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05.07.2016

Sciences Po : université internationale depuis sa création

La mondialisation des études s'accélère. En témoigne, Sciences Po où 47 % des étudiants sont internationaux. Une procédure d’admission leur y est dédiée. Retour sur une tradition que Sciences Po a voulu instituer dès son création.

Créer des réseaux d’amitié entre élites françaises et étrangères

Dès la fondation de l'École libre des sciences politiques, Émile Boutmy attache une grande importance à l’accueil des étudiants étrangers au nom de trois motifs hautement « patriotiques » intimement liés aux balbutiements de la diplomatie culturelle française. Il faut d'abord contrer le rayonnement de l’université allemande : « Il y aurait intérêt à se préoccuper du moyen d’attirer à l’École les élèves des facultés américaines dont la plupart vont continuer leurs études économiques en Allemagne [1]. » Il s’agit ensuite d’attacher à la France les élites étrangères et « d’augmenter le crédit des idées françaises » en exposant et défendant le point de vue français sur l’empire colonial et l’Alsace-Moselle. Il importe enfin de créer des réseaux d’amitié et d’interconnaissance entre élites françaises et étrangères : l'ELSP « crée des relations entre nos futurs diplomates ou hommes d’État et plus d’un jeune homme d’élite qu’ils sont appelés à retrouver par la suite dans les chancelleries, les cours ou les parlements des autres pays [2] ». Subsidiairement, la présence d’étudiants étrangers à Paris permet de « procurer aux élèves français des sources d’information excellentes [3] ». Cette fréquentation complète la perspective comparatiste, pierre angulaire des enseignements de l’École.

Une offre de formation sur-mesure pour les internationaux

Cette paradoxale politique d'ouverture internationale au nom du rayonnement français aboutit à une politique active de recrutement et à l’élaboration d’une offre de formation spécifiquement destinée aux étrangers. Dès 1873 des cours de langue anglaise, allemande, russe ou arabe sont proposés aux étudiants ; en 1907, un certificat d’examen est attribué aux étudiants étrangers ayant échoué au diplôme ; en 1909 des « conférences spéciales pour les étrangers » sont instaurées pour les aider dans leur adaptation. Cette politique porte incontestablement ses fruits.

Une politique

« L’affluence d’étrangers va sans cesse grandissant[4]», constate-t-on en 1909. En dépit de statistiques incomplètes, il apparaît que les étrangers représentent entre 15 et 20 % des effectifs étudiants (et même 33 % durant la Grande guerre), chiffre considérable ! Attirés par la section diplomatique, ils se portent également vers la section économique et financière. Leurs origines géographiques témoignent des forces et des faiblesses du rayonnement français : si de nombreux Russes, Polonais, Roumains, Bulgares, Grecs et ressortissants de pays alliés d’Europe centrale et méridionale viennent se former en France, les Scandinaves, les Allemands, les Suisses sont attirés vers les universités allemandes.

Aujourd’hui 46% des étudiants à Sciences Po sont internationaux et une procédure d’admission leur est dédiée.

Marie Scot © tous droits réservés

[1] 1SP-31, Dr3, Conseil d’administration 19/01/1897.

[2] 1SP-16, Dr2, CR Assemblée générale, 24/02/1894.

[3] 1SP-18, Dr3, CR Assemblée générale, 25/02/1882, p. 10.

[4] 1SP-1, Dr3, CR Assemblée générale 27/02/1909, p. 10.

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Légende de l'image de couverture : Sandrine Gaudin