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15.07.2024

Discours de Justine Nayral

La cérémonie de remise du diplôme 2024 a eu lieu pour la première fois au Grand Rex, le vendredi 28 juin 2024.

Justine Nayral, diplômée du master in Economics, mention summa cum laude, nous a fait l’honneur de prononcer son discours devant toute la promotion 2024 de l’École de la recherche. Nous la remercions chaleureusement et lui adressons toutes nos félicitations !

Discours de Justine Nayral

Chère doyenne, chers doyens, chères équipes pédagogiques, chers camarades, chers proches, je suis honorée et très touchée de m’exprimer devant vous aujourd’hui. 

Il y a deux ans, au moment de mes choix de Master, maman, un peu inquiète, m’a demandé : « Justine, tu es vraiment sûre de vouloir faire de la recherche ? Pourquoi ne pas plutôt choisir ‘affaires publiques’ ? ». Même si un Master « affaires publiques », c’est fantastique, j’ai choisi la recherche. Deux ans plus tard, j’avais écrit un mémoire, en partie sur, des containers. Je te rassure, maman, ces deux années ne m’ont pas seulement permis de développer une passion pour des boîtes en acier mais bien plus que cela. Je crois qu’il est temps, aujourd’hui, de te répondre. Qu’est-ce que la recherche ?

La recherche ? C’est savoir naviguer à travers un océan de savoirs. Lorsque nous sommes arrivés, dans nos Masters respectifs, il y a deux ans, nous pensions que tout avait déjà été fait. Puis, nous nous sommes aperçus que des zones sombres se dessinaient lorsque, de la surface de nos sujets de mémoire, nous nous approchions des profondeurs, identifiant ces petites ombres, d’où, outre le noir, la lumière peut émerger. Pierre Soulages écrivait en 1968 : « Je n’ai pas suivi un chemin prémédité, je dis souvent que c’est ce que je fais qui m’apprend ce que je cherche ». La recherche n’est pas une voie navigable dont on connait l’issue. Emportés par nos mémoires, nous nous sommes redirigés, parfois loin de nos destinations initiales, guidés par nos boussoles, nos superviseurs bienveillants. 

Ce voyage de deux ans à la frontière de la recherche a nécessité de nous préparer. Nous avons dû armer nos navires de nouvelles méthodes quantitatives et qualitatives, afin de développer une démarche scientifique, construite et critique. Nous avons appris à accepter que, si la perfection était inatteignable, nous devions essayer d’atteindre l’excellence. Le ciel s’est parfois obscurci, mais l’entraide au sein de l’équipage a permis de dissiper la tempête, notre hésitation, nos doutes, notre manque de confiance et tout découragement. 

Vous l’aurez compris, cette aventure était loin d’être solitaire. Nous avons eu la chance de faire escale dans des contrées qui nous étaient parfois inconnues, éveillant notre esprit à des sujets, parfois familiers, mais dont nous ne saisissions pas toute la complexité. Quelle joie ce fut d’échanger avec notre voisin, ― vous vous souvenez, ce visage familier à la bibliothèque ―, sur des thèmes aussi variés que les « Femmes noires dans l’Allemagne d’après-guerre », « l’assistance médicale à la procréation depuis la loi bioéthique », « l’engagement de l’Église catholique dans la politique migratoire euro-marocaine » ou encore « l’impact des politiques publiques locales aux États-Unis pour favoriser une transition écologique juste dans un contexte d’abandon progressif du charbon ». Quel programme ! Nous avons discuté avec des passionnés d’histoire, de sociologie, de sciences politiques et d’économie. Et parfois, je dois bien l’avouer, nos discussions étaient ponctuées de ces petits débats méthodologiques dont le microcosme des chercheurs a le secret. Nos échanges se prolongeaient souvent en dehors des horaires d’ouverture de la bibliothèque, autour d’un verre, formant le terreau de nouvelles amitiés. 

