Que sait-on du travail ? 6 étudiants du Collège universitaire lancent le débat

Mardi 13 février, le campus de Dijon du Collège universitaire de Sciences Po accueillait, au sein de l’hôtel de la région Bourgogne, une conférence autour de l’ouvrage Que sait-on du travail ? publié aux Presses de Sciences Po en 2023.

À l’occasion de cette rencontre organisée avec la région Bourgogne-Franche-Comté, six chercheuses et chercheurs sont intervenus pour un débat autour du travail, et notamment autour des enjeux des métiers dits “du vieillissement” et de l’environnement. Deux étudiants de bachelor, Anaïs Gougeon et Antoine Gradaive, nous racontent.

Une participation active des étudiants de première année

La préparation et la participation à la conférence “Que sait-on du travail ?” a commencé lors d’un cours magistral de sociologie dispensé par Olivier Godechot, durant lequel Bruno Palier a pris la parole pour proposer aux étudiants de première année de participer à l’organisation d’une conférence sur ce nouvel ouvrage dont il a assuré la coordination.

Pendant près de deux mois, un groupe de six étudiants s'est plongé dans cet ouvrage, pour explorer les problématiques liées au travail dont il traite. De la digitalisation de l’économie aux métiers du développement durable, en passant par les enjeux de bien-être et de sens du travail, ils ont pu parcourir les travaux des nombreux chercheurs ayant contribué à cet ouvrage. Les étudiants ont bénéficié d'une grande liberté d’intervention sur les sujets qu'il leur tenait à cœur d'aborder pendant la conférence. Six grandes questions ont ainsi été préparées et posées par le groupe aux chercheurs et à la présidente de région, Marie-Guite Dufay.

Antoine Gradaive : Pour ma part, j’étais très enthousiaste à l’idée de cette initiative. Je me suis appuyé sur le chapitre “les métiers du vieillissement, essentiels et pourtant insoutenables” écrit par François Xavier Devetter, Annie Dussuet, Laura Nirello et Emmanuelle Puissant. La thématique que j’ai choisie d’explorer était le vieillissement et notamment les métiers du soin et liés au grand-âge. J’ai été surpris par la grande précarité liée à ces métiers : plus de 95 % de femmes , et rarement de projet de carrière derrière ce choix. Malgré le taux élevé de temps partiel, ce sont des professions qui ont une emprise à temps complet sur la vie et les corps des femmes. Face au vieillissement de la société, la dépendance va devenir grandissante et une prise en charge va se révéler indispensable. Comment valoriser ces métiers et assurer une fin de vie digne pour nos aînés ? La présidente de la région a exprimé son admiration pour un jeune qui s’intéresse aux ”vieux”, illustrant par la même occasion son intérêt pour la question du grand âge.  

Anaïs Gougeon : De mon côté, j’ai trouvé cette expérience très enrichissante, tant du point de vue des recherches et de la lecture de l’ouvrage que du travail de préparation des questions posées lors de la conférence. En effet, cela m’a permis de découvrir le travail des chercheurs et chercheuses sur les enjeux contemporains entourant le travail. J’ai choisi de poser une question concernant les enjeux climatiques et environnementaux, et notamment sur les conditions de travail des agricultrices et des agriculteurs en Bourgogne-Franche-Comté. Ma volonté était d’interpeller la présidente de région sur un sujet d’actualité, qui touche autant la population travaillant dans l’agriculture que les consommateurs. Ainsi, mon argumentation portait sur l’efficacité du soutien de la région aux agriculteurs et agricultrices, en particulier face aux contraintes environnementales.

Une pluralité d'invités pour évoquer des thématiques essentielles

Lors de cette conférence, six chercheuses et chercheurs ayant travaillé sur cet ouvrage étaient présents sur le campus de Dijon : 

• Bruno Palier, docteur en sciences politiques, agrégé de sciences sociales et coordinateur de l’ouvrage, a rédigé l’introduction de Que sait-on du travail ? ainsi que le chapitre “Comment les stratégies du low cost à la française ont intensifié et abîmé le travail”. Il est directeur de recherche du CNRS à Sciences Po au Centre d'études européennes de politique comparée (CEE). 
• Olivier Godechot, professeur de sociologie, travaille sur la ségrégation au travail, le séparatisme des élites et plus généralement sur la dynamique inégalitaire du marché du travail. Il a participé à la rédaction du chapitre “Management et organisation du travail en France”, avec une partie portant sur la ségrégation croissante des lieux de travail.

• Les chercheuses Nathalie Moncel et Liza Baghioni, ont toutes deux participé au chapitre “Conditions de travail : état des lieux et perspectives” et coécrit un texte sur le travail au temps de la “transition écologique”. Nathalie Moncel est une économiste du travail et ses recherches portent sur les transformations des systèmes de formation et d’emploi, les mutations du travail et les trajectoires d’insertion des jeunes. Liza Baghioni est sociologue et anthropologue du travail. Ses recherches sont centrées autour de la précarité de l’emploi, la pluriactivité, l’accompagnement des actifs, la transition écologique ainsi que sur les transformations du travail.
• Le chercheur François-Xavier Devetter est économiste à l’Université de Lille et à l'IRES. Il a apporté plusieurs contributions au chapitre “Au cœur des métiers essentiels”, par un texte sur les métiers du vieillissement et un autre sur les assistantes maternelles.
• Enfin, Annie Dussuet est enseignante-chercheuse émérite à Nantes Université au Centre Nantais de Sociologie. Ses recherches sont centrées sur le travail domestique et les emplois féminisés des services. Elle a coécrit avec François-Xavier Devetter le texte sur les métiers du vieillissement, essentiels et pourtant insoutenables, dans le chapitre “Au cœur des métiers essentiels”.

Un partenariat entre le campus de Dijon et la région Bourgogne-Franche-Comté

La conférence avait lieu dans la salle du conseil de la région Bourgogne-Franche-Comté, un site emblématique de Dijon et de sa région. Sur les bancs habituels des élus régionaux, se trouvaient des étudiants de Sciences Po, des syndicalistes, des élus, les vice-présidentes de la région ainsi que quelques curieux… tous venus tendre l’oreille et poser leurs questions aux chercheurs.

Par ailleurs, cet événement symbolise le partenariat de Sciences Po avec la région afin de rendre le travail des chercheurs accessible et de le placer au cœur du débat public et politique. Plus généralement, la conférence “Que sait-on du travail ?” était l’occasion d’amener des problématiques d’actualité aux portes de la région Bourgogne-Franche-Comté.