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20.02.2015
“Insuffler une culture de l'égalité"
Pionnière sur la réflexion sur le genre avec PRESAGE, le Programme de Recherche et d’Enseignement des SAvoirs sur le GEnre, Sciences Po coordonne également depuis janvier 2014 le projet EGERA. Mené en partenariat avec 7 institutions internationales et cofinancé par l’Union Européenne, EGERA est un programme ambitieux qui veut favoriser la prise en compte du genre et l’égalité hommes-femmes dans la recherche et l’enseignement supérieur. Explications avec Maxime Forest, enseignant-chercheur à Sciences Po qui assure la coordination scientifique d’EGERA.
Le programme EGERA (Effective Gender Equality in Research and the Academia) vise l’égalité femmes-hommes et la prise en compte du genre dans l’enseignement supérieur et la recherche, en quoi ces deux sujets sont-ils liés ?
Le programme EGERA veut encourager la mise en place de changements structurels au sein de l’enseignement et de la recherche par des recommandations et des solutions concrètes. Il s’agit de rendre plus visible les travaux sur le genre, d’en susciter de nouveaux, mais aussi de montrer la pertinence de l’adoption d’une perspective de genre pour l’égalité femmes-hommes. La gender blindness, l’aveuglement au genre, conduit en effet parfois à des travaux de recherche incomplets ou biaisés et donc à une rupture d’égalité. En économie, par exemple, on a tendance à considérer les individus d’un point de vue neutre, alors que l’activité économique et marchande est très « genrée » ! On peut aussi penser aux recherches biomédicales : de nombreux médicaments sont interdits aux femmes enceintes, non pas parce qu’on sait qu’ils ont des effets néfastes, mais parce qu’aucun de ces travaux ne prend en compte les femmes enceintes...
Dans le cadre d’EGERA, vous avez organisé le 23 février 2015 une conférence sur le « biais de genre (eng) ». De quoi s’agit-il ?
Il s’agit d’étudier les inégalités, non pas dans l’enseignement et la recherche, mais dans l’évaluation de l’enseignement et de la recherche. Est-ce qu’on prend en compte les contraintes propres aux femmes et aux hommes dans l’évaluation de leur carrière et de leur avancement ? L’enseignement supérieur est l’un des domaines où la place des femmes a le plus évolué au cours des dernières décennies. Dans les sciences humaines et sociales, notamment, elles sont désormais majoritaires. Pourtant, cela ne se reflète pas toujours sur le personnel enseignant et de recherche, qui reste encore largement masculin aux grades ou fonctions les plus élevés ! Un seul type de carrière est aujourd’hui considéré : linéaire, donc généralement sans enfant, et avec beaucoup de publications, ce qui pousse à ignorer, par exemple, l’implication de certains chercheurs dans l’encadrement de leurs étudiants qui est pourtant essentielle pour la qualité de la recherche. Cet aveuglement au genre a un impact négatif sur les carrières des femmes. Or, on ne peut pas objectiver ainsi l’excellence scientifique en la coupant complètement de la vie.
En quoi s’attacher à l’égalité femmes-hommes dans l’enseignement supérieur, peut-il contribuer à faire avancer l’égalité d’une manière générale au sein de la société ?
Dans une institution comme Sciences Po où l’on forme les futurs citoyens actifs de demain, on ne peut pas ignorer les besoins et les demandes nouvelles des entreprises et des organisations. Il est ainsi prouvé que lorsque l’égalité est absente dans les entreprises, les salariés s’y sentent moins bien et leur capacité d’innovation est moindre. Insuffler une culture de l’égalité au sein de notre formation est donc essentiel. Plus tard, nos étudiants l’appliqueront dans leur vie professionnelle.
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PRESAGE, le Programme de Recherche et d’Enseignement des SAvoirs sur le GEnre de Sciences Po