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28.04.2016

Faire de la recherche dès le 1er cycle : un "plus" pour les étudiants

Diplômée de Sciences Po et de Princeton University, Marina Henke est aujourd’hui Assistant Professor à Northwestern University. Elle a choisi de s’installer à Sciences Po pendant quelques mois début 2016, le temps de finir son livre intitulé Allies for Sale et l’occasion de mettre en place un programme de research assistants ouvert aux étudiants de Sciences Po qui partiront en troisième année à Northwestern en 2017. Interview.

Pouvez-vous nous parler du programme de research assistants que Sciences Po et Northwestern proposeront prochainement aux étudiants de troisième année?

Marina Henke : Grâce à ce programme, les étudiants de Sciences Po qui partiront à Northwestern University lors de leur troisième année de Bachelor auront la possibilité de travailler comme research assistant à Northwestern. Ils suivront des cours pendant deux quarters, c’est-à-dire pendant six mois, et travailleront comme research assistant pendant un quarter, c’est-à-dire environ trois mois. Le processus de sélection pour ce programme sera ouvert à la rentrée 2016.

Sur quel sujet de recherche les research assistants travailleront-ils?

M. H. : Ils travailleront notamment sur le sujet des interventions militaires et plus particulièrement sur les questions suivantes : pourquoi avons-nous recours à des interventions militaires? Quels sont les acteurs politiques qui poussent ces interventions militaires, et quels sont ceux qui s’y opposent ? Comment construit-on des coalitions? Quelles sont les motivations des pays qui décident de participer?

Les research assistants travailleront aussi sur les répercussions de ces interventions pour les pays cibles. Quels sont les impacts économiques, politiques et sociaux pour ces pays ? Très concrètement, les étudiants mèneront la collecte et l’analyse des données, ils auront à faire émerger les grandes tendances sur ce sujet, et mener des études statistiques.

S’investir dans la recherche dès le début des études universitaires, c’est une pratique académique très répandue aux USA par exemple, moins en Europe. En quoi faire de la recherche dès le Bachelor est un plus pour les étudiants?

M. H. : C’est une grande chance de pouvoir faire de la recherche pendant les études de Bachelor, de pouvoir s’impliquer, participer à la création de savoirs. Pourquoi devrait-on attendre de faire un Master de recherche pour développer un projet de recherche, apprendre à collecter des données et à les analyser? Même pour les étudiants qui ne se destinent pas à la recherche, une expérience de recherche au niveau Bachelor est extrêmement utile.

Pour mettre en place des politiques publiques pertinentes par exemple, il faut comprendre les résultats de la recherche en sciences sociales. Le choix des méthodes de recherche en sciences politiques est crucial, et il faut connaître ces méthodes pour comprendre les résultats de la recherche. Ceci ne peut s’apprendre réellement qu’en participant à des projets de recherche.

À quel moment de votre parcours avez-vous décidé de faire de la recherche?

M. H. : Avant d’intégrer mon Master à Sciences Po, j’ai fait un stage auprès d’une députée européenne allemande et je dois dire qu’au début j’étais absolument fan d’elle ! Elle était très jeune, très sollicitée et elle était l’objet de beaucoup d’attention, entre autres de la part des médias. Mais assez vite, j’ai réalisé qu’elle n’avait pas vraiment d’opinions propres, qu’elle avait du mal à faire émerger ses points de vue. C’est à ce moment-là que je me suis dit qu’il ne fallait pas entrer en politique trop tôt et que j’ai décidé de faire un doctorat. Projet que j’ai réalisé par la suite à Princeton.

Vous vous êtes installée à Sciences Po pendant trois mois pour terminer un livre que vous publierez prochainement. Quel sera le sujet de ce livre?

M. H. : Mon livre s’intitule Allies for Sale. Il étudie les coalitions militaires depuis la guerre en Corée en 1950. On pense souvent que les pays qui participent aux coalitions partagent les mêmes intérêts, lesquels les poussent à s’unir face à la menace.

En réalité, à partir de la guerre de Corée, on a vu se développer un mécanisme de paiement, de reimbursements. En effet, il existe un vrai ‘marché’ pour des contributions militaires. Souvent  le poids des reimbursements pèse tres fortement dans la prise de décision des pays qui participent aux coalitions militaires. La Pologne par exemple a gagné deux milliards de dollars pour envoyer environ 2000 soldats en Irak entre 2003 et 2006 !

La première partie de mon livre décrit ces échanges d’argent, mais aussi les échanges davantage de nature politique. Je m’attache à la manière dont ce "marché" fonctionne dans la deuxième partie du livre. Je me penche entre autres sur les raisons qui expliquent comment les pays comme les États-Unis et la France choisissent ces "alliés" et comment le type de paiement est déterminé. La dernière partie s’intéresse aux conséquences de ce type de recrutement des forces militaires. Si l’on regarde la situation depuis 1950, il y a très peu de cas d’intervention militaires vraiment réussies. Créer la paix est toujours très compliqué, et mon livre suggère qu’il est encore plus difficile d’atteindre cet objectif si les pays engagés dans les interventions n’ont pas de réelle motivation pour aboutir à cette paix.

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