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25.06.2015

Intelligence économique : vive la «coopétition» !

Ancienne étudiante de la rue Saint-Guillaume, Claude Revel est aujourd’hui déléguée interministérielle à l’intelligence économique. Attachée à Sciences Po, elle y enseigne l’approche française de l’intelligence économique à l’École des Affaires Internationales et est intervenue lors de la dernière conférence de l’Executive Education. Entretien. 

Quel est l’objectif de votre cours sur l’intelligence économique à Sciences Po ? 

Claude Revel : Ce cours est consacrée à la doctrine française de l’intelligence économique. Il existe des concepts proches et plus anciens; notamment dans le monde anglo-saxon : la notion de business intelligence née aux États-Unis dans les années 60, puis de competitive intelligence qui est apparue dans les années 80, les théories plus contemporaines du risk management et du lobbying. L’approche française s’inspire de ces idées, mais se distingue par le fait qu’elle associe quatre dimensions, qui ailleurs sont souvent abordées séparément. 

Quelles sont ces quatre dimensions ? 

C.R. : Le premier pilier, c’est la veille permanente, qui permet d’anticiper. Ensuite, il s’agit d’assurer la sécurité économique : comment protéger son savoir-faire, ses données, mais aussi aujourd’hui, de plus en plus, son image et sa réputation. Cela nous conduit au troisième pilier, centré sur l’influence : comment se montrer proactif, être présent dans les instances où s’élaborent les règles du jeu, pour agir sur ces règles, et pourquoi pas les susciter. Le dernier pilier, c’est la formation, afin de diffuser ces réflexes le plus largement possible ! 

C’est la raison pour laquelle vous avez accepté de donner ce cours à Sciences Po ? 

C.R. : Pour moi, l’intelligence économique est incontournable, car il s’agit d’un mode de gouvernance de l’État ou de l’entreprise. Tous les étudiants sont donc concernés, quel que soit leur projet de carrière. Mon but est de leur donner des notions-clés qu’ils pourront réutiliser une fois en poste dans n'importe quel pays. C’est pourquoi j’essaye de dégager des grands principes, au-delà de la méthodologie : le cours n’est pas un simple mode d’emploi des outils. Il s’agit vraiment d’acquérir une culture de l’intelligence économique. 
Et puis les étudiants de Sciences Po sont de très bons interlocuteurs ! L’intelligence économique requiert une approche pluridisciplinaire et inter-culturelle, une bonne connaissance géostratégique. La formation des étudiants à Sciences Po est donc parfaitement adaptée, et leur permet de comprendre pleinement la notion et ses subtilités. 

Vous enseignez à l’École des Affaires Internationales (PSIA) à des étudiants qui viennent de pays et d’horizons très différents. Qu’est ce que cela apporte au cours ? 

C.R. : En effet : les deux tiers des étudiants que j’ai eu dans ce cours viennent d’ailleurs !  C’est très intéressant de les voir appréhender la notion sous des angles différents, en fonction de leur culture : cela crée des débats passionnants. Ce dialogue correspond parfaitement à la vision que je défends : je m’oppose totalement à la seule idée de “guerre économique”. L’avenir passe par la collaboration et l’échange. Je parle souvent de “coopétition” : pour moi il faut se préparer à travailler ensemble, à la fois en coopération et en compétition avec les autres. Des adversaires peuvent devenir des partenaires en fonction des sujets, et peuvent même être les deux à la fois. Quand on se forme ensemble, on se prépare à cela.

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