La déportation des Musulmans de Georgie
Le contexte
Les causes de cette déportation massive sont variées et font toujours débat. Une chose est sûre : ces déportés ne sont jamais accusés de collaboration avec l’ennemi allemand. Parmi les explications avancées pour comprendre la déportation, deux faits s’imposent d’eux-mêmes. D’une part, cette population vit dans une région montagneuse frontalière de la Turquie, alliée non déclarée de l’Allemagne nazie. D’autre part, ceux qui sont déportés en tant que « Turcs, Khemchiles (Arméniens musulmans) et Kurdes » sont tous de culture musulmane sunnite et sont largement turcophones.
Seuls les « Turcs », qui forment l'écrasante majorité des déportés de Géorgie (90 %), ont un ethnonyme problématique. Ce terme imposé à l’occasion de la déportation recouvre une réalité disparate, source de débats identitaires jusqu’à nos jours (Tournon, 2006) : sont-ils Turcs ou Géorgiens ? Ces déportés désignés sous l'appellation « Turcs » puis « Turcs soviétiques » ont toujours possédé une identité ethnique problématique. Les recensements tsaristes les désignaient sous différentes dénominations : Géorgiens sunnites, Ottomans, Azerbaïdjanais. Plus tard, le simple fait qu’ils soient musulmans suffit aux autorités soviétiques à faire d'eux des alliés potentiels des Turcs, et ce d’autant plus que la frontière entre la Géorgie soviétique et la Turquie est connue pour sa porosité.
Toutefois, les intellectuels et les autorités géorgiennes les considèrent comme des Géorgiens islamisés par trois siècles de joug ottoman. C'est pourquoi, dans l'optique d'un nettoyage des frontières turco-soviétiques, le gouvernement de la République soviétique de Géorgie propose comme alternative à toute déportation le déplacement de cette population dite à risque vers l’intérieur du pays. Ce plan prévoit en outre une politique de re-géorgianisation de ces Musulmans qui ne se conçoivent pas tous Géorgiens (Mamuliâ, 1999). Mais Staline et Beria privilégient la solution de la relégation aux confins de l’URSS, avec l’assignation définitive d’une identité turque déduite de leur langue et de leur culture religieuse.
L’identité ethnique et religieuse de cette population n’explique pas tout, la situation de la Meskhétie motive aussi en partie la déportation. Les dirigeants soviétiques savent que des troupes turques sont dépêchées à la frontière avec l’URSS. Même si cette présence est plus défensive qu’offensive, Staline préfère sécuriser la frontière. De plus, il a pour projet caché l’annexion du nord de la Turquie et de ses détroits. A cette fin, le nettoyage des frontières de tout élément douteux est indispensable. Les Musulmans de Meskhétie, qui, jusqu’en 1921, ont combattu auprès des Turcs contre les chrétiens, sont dès lors condamnés comme traîtres potentiels. Seuls les Adjares musulmans, clairement identifiés comme Géorgiens et jouissant d'une république autonome, sont épargnés.
Le 31 juillet 1944, Staline signe l’ordre de déportation. Du 15 au 18 novembre, les habitants de 212 villages des régions de Adiguéni, Akhaltsikhé, Aspindza, Akhalkalaki et Ninotsminda sont raflés. Du 25 au 26 novembre, quelques centaines de « Turcs » sont déportés de l’Adjarie voisine. Officiellement, les déportés sont au nombre de 91 000, mais des chercheurs hésitent encore sur le nombre réel de victimes. Selon les sources, la fourchette oscille entre 90 000 et 116 000 déportés. Au total, la moitié d’entre eux est constituée de mineurs de moins de 16 ans, de 27 000 femmes et d'environ 19 000 hommes âgés ou handicapés. En 1944, au moment de la déportation, près de 40 000 Géorgiens musulmans combattent au front. Seuls 20 000 survivront et devront rejoindre les exilés en Asie centrale (Bugaj, 1998).
Une bande de sécurité de 7 à 80 kilomètres instaurée en Meskhétie est ponctuée de postes militaires filtrant les entrées et sorties pour « sécuriser » la frontière avec la Turquie. La région est ainsi placée sous étroit contrôle. La plupart des villages vidés sont réinvestis par des Géorgiens déplacés de force d’Imérétie. D’autres villages sont purement rasés et certains transformés en champs. Les cimetières et autres lieux de mémoire ont dans l’ensemble disparu, seule une poignée de sites religieux ont été épargnés.