Aujourd’hui, nous sommes tous réunis dans cette salle mythique du Grand Rex. Je crois pouvoir dire que nous sommes tous arrivés à bon port, enrichis académiquement et humainement par ces deux années. Elles ne constituent cependant pas le bout du voyage, mais un cap, que nous avons franchi.

L’École de la recherche sème ses graines, comme une rivière éparpille des petits cailloux dans son sillage. Certains d’entre nous repartiront : Royaume-Uni, Espagne, Norvège, États-Unis et j’en oublie. Certains continueront à chercher, d’autres entreront dans l’administration, le secteur privé, le conseil, les ONG. Nous sommes maintenant dotés de ce qui a germé en nous, maman. Comme nous l’avait annoncé notre cher doyen à notre arrivée, nous avons appris à parler, écrire et compter. J’ajouterai grandir.

Je terminerai ce discours en remerciant l’École de la recherche, nos brillants professeurs, et toute l’administration. Nous pouvons également remercier nos proches, pour leur soutien et surtout pour avoir supporté nos conversations incessantes et passionnées sur nos sujets de mémoire. Sur une note plus personnelle, j’ai une pensée pour mes parents, ma famille, présente ici et en ligne, pour ma mamie disparue au début de ce doux mois de juin et pour feu mon papi. Pour lui, l’accès à l’éducation était essentiel même s’il en avait été privé, à son époque. Je remercie ma famille, en premier lieu mes parents, pour m’avoir toujours soutenue, en particulier, depuis mon baccalauréat, obtenu dans mon petit lycée aveyronnais.

Il est temps pour moi de conclure. Nous pouvons nous féliciter d’être diplômés !

« Mon parcours à Sciences Po a débuté en 2019 avec un Bachelor, majeure Économies et Sociétés, obtenu à l'été 2022 sur le campus de Paris, avec la mention summa cum laude. Au cours de ces trois années, j’ai pu étudier un semestre à University College London, au sein du département d’Économie. J'ai eu, à travers deux stages au Médialab de Sciences Po, ma première expérience de recherche en sociologie des médias. Grâce à ce semestre d'étude et à ces premiers stages de recherche, j’ai découvert deux passions, l'économie et la recherche. J'ai décidé de les associer en m'orientant vers le Master in Economics de l’École de la recherche dont je suis désormais diplômée, mention summa cum laude. Je vais, en amont d’un doctorat, approfondir mes compétences de future chercheuse, en travaillant comme assistante de recherche auprès de Xavier Jaravel, à la London School of Economics, complétant ainsi une autre expérience de recherche, effectuée auprès d'Isabelle Méjean. Mes thèmes de recherche portent sur la macroéconomie et le commerce international. Mon mémoire, supervisé par Isabelle Méjean, traite d’un sujet d’actualité : la transmission des chocs de coûts de transport maritimes et aériens à l’inflation, pour la récente période inflationniste. Il combine des évidences empiriques originales et un modèle calibré permettant de rationaliser ces dernières. J’ai collecté et utilisé une base de données sur les coûts de transport maritime et aérien pour la période 2017-2023, affectée post-Covid par une forte congestion des aéroports de commerce et des ports en Chine. Mon parcours à Sciences Po n'est pas seulement structuré autour de la recherche mais a constitué le point de départ de mon engagement bénévole. Originaire de l'Aveyron, j’ai été directement confrontée à l'autocensure et j'ai souhaité agir pour promouvoir l'égalité des chances en zone rurale. J'interviens régulièrement dans mon lycée d'origine, le Lycée Jean Vigo, à Millau, pour informer les élèves sur Sciences Po et les Grandes Écoles. Je propose également un accompagnement bénévole des élèves au concours d'admission du Collège Universitaire. Au cours de la crise du Covid-19, je me suis engagée contre les inégalités scolaires en donnant des cours de soutien en mathématiques, en ligne, à trois classes de seconde de mon lycée. En résumé, durant mes années à Sciences Po, j'ai pu découvrir ma passion pour la recherche en économie, tout en vivant mes engagements. »

Justine Nayral

Diplômée du master in Economics, promotion 2024

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