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18.10.2022
Discours sur l'état de l'Union européenne : promouvoir la solidarité et la démocratie
Article initialement publié >sur le site de Sciences Po par l'équipe éditoriale de Sciences Po.
Le mercredi 14 septembre, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a prononcé son discours annuel sur l’état de l’Union devant le Parlement européen. À cette occasion, elle a invité la Première Dame d’Ukraine, Olena Zelenska et a renouvelé le soutien inconditionnel de l’Europe envers l’Ukraine, ainsi que d’autres annonces d’importance.
L'École des affaires internationales (PSIA) et l’École d'affaires publiques de Sciences Po, avec la coopération de la représentation en France de la Commission européenne, ont organisé une conférence permettant d’analyser le discours de von der Leyen et ses implications pour la France, l’Europe et le reste du monde. Valérie Drezet-Humez était présente en tant que cheffe de la Représentation en France de la Commission européenne, remplacée au cours de la conférence par son adjointe Jessica Larsson. En tant que doyenne et doyen de PSIA et de l’EAP, Arancha González et Philippe Martin étaient les deux autres invités de l’événement.
ÉNERGIE ET SOLIDARITÉ : UN “MESSAGE D’ESPOIR”
Valérie Drezet-Humez considère ce discours annuel iconique, qui existe depuis 2010, comme un véritable “moment démocratique et politique”. Il n’est pas l’occasion pour Ursula von der Leyen de revenir sur ses actions passées mais plutôt d’exprimer sa vision sur les défis stratégiques du moment. Prononcer ce discours en temps de guerre est une première à bien des niveaux, et a permis à la Présidente de la Commission européenne de livrer un “message d ’espoir”, de solidarité et de courage. Elle se doit d’incarner l’Union européenne (UE) afin d’apaiser les inquiétudes de ses citoyens en leur apportant des solutions.
Arancha González a identifié quatre messages principaux dans le discours sur l’état de l’Union 2022, dont l’un est adressé à la Russie. La doyenne de PSIA, une école qui porte l'analyse des conflits internationaux et des luttes de pouvoir au cœur de son ADN, a perçu au travers du discours une réaffirmation du soutien de l’UE à l’Ukraine face à la Russie. Au sujet de l’usage stratégique de l’énergie russe comme arme contre l’UE, Arancha González affirme que la présidente von der Leyen a voulu exprimer clairement que l’UE ne “se laisserait pas faire” et qu’elle réussirait à “produire de l’énergie européenne”, coupant ainsi sa “dépendance envers la Russie, grâce à la solidarité”, accélérant dans le même temps son chemin vers la “neutralité carbone”.
En effet, bien que les moyens permettant d’atteindre cet objectif soient toujours en attente, au grand dam de Philippe Martin qui ne comprend pas l’annonce six mois en avance de l’embargo russe sans mise en place de plafonnement des prix de l’énergie, Valérie Drezet-Humez explique que la solution ne réside pas seulement dans les prix de l’énergie mais aussi dans le type d’énergie, dans le “modèle que nous souhaitons investir”.
La doyenne de PSIA est convaincue qu’un autre message, “la locomotive européenne va vrombir”, est aussi adressé à des acteurs puissant tels que la Chine et les Etats-Unis, afin de leur faire comprendre que l’UE va se doter d’outils lui permettant d’être compétitive comme une plus grande flexibilité fiscale, des accords de marché, des investissements sur les matières premières, etc.
“L’EUROPE NE PREND PAS LA DÉMOCRATIE À LA LÉGÈRE"
S’il y a un élément qui fédère les trois intervenants de la conférence, c’est bien l’importance de la démocratie, une valeur centrale de l’UE. Valérie Drezet-Humez est claire : le soutien européen de l’Ukraine n’est pas seulement militaire et humanitaire (pour les réfugiés), il représente un combat pour les valeurs européennes que sont la démocratie, la liberté, la liberté de la presse… Ce combat qui a été fondateur dans la naissance de l’UE est toujours d’actualité aujourd’hui et elle ajoute que les jeunes générations ne devraient jamais “se reposer sur leurs acquis”. Philippe Martin salue également la puissance certaine des démocraties européennes face à l’agression russe mais il alerte sur la relative faiblesse de la démocratie sur des sujets de moindre ampleur.
Arancha González identifie aussi dans le discours sur l’état de l’Union un message adressé aux citoyens européens : “l’Europe ne prend pas la démocratie à la légère”. Cependant, pour être “crédible à l’extérieur”, l’UE doit “être crédible chez soi”, et pour la doyenne de PSIA, cela peut découler de mesures comme combattre la corruption, accélérer le processus d’admission (particulièrement pour la Macédoine du Nord et l’Albanie), poursuivre le projet de convention européenne et construire une communauté politique européenne. Sciences Po apporte sa pierre à cet effort européen en créant des alliances avec d’autres universités européennes, par exemple avec le projet CIVICA. Le message qu’Ursula von der Leyen adresse au reste du monde est pour Arancha González que l’Europe prend à cœur la responsabilité de façonner les “biens public mondiaux”, de protéger les droits humains et des travailleurs, de conclure “un pacte migratoire digne”. Ces objectifs ne peuvent être atteints sans coopérer avec d’autres continents comme l’Afrique et l’Amérique latine.
Pour conclure, les deux doyens de Sciences Po s’accordent sur un même constat, le “message puissant” – et nécessaire – de ce discours sur l’état de l’Union doit laisser un espace pour la nuance et le débat. Philippe Martin souligne l’importance de pouvoir débattre et critiquer au sujet des sanctions contre la Russie, qu’il aurait espérées plus sévères. Arancha González déconseille de diviser le monde entre méchants et gentils et prévient qu’un “espace de dialogue et de coopération” doit être maintenu avec certaines autocraties, même si cela ne signifie pas “que l’on doit s’apprécier”.