Environ 11 000 musulmans de Meskhétie sont exilés en Kirghizie, 30 000 au Kazakhstan et 54 000 en Ouzbékistan. Les conditions d’accueil sont disparates, la majorité des exilés vivent dans des baraquements délabrés qui ne les protègent pas de l’hiver rigoureux. Rares sont ceux qui habitent sous un toit décent, nombre d’entre eux sont sans abri. Comme la plupart des déportés avant eux, ils deviennent des « colons spéciaux », citoyens de seconde zone, interdits de tout déplacement au-delà de cinq kilomètres de leur lieu d’assignation, ce qui les oblige à se présenter toutes les deux semaines à la komandature pour se signaler au NKVD. L’écrasante majorité, y compris les mineurs, travaille dans des kolkhozes, 6 000 sont dans des sovkhozes et 1 300 dans des usines, tous perçoivent des salaires de misère dans des conditions difficiles (Afanasiev ; Werth, 2004).
Pendant longtemps, les Musulmans de Meskhétie espèrent que Staline, tenu pour innocent et ignorant de leur cas, leur rendra justice. Après sa mort en 1953, une série de lois permet de libérer certaines catégories de populations : les mineurs, les conjoints de citoyens libres, les invalides et les héros de la guerre. En 1956, Nikita Khrouchtchev libère partiellement les peuples punis les uns après les autres. Le 28 avril, Les Turcs, Khemchiles et Kurdes redeviennent des citoyens soviétiques mais ne peuvent ni réclamer réparation ni retourner dans leurs lieux d’origine. En 1957, N. Khrouchtchev consent à rétablir dans leurs droits et dans leur « patrie » certains peuples : les Tchétchènes, les Ingouches, les Balkars… Les Tatars de Crimée, les Allemands de la Volga et les Musulmans de Meskhétie ne bénéficient pas de telles décisions, leur exil est maintenu arbitrairement.
Cependant, le 31 octobre 1957, un décret ambigu rend espoir aux déportés. Ils obtiennent le droit de se rendre dans la république caucasienne d’Azerbaïdjan et d'en devenir les citoyens. Jusqu’à 40 000 d’entre eux font le choix de l’intégration dans ce pays proche culturellement de leur identité musulmane et géographiquement de leur patrie géorgienne. Mais cette demie solution aboutit à la scission définitive entre deux mouvements identitaires existant parmi les exilés. Le premier, majoritaire, considère les déportés comme ethniquement Turcs et accepte l’intégration en Azerbaïdjan. Le second, minoritaire, les voit comme des « Meskhètes » géorgiens et n’envisage que le retour en Géorgie. Or la Géorgie se refuse à toute négociation sur le thème sensible du rapatriement (Ǘnusov, 2000; Umarov-Gozaliŝvili X.,1994).
Les responsables
Les causes lointaines de la déportation des Musulmans de Meskhétie datent de la fin du XIXe siècle, moment où l'empire tsariste, auquel la Géorgie est annexée, reprend la Meskhétie aux Ottomans. Les deux empires belligérants s’accordent sur des échanges de populations. Une grande partie des Musulmans de Géorgie est ainsi chassée vers la Sublime Porte. Ceux qui restent demeurent indésirables aux yeux des autorités russes puis bolcheviques. Ces dernières, lors des Grandes Purges des années trente, éliminent définitivement l’élite intellectuelle meskhète. En 1941, le Commandement militaire de la Transcaucasie prévoit de déporter ces Musulmans potentiellement déloyaux du fait de leur passé turcophile. La Deuxième guerre mondiale donne l'occasion de concrétiser ce plan hérité d'une longue tradition politique impériale de gestion des populations.
Dans les faits, les documents ordonnant la déportation reflètent en tous points ceux des déportations précédentes. Signés par L. Beria et par Staline, ces documents classés secrets visent à « l'amélioration de la situation aux frontières de la RSS de Géorgie » (Bugaj, Gonov, 1998:213). Les instigateurs de cette déportation ont en outre pour point commun leur origine géorgienne. Staline et Beria connaissent l'histoire des alliances stratégiques entre Turcs et musulmans de Géorgie et craignent une répétition des soulèvements musulmans de 1918 dans la région. Deux niveaux de lecture s'entremêlent alors. A l'échelon local, l'hostilité des autorités géorgiennes envers les Musulmans de Meskhétie se base sur la mémoire des conflits locaux récents. A l'échelon supérieur, Rapava, Commissaire Populaire à la Défense et Karanadze, aux Affaires Intérieures de Géorgie, transmettent au Kremlin un dossier relatif aux nombres de « Turcs » vivant à la frontière (Bugaj, Gonov, 1998:214 ; Polân, 2001). Ce dossier sert de base à L. Beria et Staline qui cherchent à éliminer toute « cinquième colonne » pouvant nuire à leurs desseins. Au final, la population musulmane de Meskhétie est collectivement soupçonnée d'espionnage à la solde des Turcs.
