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06.04.2021
Rencontre avec Tinatin Laoshvili, diplômée 2017 du master Droit économique spécialité Global Governance Studies
Pouvez-vous nous décrire votre parcours académique et professionnel ?
Je suis née en Géorgie et lorsque j'avais sept ans, ma famille a dû déménager à Moscou, en Russie, où j'ai grandi et passé la majeure partie de ma vie. Bien que le début ait été assez compliqué pour ma famille et moi-même, j'ai réussi à obtenir mon baccalauréat avec mention et à intégrer l’Institut d'État des relations internationales de Moscou (MGIMO), obtenant un diplôme avec mention en droit international. Je serai toujours reconnaissante au MGIMO pour l'expérience exceptionnelle que j'y ai vécue pendant mes quatre années d'études lors de ma Licence (et un très grand merci à tous mes professeurs de français, je n'aurais jamais maîtrisé le français à ce niveau sans eux).
Pendant mes études de premier cycle, j'ai effectué plusieurs stages, notamment dans un cabinet d'avocats international et dans une agence gouvernementale. Au cours de ces deux stages, j'ai travaillé sur certains aspects de l'éthique et de la conformité des affaires, ce que je trouvais très passionnant comme sujet.
Pour mon Master, j'ai décidé de poursuivre mon parcours en France et d'intégrer l’École de droit de Sciences Po, en raison de sa reconnaissance internationale et de sa réputation incontestable. Ma spécialisation était en Global Governance Studies (GGS) et après avoir eu mon diplôme en 2017, j'ai d'abord travaillé avec une entreprise de médias et de communication du CAC 40. Ensemble, avec les Deputy General Counsel et General Counsel de l'entreprise, je travaillais sur le développement du programme de prévention de la corruption.
J'ai ensuite décidé de me spécialiser dans la conformité et je travaille aujourd'hui pour une grande entreprise pétrolière et suis responsable du développement du programme de conformité en matière d'anti-corruption et de sanctions internationales et restrictions commerciales au niveau du groupe, pour le siège et toutes ses filiales. La raison d'être de mon travail est la mise en place d’un programme suffisamment solide pour prévenir les risques potentiels de corruption privée et publique, tant passive qu'active.
En parallèle, je prépare une certification internationale en matière de prévention du blanchiment d'argent.
Quelles sont vos missions et votre cadre de travail ? ET quelles ont été les contributions de votre formation à la fonction que vous occupez aujourd’hui ?
Je travaille dans un environnement international, et c'est certainement l'une des caractéristiques que j'apprécie le plus dans mon travail. Avant d'entrer à Sciences Po, j'étais déjà fascinée par l'idée de collaborer avec des personnes aux parcours et expériences différents, et Sciences Po n'a fait que renforcer cet appétit de connaître des cultures et des pays différents.
La conformité est un domaine difficile qui exige une approche inter-dimensionnelle aux problèmes complexes. Bien qu'il soit, bien sûr, fondé sur le droit, il est également façonné par d'autres disciplines, comme, par exemple, la politique et les relations internationales. Par conséquent, mon travail exige de résoudre des problèmes sous différents angles et de tenir compte de divers objectifs, tant publics que privés. Et cette approche multifactorielle à la résolution de problèmes est certainement un trait que j'ai pu développer pendant mes deux années à Sciences Po.
La conformité exige de rester vigilant face aux nouvelles tendances. Ceux et celles qui travaillent dans le domaine de la conformité savent à quel point il est important non seulement de suivre les changements, mais aussi d'être capable de les prévoir, pour que l'entreprise pour laquelle vous travaillez ou vos clients ne soient jamais confrontés à ces changements sans être préparés. La conformité consiste davantage à éviter les problèmes potentiels avant même qu'ils n'apparaissent, et non à les résoudre. Un bon professionnel de la conformité doit anticiper les risques et s'assurer qu'il les affronte armé et préparé. Et c'est ce qui est enseigné à l'École de droit de Sciences Po.
Le teamwork est une autre caractéristique importante de mon travail. Je suis en constante collaboration, avec des clients internes et externes. Les projets que je supervise nécessitent l'intervention de différents professionnels : finance, ingénieurs, vendeurs, avocats, assistants, achats. Et c'est exactement ce que l'on vous encourage à faire à Sciences Po : le travail en équipe était l'essentiel de mon programme. Faire suffisamment confiance aux membres de votre équipe pour ne pas les micro-manager, lorsque vous êtes responsable d'un projet de plusieurs millions d’euros, n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît, mais vous l'apprendrez certainement à l'École de droit.
Sciences Po encourage à être toujours critique et sélectif quant à ce que vous entendez, apprenez, et voyez, même envers vous-même. Me remettre en question est ce qui m'aide à réussir dans mon travail: ai-je envisagé toutes les options ? Suis-je sûre que rien ne manque ? Qu'en pensent les autres membres de mon équipe ? Dans quelle mesure cette information est-elle réellement tangible ? Les professionnels de la conformité les plus performants n'ont jamais tendance à accepter quoi que ce soit sans se poser de questions : mais est-ce vraiment le cas ? Parfois, les lois anticorruption peuvent être instrumentalisées dans des intérêts privés, et l'un de mes rôles est de m'assurer que l'entreprise pour laquelle je travaille n'est pas prise dans ce piège, et pour cela je dois remettre en question chaque information que je reçois.
Un mot pour celles et ceux qui veulent se lancer dans la "conformité" ?
Dans la conformité, les intérêts privés et publics se rejoignent et je ne connais pas d'autre domaine où cette caractéristique est aussi prometteuse. Non seulement la corruption coûte des milliards aux entreprises et à l’économie mondiale chaque année, mais elle porte également atteinte aux communautés locales et détruit le potentiel des pays, et ne peut être éradiquée qu'en étroite collaboration entre les parties prenantes publiques et privées.
J'ai toujours voulu avoir une carrière qui a du sens, dont je sais qu'elle profiterait aux personnes qui m'entourent, et la conformité est l'un de ces rares domaines où cela est possible. Si vous êtes à la recherche d'une profession ayant un but, vous devez absolument envisager la conformité.
C'est un domaine très passionnant qui est relativement nouveau pour la France. Sa communauté professionnelle est en train de se former et vous pouvez y participer activement.
Avant la pandémie (et j'espère que cela continuera après), j'ai pu non seulement voyager beaucoup pour mon travail dans différentes parties du monde, mais aussi participer à diverses conférences et réunions. Et en raison de la nature transversale de cette discipline, j'ai rencontré de nombreuses personnes aux parcours radicalement différents que je n'aurais jamais rencontrées dans d'autres conditions : avocats et juristes, personnalités et décideurs politiques, économistes, fonctionnaires, diplomates, scientifiques. Ils se retrouvent tous dans cette construction de la communauté de la compliance en France et au niveau international, et vous aussi pouvez y participer.
Un conseil pour celles et ceux qui souhaiteraient rejoindre l’École de droit ?
Osez et dépassez-vous. Et l'École de droit de Sciences Po est le meilleur endroit pour apprendre à le faire.