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09.12.2021

Comment les règles sur les codes vestimentaires ont changé (ou pas) à travers l'Histoire

De Louis XIV aux Black Panthers, de la reine Elizabeth aux flappers, la façon dont les différents groupes se sont habillés au cours de l'Histoire n'a jamais été neutre. Richard Thompson Ford, de l'Université de Stanford, et Marie Mercat-Bruns, de Sciences Po, font avancer le débat en abordant la question de la mode et du pouvoir dans l'ancien et le nouveau monde.

Le mardi 16 novembre, PRESAGE, le programme de recherche et d’enseignement des savoirs sur le genre de Sciences Po, a organisé une conférence avec Richard Thompson Ford, professeur à l'Université de Stanford et expert en droits civils et en droit anti-discrimination. Ce dernier a profité de l'occasion pour présenter des extraits de son nouveau livre, Dress Codes: How the Laws of Fashion Changed History (Codes vestimentaires : comment les règles de la mode ont changé l’histoire) et pour échanger avec des étudiantes et étudiants de Sciences Po sur des idées clés de son livre.

Sujet improbable mais porteur d'une énorme signification culturelle et politique, les vêtements - et les personnes qui les portent - ont été analysés sous un angle inattendu. Marie Mercat-Bruns, professeur à Sciences Po, a ouvert le débat en constatant qu'« il y a beaucoup plus que ce que l'on voit. La mode et l'apparence n'ont rien d'anodin, il s'agit d’une question liée à la condition humaine. » Si les vêtements concernent les êtres humains, ils concernent alors également les lois, la sociabilité et le rapport de classes. Ce sont précisément ces rapports de forces que Ford analyse tout au long de son exposé.

Sur l’usage des « outils » vestimentaires

« La mode est un outil », affime Richard Thompson Ford, « elle peut être utilisée par de nombreux groupes de personnes à des fins différentes, et elle l'a été. »

Divers groupes culturels, genrés et géographiquement définis ont utilisé (et continuent d'utiliser) cet outil, soit pour tenter de maintenir le statu quo social et politique, soit pour le déstabiliser.

En effet, tout au long de l'histoire, comme Ford l'a souligné, les vêtements et les lois relatives aux vêtements ont été utilisés pour contrôler l'expression de classe - les lois réservant les chaussures à semelle rouge à la monarchie française, par exemple, ou l'interdiction de « toutes les nouvelles modes » à Venise en 1551 - ainsi que pour perturber les normes et le statut social, comme avec les « habits du dimanche » portés par les manifestants lors de la Marche sur Washington en 1963.

Puisque les vêtements sont porteurs de sens, ce dernier est destiné à un public particulier, c'est-à-dire, à ceux qui nous entourent, nos voisins, nos amis et nos ennemis. Mais la signification qu'ils portent va au-delà du collectif, elle nous touche en tant qu'individus et se relie à l'identité elle-même.

Du collectif à l'individuel

Que signifie pour nous, aujourd'hui, un monde de plus en plus globalisé, où la mode durable  et le shopping vintage changent le visage de l'industrie ? Selon le professeur Ford, ces nouveaux phénomènes - qui suivent une tendance à l'individualisation et à l’expression de ses propres goûts qui a débuté au Moyen âge - permettent « un contrôle individuel et une liberté créative accrus » en ce qui concerne notre façon de nous habiller.

De la communauté queer aux groupes  de populations historiquement marginalisés, en passant par les femmes et la classe ouvrière, la mode a été utilisée non seulement comme un outil politique, mais aussi comme une représentation de soi, de la dignité personnelle et une expression de la valeur individuelle dans le contexte de la société.

Comment expliquer la démocratisation de la mode à une époque où les règles de la mode sont de moins en moins explicites ? Seul le temps nous le dira. Mais en attendant, comme le note Richard Thompson Ford, « l'expression de l'identité a été l'une des caractéristiques phares de la mode occidentale » et c'est nous qui déciderons de son avenir.

L'équipe éditoriale de Sciences Po

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Légende de l'image de couverture : Crédit : John Leech, London: Bradbury, Agnew & Co., 1886, Robarts Library