Accueil>"Mes amis de Sciences Po sont toujours des amis proches, des confrères / consoeurs que j'estime"
16.02.2023
"Mes amis de Sciences Po sont toujours des amis proches, des confrères / consoeurs que j'estime"
Pouvez-vous décrire votre parcours académique et professionnel?
J'ai commencé mes études à l'I.U.T. de Paris, puis je suis allé à Assas (Université Paris II), avant d'entrer à Sciences Po Paris. Je fais partie de la première promo de l'école de journalisme. J'ai rapidement fait des reportages TV à l'étranger. Avec Gallagher Fenwick, on est parti en Algérie tourner quelques sujets magazine, on a également tourné des reportage en Pologne sur la Shoah.
Dans le cadre de Sciences Po Paris j'ai étudié à Columbia University à New York, qui est aussi une école de journalisme très prestigieuse. Je reste très attaché à Sciences Po : c'est un labo génial, tourné vers l'international, sur la pratique et sur la connaissance du monde.
Pour la partie professionnelle, lorsque j'étais à New York à Columbia University, je faisais en même temps un stage chez ABC News, la chaîne américaine. J'ai été embauché en CDI chez ABC juste à la fin de mes études : le rêve ! J'étais au bureau de Londres, qui couvre l'Europe, l'Afrique et le Moyen-Orient. J'ai réalisé des reportages en Inde, au Sénégal, au Mexique, en Angleterre bien sûr,en Espagne et en France. Mes premiers reportages, je les ai fait en anglais.
Après quatre ans chez ABC News, j'ai travaillé pour différents employeurs, ABC en freelance, l'agence AP, France 24 en anglais puis en français. J'ai fait beaucoup de missions en Afrique, couvert de grosses compétitions sportives : JO de Sochi, coupe du monde au Brésil, Coupe d'Afrique des Nations, Euro en Ukraine, et beaucoup d'attentats, aussi, en France, en Europe et en Afrique. En 2016, je suis entré à France Télévisions pour le lancement de la chaîne France Info TV.
Quel poste occupez-vous aujourd'hui? A quoi ressemble votre travail au quotidien?
Je suis grand reporter à France Télévisions, rattaché à France Info TV. Je voyage très souvent aux Etats-Unis, c'est mon terrain de prédilection. J'ai couvert l'élection de Trump, puis celle de Biden. J'ai également réalisé un documentaire de 52 minutes sur l'affaire George Floyd à Minneapolis. Je réalise toutes sortes de formats : du duplex d'une minute au documentaire. J'essaie aussi de proposer un format spécifiquement dédié au web pour mes projets documentaires.
En ce moment, je couvre la guerre en Ukraine. J'y vais tous les 2 mois. J'ai également travaillé un an et demi au service enquêtes et reportages de France 2 / France 3. Cela a été notamment l'occasion de faire une mission de 2 semaines au bureau de France 2 à Moscou. C'était très étrange de passer du temps en Russie en pleine guerre, un pays où je suis allé plusieurs fois en temps de paix. J'étais un peu triste aussi de voir ce pays, qui semblait s'ouvrir sur le monde, se replier d'un coup sur lui-même.
Quelles ont été les contributions de votre formation à la fonction que vous occupez aujourd'hui?
Je suis le reporter que je suis aujourd'hui grâce à Sciences Po. Sciences Po Paris a représenté trois choses pour moi: tout d'abord, j'y ai appris toute la partie technique du journalisme, manier une caméra, monter un reportage, faire des directs. Aujourd'hui, je continue d'apprendre à manier de nouveaux outils : logiciels de montage, drone, nouveaux boîtiers de caméra. La deuxième chose, cruciale elle aussi, est d'avoir appris à élargir mes horizons. Avant Sciences Po, j'étais déjà passionné du monde, des langues étrangères, je parle cinq langues, mais cela a pris toute une autre dimension à l'Ecole de journalisme de Sciences Po. Une bonne partie de l'enseignement était donné en anglais. Il y avait des étudiants du monde entier : deux Chinois, trois Américains, une Russe, une Tchétchenne... sans compter les bi-nationaux ! C'était très mélangé et puis qu'il y avait ce double diplôme à Columbia University à New York. La troisième chose très importante, ce sont des amitiés très fortes. Mes amis de Sciences Po sont toujours des amis proches, des confrères / consoeurs que j'estime énormément que ce soit Gallagher Fenwick, Laurent Desbonnets, Ksenia Bolchakova par exemple.
Quels souvenirs gardez-vous de votre école, de votre promotion, de vos enseignants?
J'en garde un très bon souvenir, rien que d'en parler, cela me fait sourire. Ces deux ans à l'Ecole de journalisme de Sciences Po ont été deux années magiques, dorées. On a bossé comme des fous, on s'est aussi beaucoup amusé. Je me souviens de ces moments où terminait un format magazine sur la Pologne, on travaillait très tard la nuit, le sujet était terrible mais en même temps, on était complètement passionnés, on essayait d'améliorer notre montage. Il y avait une émulation incroyable, les profs étaient géniaux. On avait un rapport qui était basé sur un profond respect, de l'admiration même, mais sans hiérarchie excessive. C'était une bonne préparation aux rapports qu'on a en rédaction, aujourd'hui, je tutoie le directeur de l'info de France TV ! Pourtant, j'ai un immense respect pour lui et pour sa fonction. Les journalistes de terrain restent des saltimbanques, des gens qui portent des sacs lourds et qui font des duplex dans le froid ou sous un soleil de plomb.
>Quels conseils donneriez-vous à un étudiant qui souhaiterait devenir journaliste aujourd'hui?
Mon premier conseil est celui que j'ai tellement entendu quand j'étais étudiant : il faut être passionné, déterminé, surtout ne pas suivre cette filière par hasard ou par défaut. C'est un métier exigeant, à la fois exaltant et cruel. On peut être à la mode un jour, puis passé de mode le lendemain sans raison. Il y a aussi la question de l'emploi, même si Sciences Po Paris est une école top niveau, il faut se battre malgré tout. A plusieurs moments dans ma carrière, j'ai dû me battre pour continuer de faire ce que j'adore : du journalisme de terrain, pour être rémunéré à ma juste valeur, pour avoir un contrat solide. J'ai dû aussi me battre pour que les employeurs français comprennent la valeur d'une expérience de reporter dans une chaîne américaine. Je suis encore surpris de voir que de nombreux reporters de terrain parlent un anglais approximatif. Le deuxième conseil que je donnerais serait de s'intéresser à la question des horaires. Les gens qui travaillent à la radio, à la télévision, devront à un moment ou un autre travailler en matinale, ça veut dire se lever à 2h du matin, 4 ou 5 jours par semaine. En mission, il y a d'autres difficultés, des journées de travail de 18h, le fait de travailler non-stop pendant 15 jours, 20 jours, 30 jours.