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18.04.2016
“Une seule ligne de dialogue modifiée peut tout changer” : la réalisatrice de Mustang en masterclass à Sciences Po
L’École d'affaires publiques de Sciences Po accueillait en masterclass ce 1er avril 2016 l’équipe du film Mustang, récemment primé aux Césars et nominé aux Oscars. La réalisatrice Deniz Gamze Ergüven, le producteur Charles Gillibert et le responsable des ventes à l’international Grégoire Melin ont évoqué le parcours du film, de sa conception jusqu'à son couronnement aux Césars.
“J'ai aimé le scénario, les actrices, les images... Tout était là !” Le producteur Charles Gillibert se souvient avoir été immédiatement séduit par le projet de Deniz Gamze Ergüven à la lecture du dossier du film. Mais aimer un scénario ne suffit pas pour que le film voie le jour ! Charles Gillibert évoque la difficulté de rechercher des financements, surtout lorsque le tournage est déjà débuté : “Le plus important était de réunir l'argent pour ne pas mettre trop de pression sur Deniz”, explique-t-il. Quelques jours à peine avant le début du tournage, il parvient à convaincre Grégoire Melin, responsable des ventes à l’international. “J'ai lu le script et je suis tombé amoureux” se souvient ce dernier, qui décide d’aider le financement du film.
Les Oscars sont “comme une campagne politique”
La collaboration entre le producteur et le responsable des ventes à l'international s’avère également indispensable pour attirer des distributeurs et des chaînes. D'où l'importance de bien préparer le film au festival de Cannes, que Charles Gillibert présente comme “l'entrée parfaite” sur le marché français et le début du parcours international du film. “Dès le premier jour, nous avions les Oscars en tête”, explique-t-il. La partie la plus délicate fut finalement de convaincre la commission de sélectionner un premier film tourné en langue étrangère, plutôt qu’un film d'un réalisateur reconnu et ayant été primé à Cannes, comme ce fut le cas pour le film Dheepan de Jacques Audiard, par exemple.
Pour Mustang, la campagne aux Oscars est réellement lancée avec le Festival de Toronto. A partir de cet instant, le processus de promotion débute : établir la stratégie de communication et trouver les bons partenaires en Amérique du Nord pour influencer les leaders d'opinion. “C'est comme une campagne politique”, souligne le producteur. Grégoire Melin insiste quant à lui sur le rôle du distributeur dans la course aux Oscars : “Le destin du film repose dans les mains du distributeur américain, on doit lui faire confiance.”
Le distributeur en Turquie “a eu peur du film”
Dans la salle, sont posées de nombreuses questions sur le processus de création de l'oeuvre. La réalisatrice décrit la complexité de son scénario qui pouvait difficilement être touché sans altérer le sens de l'oeuvre : “Une seule ligne de dialogue modifiée peut tout changer”, explique-t-elle. Toutefois, la partie la plus difficile fut pour elle le montage. “Je suis trop indulgente avec mes acteurs ; je les aime trop !”, explique en souriant la réalisatrice. Même si les décisions au montage se sont faites collectivement, elle s'est réservé le droit de conserver certaines scènes contre l’avis général.
Enfin, la discussion se clôt sur la réception du film en Turquie, qui fut mitigée. “C'était extrêmement polarisé, les critiques l'adoraient ou le détestaient, il n'y avait pas de juste milieu”, souligne Deniz Gamze Ergüven qui ne cache pas qu’elle a été déçue par le travail du distributeur turc. Selon Grégoire Melin, celui-ci aurait “eu peur du film.”
par Faustine Deffobis, étudiante à l'École d'affaires publiques.
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