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08.12.2021
Rencontre avec Robin R., diplômé 2020 du master Carrières Judiciaires et Juridiques
POUVEZ-VOUS DÉCRIRE VOTRE PARCOURS UNIVERSITAIRE ?
Après avoir obtenu une licence de droit au sein d’une université parisienne, j’ai décidé de rejoindre le master Carrières judiciaires et juridiques (CJJ) de Sciences Po afin de me préparer, dans les meilleures conditions, au concours d’officier de gendarmerie. Après deux années passées au sein du master CJJ et de la classe préparatoire de l’École de droit, j’ai pu intégrer l’École des Officiers de la Gendarmerie Nationale en août 2020. Depuis maintenant plus d’un an et demi, je me forme au sein de cette grande école militaire et de service public à mon premier poste de commandement opérationnel.
COMMENT EST NÉ VOTRE INTÉRÊT POUR LES ÉTUDES DE DROIT ?
Sciences po m’a avant tout enseigné que le droit est un langage au cœur duquel se niche un élément politique. Loin d’être une matière froide et formelle, le droit est le lieu dans lequel vient s’incarner une volonté politique. L’ensemble des branches du droit (pénal, public comme civil) nous renseignent sur les mouvements qui traversent notre société, et c’est cette dimension qui a fait naître mon intérêt pour ces études. Les cours dispensés au sein du master et de la classe préparatoire sont qui plus est assurés par des praticiens qui, à force de manier les normes juridiques, arrivent à discerner le fond politique de règles parfois techniques.
Aujourd’hui plus encore, le droit est au centre de ma future profession. Chaque action d’un officier de gendarmerie s’inscrit dans un cadre juridique déterminé. Chaque acte opérationnel, chaque acte d’enquête ou de procédure se fonde sur une source législative, réglementaire ou jurisprudentielle. Placée au centre de la structure étatique, l’institution que je sers doit veiller en permanence à préserver les libertés individuelles de chacun tout en garantissant le respect de l’ordre public. Le droit est là pour nous permettre d’assurer cette conciliation permanente entre des intérêts parfois contraires.
Quel est le cours qui vous a le plus marqué ?
Les enseignements de culture générale de David Mayel et de Franck Kessler sont ceux qui m’ont le mieux permis d’élargir ma compréhension des enjeux sociétaux contemporains. J’y ai appris à penser librement sans me plier à l’air du temps, mais aussi et surtout à penser contre moi-même. Je suis sorti, grâce à ces cours, d’un prisme d’analyse purement juridique de certains sujets. J’ai saisi qu’en croisant des références artistiques, littéraires, économiques, philosophiques, cinématographiques ou même musicales, l’on pouvait appréhender la complexité de certains phénomènes et s’extraire des schémas de pensée pré-établis.
Ils m’ont éloigné de l’idée qui consiste à croire que la culture générale est une science théorique et élitiste éloignée des réalités pratiques. En tant que jeune officier, je devrai demain concevoir des stratégies de sécurité au service de notre population, et je sais que je pourrai me reposer sur les réflexes qui m’ont été transmis pour mieux répondre aux besoins de ceux que j’aurai à servir. Comme disait un certain Général "La véritable école du Commandement c’est la culture générale… Au fond des victoires d’Alexandre, on retrouve toujours Aristote".
Quels sont vos projets pour la suite ?
D’ici quelques mois, j’irai prendre le commandement d’une unité élémentaire de gendarmerie. Mes premières années de carrière militaire me conduiront à occuper des temps de commandement opérationnel au plus près de la population, des élus, des partenaires économiques et associatifs et toujours en lien avec les acteurs judiciaires et administratifs des territoires. A ces phases opérationnelles suivront des temps de responsabilité au sein de la direction générale de la gendarmerie ou dans des états-majors régionaux ou départementaux.
J’ai décidé pour mon premier temps de commandement de rejoindre la gendarmerie mobile. Dès ma sortie d’école, je commanderai un peloton composé d’une vingtaine de militaires. J’aurai à assurer des missions de maintien et de rétablissement de l’ordre, de renfort et d’appui aux unités territoriales, mais aussi des missions de défense militaire. Ma subdivision d’arme est également conduite à se projeter à l’international sur des théâtres d’opérations extérieures et dans des territoires sensibles pour sécuriser nos emprises diplomatiques.
Un conseil pour celles et ceux qui souhaiteraient rejoindre le master Carrières Judiciaires et juridiques ?
Je dirai simplement aux candidats de ne pas se poser de barrières, de croire qu’en seulement deux ans le master CJJ permet de saisir ce qu’est la substance même du droit. C’est une formation faite sur-mesure par des praticiens qui permet d’acquérir les savoirs méthodologiques indispensables aux concours et examens judiciaires et administratifs. Que vous soyez juriste ou non n’hésitez donc pas.
Vous côtoierez des étudiants avec des parcours antérieurs différents, avec des appétences différentes et avec des aspirations et des ambitions professionnelles différentes. Vous appréhenderez le droit à l’aide des outils d’analyse que les enseignants vous fourniront, mais vous resterez libre de livrer votre propre regard. La finalité de cette formation n’est pas de vous faire connaître tout le droit, mais de comprendre la manière dont il fonctionne, la manière dont il apparaît et dont il se transforme.
Enfin il faut être conscient de la charge de travail qui est demandée durant les deux années de formation. Mais les efforts fournis finissent toujours par porter leurs fruits, ils permettent d’accéder à des carrières épanouissantes et riches de sens. Travaillez donc sans soucis de gloire ou de fortune, et comme le disait Christophe Jamin : "demandez vous si vous serez heureux dans dix ans".