dans le secteur du care/services à domicile en Europe et aux États-Unis (Virginie Guiraudon, Nathalie Morel), sur la rationalisation des modes de gouvernement et de contrôle des bureaucraties publiques sous l’effet du New Public Management (Philippe Bezes), sur la réduction de la charge réglementaire dans les politiques agricoles françaises et européennes (thèse de Blandine Mesnel), sur les instruments de l’action publique et les choix d’instrumentation (Charlotte Halpern, Pierre Lascoumes, Patrick Le Galès), par exemple de la transition écologique (thèse de Théodore Tallent), sur le recours croissant aux technologies du numérique (Antoine Courmont) et sur l’ouverture/la fermeture d’accès aux droits (Tommaso Vitale).

Ce troisième volet a étendu la réflexion aux effets induits par les transformations de l’État sur l’émergence de nouvelles formes de légitimation (par ex. par les résultats ou l’efficacité), qui affectent en retour les relations avec les citoyens-ressortissants-bénéficiaires des politiques publiques et contribuent à la diffusion de normes (par ex. “bon” gouvernement, “bonne” gouvernance et “bon” État) au nom de la démocratie. Des formes inédites de participation se développent, en lien avec la multiplication des techniques de suivi de l’opinion et d’activation des citoyens ; des règles de responsiveness, de transparence, d’éthique, de lutte anti-corruption s'institutionnalisent ; enfin, la multidimensionnalité des risques (financiers, climatiques, terroristes, environnementaux, sociaux, etc.) confère aux États une opportunité de se positionner symboliquement comme gestionnaires de crises. La transformation des rapports entre les États, producteurs de politiques publiques, gestionnaires de crise, managérialisés ou censément plus transparents, et les citoyens ordinaires rassemble un nombre important de travaux du CEE sur les dispositifs de participation et de délibération citoyenne dans les politiques de l’énergie, du renouvellement urbain et de la transition écologique (Richard Balme, Clément Boisseuil, Charlotte Halpern), le recours aux symboles dans les discours et pratiques gouvernementales pour organiser le débat public et le cadrage des enjeux sur les attentats (Florence Faucher, Laurie Boussaguet), la dimension symbolique des politiques de réforme territoriale (Patrick Le Lidec), les effets de longue durée du néolibéralisme, de l’austérité et de la crise sur les formes de l’État et les mouvements sociaux (Jenny Andersson, Colin Hay, Patrick Le Galès), sur les formes de la socialisation politique, les attitudes face à la criminalité, aux inégalités, et le rapport au politique (Colin Hay), la prise en charge des migrants et l’ouverture/fermeture des accès aux droits (Tommaso Vitale, Laura Morales, Virginie Guiraudon), la diffusion des normes de transparence et de « bon » gouvernement et la mise en place de politiques de prévention de la corruption (thèse de Sofia Wickberg), la production des rapports de confiance (trust) entre les citoyens et les gouvernants (thèse de Bilal Hassan), les relations entre agriculteurs et institutions européennes dans le cadre du “verdissement” et de la bureaucratisation de la politique agricole commune (thèse de Blandine Mesnel) ou la question du statut conjugal et de l’accès à la nationalité au Japon dans le cadre de mariages entre nationaux et étrangers (thèse d’Amélie Corbel).

Au final, la volonté de tenir ensemble et de faire jouer les unes avec les autres des approches souvent trop autonomisées a permis d’explorer les transformations de l’État et de l’action publique dans leurs différentes dimensions et ce de manière comparative afin d’identifier les conditions nationales et transnationales de production, les mécanismes qui les traversent et les effets des contextes.

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