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16.06.2015

Jacques Parizeau, l’homme d’un Québec libre et moderne. Hommage.

Étudiant à Sciences Po au sortir de la guerre, Jacques Parizeau, ancien ministre des Finances et premier ministre du Québec, est décédé le 1er juin 2015 à Montréal. Économiste reconnu, haut-fonctionnaire modernisateur, expert en économie et en finances publiques, il a joué un rôle politique de premier plan comme architecte et bâtisseur du Québec moderne. Hommage.

Élève brillant, Jacques Parizeau fait ses études à HEC Montréal, puis en France à la faculté de droit de Paris et à Sciences Po. Inscrit en Année Préparatoire en 1951, il suit les grands cours emblématiques du Sciences Po d’après-guerre : ceux d’André Siegfried - le “père de la science politique française” - en “Géographie des grandes puissances et des échanges internationaux”, de Charles Morazé en “Histoire économique et sociale”, ou de Jean Meynaud en “Initiation à l’économie”.

Diplômé de la section économique en 1953, Jacques Parizeau a été formé par Jean Marchal et François Perroux en théorie économique, ainsi qu’en politique économique française par Roger Nathan et Paul Delouvrier, un des principaux artisans de la planification dans la France des Trente Glorieuses.

  • Une formation économique universitaire de haut niveau

Autres grandes figures de sa formation intellectuelle rue Saint-Guillaume, il a suivi les cours d’Alfred Sauvy, de Jean Fourastié et d’André Piatier sur l’opinion économique, le progrès technique et l’analyse économique, ou encore les enseignements de Wilfried Baumgartner et de François Bloch-Lainé en finances publiques. Souhaitant poursuivre ses travaux à une époque où Sciences Po ne propose pas encore de troisième cycle, c’est à Londres, à la London School of Economics, qu’il part achever ses études : il soutien son doctorat d’économie en 1955.

Économiste universitaire, il enseigne pendant plus de vingt ans à HEC Montréal (1955-76 puis 1985-89) dont il dirige l’Institut d’économie appliquée. Homme de conviction et pédagogue de talent, il est également directeur de la revue L'Actualité économique de 1955 à 1961, chroniqueur de l'hebdomadaire Québec-Presse de 1969 à 1974, puis président du conseil d'administration et éditorialiste du journal Le Jour en 1974 et en 1975.

  • Une conviction : moderniser le Québec, développer l'économie

De cette formation économique universitaire de haut niveau, Jacques Parizeau retient le rôle de l’État dans la modernisation de l’économie, qu’il mettra en œuvre au Québec comme haut-fonctionnaire et homme politique réformateur : tour à tour conseiller économique des Premiers ministres Jean Lesage et de Daniel Johnson, président du Comité d’études sur les institutions financières, ministre des Finances (1976-84) et Premier ministre (1994-95).

Il a ainsi supervisé la nationalisation de l’hydroélectricité (1963) et contribué à fonder la Société générale de financement (1962), la Régie des rentes du Québec (1965) et la Caisse des dépôts et de placement du Québec (1965) lors de la Révolution tranquille des années 1960. Ministre des finances, on lui doit la création du Régime d'épargne-actions qui oriente l’épargne des particuliers vers l’investissement productif (1980).

  • Engagé pour l’indépendance du Québec

Souverainiste, son engagement politique s’incarne dans la cause indépendantiste. Président du conseil exécutif du Parti québécois de 1970 à 1973, il devient chef de ce même parti en 1988. Premier ministre en 1994, il est l’artisan du référendum sur l’avenir du Québec de 1995 et mène campagne en faveur de l’indépendance. Son échec le conduit à se retirer de la vie politique, tout en conservant un poids non négligeable et une grande liberté de parole.

Salué en France pour son engagement en faveur du Québec, il est fait Membre correspondant de l’Académie des sciences morales et politiques en 1999, et Commandeur de la Légion d’honneur en 2000.

Ce parcours admirable d'acteur public engagé en faveur de la modernisation économique et d'architecte du Québec moderne fait de de Jacques Parizeau une figure emblématique et sincèrement regrettée aujourd’hui par la communauté des Sciences Po.

Légende de l'image de couverture : Mariannlï /Creative Commons