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01.02.2024
Juliette Lequesne et Jeanne Saliou, promotion 2020
Juliette Lequesne et Jeanne Saliou sont toutes deux diplômées de la promotion 2018-2020 du Double Master affaires européennes de Sciences Po et de la London School of Economics. Ayant suivi la spécialité Europe in the World, elles sont les deux lauréates françaises du programme de Jeunes Professionnels en Délégation (JPD) de l’Union européenne, Juliette travaillant dans la Section intégration européenne et politique de la Délégation de l’UE au Monténégro (Service Européen pour l'Action Extérieure) , et Jeanne dans la Section de coopération de la Délégation de l’UE au Chili (Commission Européenne).
Pouvez-vous décrire vos parcours universitaires et professionnels ?
Juliette : J’ai tout d’abord effectué un double bachelor en histoire et politique à l’Université McGill au Canada, où je me suis très vite spécialisée sur les questions de transition postcommuniste et d’intégration des pays d’Europe Centrale et du Sud Est de l’Europe à l’UE. J’ai rencontré des professeurs passionnants qui m’ont confortée dans le choix de poursuivre sur les sujets d’élargissement à l’UE.
C’est la raison pour laquelle le double master affaires européennes entre Sciences Po et la London School of Economics s’est rapidement avéré le programme idéal pour acquérir des bases solides sur le fonctionnement de l’UE et de ses institutions, avec des cours fondamentaux en économie et en droit institutionnel de l’UE, et une spécialisation sur l’étude des relations extérieures de l’UE et de son rôle dans les affaires internationales. J’ai pu effectuer un premier stage à la Direction de l’Union Européenne du Ministère des affaires étrangères, puis grâce à l’extension des conventions de stage de Sciences Po durant la période Covid, j’ai saisi l’opportunité qui s’offrait de partir en Moldavie, où j’ai travaillé au sein de la chancellerie politique de l’Ambassade de France. Cette expérience a renforcé mon intérêt professionnel pour l’action diplomatique.
Jeanne : J’ai rejoint le double diplôme entre Sciences Po et la LSE après trois années de CPGE littéraire au lycée Henri IV. Si les relations internationales suscitent depuis longtemps mon intérêt, ma curiosité pour les affaires européennes est née de rencontres faites durant cette période. Le double diplôme, avec cette spécialité “Europe in the World”, répondait donc parfaitement à mes attentes. Au terme de celui-ci, et grâce notamment aux connaissances acquises en matière de droit de l’UE, j’ai intégré le Master 2 Droits de l’Homme et Union européenne de l’Université Paris 1, ce, dans le but de me spécialiser dans l’impact des questions numériques sur la démocratie et les droits humains. Mon parcours professionnel a ensuite été structuré autour de ces questions, avec notamment l’obtention de mon premier poste au sein du Service des Affaires européennes et internationales de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Quelles ont été les étapes majeures de la construction de votre projet professionnel ?
Juliette : Forte de mon expérience à l’Ambassade de France en Moldavie, j’ai ensuite réalisé le stage Blue Book de la Commission Européenne, à la Direction générale du voisinage et des négociations d'élargissement (DG NEAR), unité Albanie et Bosnie-Herzégovine. Cette première expérience au sein d’une institution européenne, en première ligne dans les négociations d’adhésion de l’UE avec les pays des Balkans occidentaux, a été très formatrice pour le travail que j’occupe actuellement à la Délégation de l’UE au Monténégro. A la suite du stage Blue Book à la DG NEAR, je souhaitais acquérir une expérience professionnelle plus longue au sein d’un pays des Balkans occidentaux. Le hasard fait parfois bien les choses car l’Ambassade de France en Albanie ouvrait justement un nouveau poste de VIA (volontariat international en administration), chargée de mission gouvernance, au sein du service de coopération et d’action culturelle. J’ai saisi l’occasion. Durant deux années, j’ai suivi pour la France à Tirana les questions liées à l’État de droit (justice et droits de l’Homme) et les actions de coopération dans ces domaines avec la société civile, dans le contexte du processus d’adhésion de l’Albanie à l’UE. Ce fut une expérience professionnelle extrêmement enrichissante qui m’a convaincu de rester un peu plus dans la région…
Jeanne : À vrai dire, mon projet professionnel est toujours en évolution et se réajuste à chaque nouvelle expérience. Néanmoins, un des tournants principaux dans sa construction a été ma participation à la Simulation du Parlement européen Canada-Québec-UE lors ma dernière année de CPGE. Alors que je ne connaissais encore que peu de choses aux institutions européennes, cela a changé l’orientation de mes études et m’a conduite à intégrer le double diplôme Sciences Po - LSE. Trois ans plus tard, je me retrouvais en stage dans la Commission des Libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen, cette même commission à laquelle j’appartenais lors de la simulation.
Par la suite, mon premier stage, réalisé en parallèle des cours à Sciences Po, chez ALPHALEX-CONSULT, un cabinet conseil a été la première porte d’entrée sur deux domaines structurant de mon parcours. J’y ai découvert les politiques numériques et d’innovation, qui sont devenus un de mes sujets d’intérêts principaux et m’ont conduite à rejoindre la Commission nationale de l’informatique et des libertés, d'abord en tant que stagiaire dans son Laboratoire d’innovation numérique, puis en tant que juriste en affaires européennes et internationales. Je m’y suis également familiarisée avec différents types de fonds européens, ce qui a été précieux pour appuyer, en tant que stagiaire, la mission du Rapporteur Spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme auprès de l’UE, et qui continue de m’être utile aujourd’hui dans la Délégation.
