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08.07.2021

Violences sexistes et sexuelles : le regard de la recherche

Comment se caractérisent les violences sexistes et sexuelles ? Comment les mesure-t-on ? Que font les organisations, que fait la justice, que fait l’Etat pour lutter contre ? Au travers de six longs entretiens menés en 2021, des chercheuses reviennent sur leurs travaux et éclairent ces questions.

Les violences sexistes et sexuelles au prisme du droit

Le mouvement #MeToo a rendu visible l’étendue et la fréquence des pratiques de harcèlement sexuel et de violences sexuelles et sexistes dans des cadres très diversifiés — emploi, éducation, famille, accès au logement, santé… — et a permis de modifier la loi pénale et même civile. En droit du travail, il a permis de montrer, grâce aux nouvelles lois, que le harcèlement sexuel pouvait poser une question de risque professionnel qui pouvait faire l’objet d’une prévention objectivable comme tout autre risque pour la santé et la sécurité des travailleurs et pas simplement réduite à une question délicate liée à un acte de la vie privée déterminé par le consentement de deux personnes majeures.”

Marie Mercat-Bruns, professeure affiliée à l'École de droit de Sciences Po. Lire l'interview

Faire histoire de la violence sexuelle

La violence sexuelle est une forme d'agression très spécifique qui établit un lien entre violence et sexualité. Cela commence également par des mots et des gestes qui sexualisent des personnes ou des parties du corps. Cela peut s'étendre à une contrainte au déshabillage et à des attouchements non désirés, à la prostitution forcée, voire à la torture sexuelle et au viol. [...] La violence sexuelle a un caractère à la fois extrêmement subjectif et fondamentalement social : elle est façonnée par les normes culturelles relatives à la sexualité et à l’agression.”

Elissa Mailänder, Associate Professor au Centre d'histoire de Sciences Po. Lire l'interview.

Violences sexuelles : que fait la justice ?

“Les violences sexuelles, fortement réprouvées, sont pourtant faiblement dénoncées et condamnées. Selon les sources, le taux de plainte varie entre 8% et 15%, ce qui signifie que la grande majorité de ces violences ne sont pas portées à la connaissance de la justice – il faudra voir comment cette tendance évoluera dans le sillage des mouvements de dénonciations qui s’expriment depuis l’automne 2017. Et parmi ce petit volume d’affaires judiciarisées, seules 10% à 15% sont jugées aux assises. Il y a donc deux phénomènes à expliquer : la faible dénonciation et la faible condamnation.”

Véronique Le Goaziou,  chercheuse associée au Laboratoire méditerranéen de sociologie, autrice aux Presses de Sciences Po. Lire l'interview.

Violences basées sur le genre : recenser pour comprendre

“Il y a assurément un avant et un après l’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (Enveff). Depuis lors, l’indicateur de violences conjugales, à savoir une femme sur dix victime de telles violences, est rappelé par les politiques dans les propositions de loi et plans d’action qui se sont succédés. Cet indicateur a été construit en tenant compte du continuum des violences, il intègre ainsi les violences psychologiques, économiques, sexuelles et physiques. L’enquête Enveff a permis non seulement de montrer l’ampleur du phénomène, mais également de mieux cerner le contexte de ces violences qui touchent les femmes quelle que soit leur catégorie sociale.”

Sandrine Dauphin, directrice de projet à l’Institut national d'études démographiques (Ined) et enseignante à Sciences Po. Lire l'interview.

Vers un féminisme néolibéral d’État ?

“La question des violences tend à être cloisonnée et séparée d’autres enjeux sociaux. [...] Tout se passe comme si la possibilité de dénoncer et les solutions proposées pour sortir de contextes de violences ou de harcèlement, dans la sphère professionnelle ou privée, étaient complètement déconnectées des conditions de vie, de travail et d’emploi.”

Pauline Delage, chargée de recherche au CNRS, autrice aux Presses de Sciences Po. Lire l'interview.

 Poser la question du consentement

“L’idée selon laquelle la sexualité doit être consentie fait désormais l’unanimité et pourtant le consentement n’a jamais suscité autant de débats qu’aujourd’hui ! En témoigne la récurrence des affaires médiatiques qui le remettent très régulièrement sur le devant de la scène. Celles-ci se caractérisent toujours par la même trame narrative et par la coexistence de deux lectures concurrentes d’une même situation sexuelle : l’homme proclame que sa partenaire est consentante, quand la femme affirme au contraire qu’il s’agit d’un viol. L’enjeu des débats consiste alors à statuer sur la nature de l’interaction.”

Rébecca Lévy-Guillain, doctorante à l’Institut national d'études démographiques (Ined) et à l’Observatoire sociologique du changement (OSC) de Sciences Po. Lire l'interview.

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