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30.06.2022

Rencontre avec Pauline Delmas, diplômée 2018 du master Droit économique spécialité Contentieux Économique et Arbitrage

Pauline Delmas
Pauline Delmas

Pouvez-vous décrire votre parcours universitaire et professionnel ?

Je suis entrée à Sciences Po en 2012, après mon baccalauréat. Après deux ans au Collège Universitaire sur le campus de Paris et une année d’échange au sein de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), j’ai intégré le master Droit Économique. Lors d’une année de césure entre la première et la deuxième année de ce master, j’ai effectué trois stages en droit du travail, droit pénal des affaires, et contentieux et arbitrage dans des cabinets anglo-saxons, avant d’intégrer, en deuxième année de master, la spécialité Contentieux Économique et Arbitrage (CEA). Une fois diplômée en 2018, j’ai fait un stage à la cour d’appel de Paris, avant d’enchaîner sur la préparation du CRFPA, que j’ai obtenu la même année. En parallèle, j’ai choisi d’effectuer un Master 2 en Droit international privé au sein de l’Université Paris II Panthéon-Assas. Enfin, après mon stage final d’élève-avocate en 2020 au sein du cabinet TEMIME, spécialisé en défense pénale et contentieux, j’ai prêté serment en novembre 2020, et exercé pendant un an en droit pénal des affaires au sein du cabinet Huc-Morel Labrousse Avocats.

Pour différentes raisons, je me sentais à l’étroit dans la profession d’avocat et dans mon cabinet. J’étais devenue avocate par passion pour la justice, presque au sens moral du terme. Je concevais, et je conçois toujours, le droit comme un outil, qui peut servir à la défense des plus forts comme à celle des plus faibles selon l’usage qu’on en fait. La position idéale pour moi aurait été de ne pas me limiter à l’application, même créative, du droit, mais aussi de contribuer directement, par une action notamment politique, au changement législatif et à la construction de nouvelles normes plus justes. Cet idéal est devenu réalité début 2022, lorsque j’ai finalement raccroché la robe pour devenir juriste et chargée de plaidoyer au sein d’une association : la Maison des Lanceurs d’Alerte.

Comment est né votre intérêt pour les études de droit ?

Progressivement, au cours de ma deuxième année d’études à Sciences Po. J’y étais entrée à l’origine avec un fort intérêt pour les relations internationales. Au fur-et-à-mesure, j’ai pourtant été attirée par la dimension bien plus concrète du droit. Le passionnant cours alors donné par Bernard Stirn, "Le juge et les libertés", a été déterminant à cet égard.

Cet intérêt a été confirmé lors de ma troisième année à UCLA, lors de laquelle j’ai surtout pris des cours destinés aux étudiants souhaitant ensuite intégrer la Law School.

Quelles sont vos missions et votre cadre de travail ?

L’association au sein de laquelle je travaille, la Maison des Lanceurs d’Alerte (MLA), a été fondée en 2018 à l’initiative de 17 organisations, qui en compte désormais 30. Notre conseil d’administration comprend par exemple Transparency International France, Greenpeace, le Syndicat National des Journalistes… La MLA a pour mission d’accompagner les lanceurs d’alerte sur le plan juridique, principalement, mais aussi médiatique, social, financier et psychologique.

Nous disposons d’une plateforme sécurisée par laquelle toute personne peut nous envoyer un signalement, qui sera instruit par notre permanence juridique, tenue à la confidentialité. Lorsque le dossier concerne bien une alerte éthique, et que la personne remplit les critères du lanceur d’alerte prévus par la loi, nous fournissons des conseils juridiques, pouvons rédiger une note de soutien dont le lanceur d’alerte pourra se prévaloir en justice, et, dans certains cas, intervenons à l’audience dans le cadre de contentieux stratégiques.

En tant que juriste et chargée de plaidoyer, j’ai une double casquette et des missions variées. D’une part, en tant que juriste, je participe aux activités de la permanence juridique de l’association, telles que décrites ci-dessus. D’autre part, en tant que chargée de plaidoyer, je fais du lobbying à l’échelle à la fois nationale et européenne pour améliorer la protection des lanceurs d’alerte. Par exemple, je travaille beaucoup en ce moment sur les meilleurs moyens juridiques de sauvegarder la liberté d’expression face à l’augmentation des procédures-bâillons visant les journalistes et les lanceurs d’alerte, une directive européenne sur le sujet étant en cours d’adoption.

Quelles ont été les contributions de votre formation à l'École de droit envers la fonction que vous occupez aujourd'hui ?

Outre la rigueur d’analyse et la forte capacité de travail qu’elle permet de développer, à mon sens, la grande force de cette formation réside dans l’apprentissage de la déconstruction des normes. Il ne s’agit pas seulement de devenir juriste, mais également de développer une approche critique du droit, de l’aborder comme un objet social construit et donc toujours susceptible d’évoluer.

Ce dernier aspect continue de m’être utile au quotidien dans ma fonction de chargée de plaidoyer, en ce qu’une partie de mon travail exige justement d’aller au-delà du droit positif (c’est-à-dire du droit en vigueur) pour proposer de nouvelles règles plus adéquates.

Quels souvenirs gardez-vous de votre école, de votre promotion, de vos enseignants ?

Il faut reconnaître que la première année du master Droit économique est très exigeante : le rythme est soutenu, et l’étendue des connaissances et réflexes à acquérir semble parfois vertigineuse. L’année de césure m’a été extrêmement utile car elle m’a permis d’assimiler ces nouvelles connaissances en les mettant en pratique, et j’ai ainsi pu aborder la deuxième année du master en étant bien plus "solide" juridiquement.

Cette dernière année a donc été très plaisante, au sein de la spécialité Contentieux Économique et Arbitrage (CEA). J’ai noué des liens forts avec plusieurs personnes de ma promotion, tout en profitant pleinement de la stimulation intellectuelle offerte par les cours, en particulier le module "Stratégies du procès", lors duquel nous devions échanger chaque semaine des écritures juridiques en équipe.

Enfin, s’agissant des enseignant.e.s, j’ai particulièrement apprécié l’ensemble des cours dispensés par Marie Mercat-Bruns, dans lesquels celle-ci nous invite avec brio à questionner différentes normes juridiques.

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