Quelles sont les principales caractéristiques de vos postes aujourd'hui en Délégation de l’Union européenne ?
Juliette : En tant qu’attachée politique, je participe au suivi des négociations d’adhésion du Monténégro à l’Union européenne, plus particulièrement le chapitre 24 (migration, asile, visa, gestion des frontières) et le chapitre 31 (politique étrangère, sécurité, défense). Je travaille étroitement avec les ministères monténégrins compétents dans le cadre de la nouvelle feuille de route de l’élargissement.
Depuis octobre 2023, le Monténégro a un nouveau gouvernement pro-européen, qui a entamé des réformes importantes pour accélérer le processus d’adhésion. Notre rôle au sein de la Délégation de l’UE est d’accompagner au mieux les autorités monténégrines sur la voie de l’adhésion, en lien avec les représentants des États membres de l'UE, les organisations internationales et les acteurs de la société civile. L’analyse politique, la rédaction de rapports et de briefings permet également d’informer Bruxelles (SEAE et Commission) de l’avancée des réformes. Il n’y a pas de journée type. Je peux participer aux réunions avec les ambassadeurs des États membres, visiter un centre de réception de migrants, avoir un rendez-vous avec le consul ukrainien pour parler du statut de protection temporaire des réfugiés, préparer une visite de haut niveau. Cette diversité rend le travail en délégation particulièrement riche.
Jeanne : En tant que chargée de programme, je participe à la gestion de projets financés par l’Union européenne au Chili. Il s’agit de suivre de A à Z la vie de ces projets, de leur conception à leur clôture. Mon portefeuille va du suivi de la mise en œuvre au Chili de programmes régionaux de coopération en matière de criminalité et de sécurité (lutte contre la cybercriminalité, le trafic de drogue, la criminalité transnationale organisée, etc.) à la gestion d’appels à projets spécifiques au Chili, en matière de droits humains et de la société civile. Il comporte également le suivi du programme EUROsociAL Puente, qui propose une assistance technique basée sur trois piliers : les politiques d’égalité des genres, de gouvernance démocratique, et les politiques sociales.
Ainsi, selon le type de projet, je suis amenée à être en contact avec de nombreuses parties prenantes chiliennes - qu’il s’agisse des ministères, agences gouvernementales et autres institutions ou de la société civile et du monde universitaire. Les tâches sont très variées et chaque projet permet de découvrir en profondeur certains aspects de la société chilienne, notamment dans le cadre de missions sur le terrain.
Quelles ont été les contributions de votre formation à l'École d'affaires publiques, et plus particulièrement la spécialité Europe in the World et le double master avec la LSE, envers les fonctions que vous occupez aujourd'hui ?
Juliette : Le double diplôme avec la LSE s’est avéré très enrichissant sur de nombreux aspects. C’est un excellent équilibre entre l’acquisition de connaissances académiques sur le projet d’intégration européenne et de compétences pratiques sur l’UE. À Sciences Po, grâce à la spécialité « l’Europe dans le monde », j’ai pu appréhender une diversité de thèmes allant de la politique de l’UE face aux crises, les stratégies diplomatiques au sein des organisations internationales ou bien encore les positions de l’UE vis-à-vis de la Chine et de la Russie. Tous ces sujets font échos au quotidien dans mon travail actuel au sein de la Délégation de l’UE au Monténégro.
Jeanne : Je n’avais préalablement que peu abordé les questions européennes dans mes études. Ainsi ce cursus m’a en premier lieu apporté un socle solide de connaissances en matière de politiques publiques, d’économie et de droit européen. Les cours de la spécialité Europe in the World m’ont permis d’approfondir différentes facettes de l’action extérieure de l’UE, de la diplomatie culturelle aux questions économiques et de sécurité, en passant par la structuration des programmes de coopération. Ce dernier aspect s’est avéré particulièrement utile lors de mon arrivée dans la Délégation, pour naviguer les différents types de projets sur lesquels je travaille.
Auriez-vous un conseil à donner à un ou une étudiant(e), futur jeune diplômé(e) ?
Juliette : Je dirais qu’il ne faut pas hésiter à demander conseil, que ce soit à des professeurs, des professionnels, ou à de jeunes diplômés que vous avez trouvé sur LinkedIn, ils seront souvent prêts à partager leur expérience et à vous aider dans votre parcours professionnel. Qui sait, cela peut même déboucher sur de belles opportunités!
Jeanne : Si vous avez du temps, participez à la vie associative de Sciences Po, ou en dehors dans vos territoires d’origine, vos quartiers actuels ou villes à venir. Non seulement vous pourrez faire des rencontres, mais cela permet également de mettre en application certains enseignements et de développer des nouvelles compétences et connaissances extrêmement précieuses. Si comme moi, vous venez d’un territoire rural français, je recommande fortement de rejoindre - si elle existe - l’association de votre département aux Grandes Écoles de la fédération DTGE. C’est une manière de rester ancré dans son territoire et vos expériences et parcours sont autant d’exemples sur lesquels les lycéens qui en sont issus pourront s’appuyer pour construire leur parcours.