Dans la hiérarchie des décisions menant à la déportation, le bras armé du Kremlin est le NKVD, ou police politique, chargée d'opérer sur le terrain. Durant les cinq jours de la déportation, entre 4 000 (Polân, 2001) et 14 000 (Bugaj, Gonov, 1998) hommes des troupes spéciales du NKVD sont mobilisés, une trentaine de convois et 900 camions militaires américains, reçus en prêt-bail pour renforcer le front de l'Est contre les Allemands, sont utilisés (Afanasiev, Werth, 2004). Ces troupes spéciales ont été placées autour et dans les villages meskhètes un mois avant l'opération de rafle, pour évaluer directement le nombre de personnes à déporter. Elles interviennent en pleine nuit et donnent trois heures aux civils pour se préparer à partir, sans autre explication. Ces derniers sont rapidement rassemblés dans les gares et entassés dans les wagons, croyant souvent à un déplacement destiné à les sauver de manoeuvres militaires turques à la frontière (Bugaj, 1991). En mars 1949, les Musulmans de Meskhétie issus des rangs du NKVD et des différents organes du Parti sont à leur tour déportés, taxés de traîtres à la patrie et relégués aux confins de l'URSS. Le NKVD, qui contrôle tout le processus de déportation et supervise leur exil, déshumanise les déportés qui ne sont à ses yeux que des chiffres, minimise les aspects négatifs de leur situation et manipule les chiffres officiels pour cacher son incompétence et son irresponsabilité.
Dans les lieux d'exil en Asie centrale, l'accueil est inexistant. Les autorités locales, dépassées par le nombre toujours croissant de déportés, sont dans l'incapacité de remplir leur mission imposée par le NKVD. Les conséquences économiques et sociales de la guerre, déjà dramatiques pour les civils, touchent de plein fouet les déportés totalement démunis. Les républiques, incapables de subvenir aux besoins fondamentaux de leur propre population, délaissent les exilés qui succombent au froid, à la faim et aux épidémies de typhus. De plus, les autorités lancent des rumeurs extravagantes sur les déportés : cannibalisme, criminalité, ce qui les isole encore plus des populations locales. Stigmatisés, discriminés, ils se referment sur eux-mêmes.
En Géorgie, les autorités locales suppriment toute trace de la déportation. Elles font brûler tous les documents d'Etat civil et réduisent en cendres les villages non réappropriés par les déplacés géorgiens. Toutefois, fait curieux, si parler des déportés est officiellement interdit, la Grande Encyclopédie Soviétique mentionne toujours les Meskhètes en 1954. Pour autant, l'oubli et le silence sont imposés, le sujet est tabou. Si l'histoire officielle de la Géorgie retient que la population meskhète fut le « berceau » de la nation géorgienne, elle demeure néanmoins silencieuse sur son sort actuel.
S'il est difficile d'établir le degré de complicité, de suivisme ou de complaisance des autorités géorgiennes soumises au diktat de Moscou dans la prise de décision de la déportation, en revanche la responsabilité des plus hautes instances soviétiques, en l'occurrence Staline et Beria, est indubitable. Les conséquences de cette politique de déportation sont multiples. Le déracinement des « Turcs », Khemchiles et Kurdes de Meskhétie permet leur soumission par la peur et leur exploitation économique dans des terres peu ou pas exploitées. Leur relégation est aussi une tentative de désethnicisation par assimilation forcée en Asie centrale. Les déportés doivent devenir des « Turcs soviétiques » en se diluant parmi les Musulmans de l'Orient soviétique.
Les victimes
Il est pratiquement impossible d'établir avec exactitude le nombre de victimes déportées, tant les archives divergent. Les premiers rapports font état de 91 000 déportés, certains analystes avancent un maximum de 120 000. L'identité des déportés est tout aussi complexe : outre une minorité de tsiganes (deux wagons leur sont « réservés »), il est question d'environ 75 000 « Turcs », ce terme englobant des Géorgiens musulmans aussi appelés Meskhètes, des Turcs, des Tarakamas, des Azéris, 9 000 Kurdes et 1 300 Arméniens sunnites (Khemchiles) et quelques tsiganes déportés dans deux wagons.
Lors de la déportation, les hommes du NKVD répétaient cette seule phrase: « On vous déporte. Rassemblez-vous. Vous avez deux (trois) heures. » (Bugaj, Gonov, 1998:215). Certains se font rassurants en faisant croire à un déplacement temporaire, d'autres pillent les maisons sous les yeux mêmes des propriétaires. Les conjoints musulmans de non-Musulmans sont épargnés, mais dans les faits, les familles restent globalement soudées et choisissent l’exil. Toutefois, ceux qui restent sont soumis à des contrôles humiliants et à d'insupportables pressions psychologiques (L. Baratachvili, 1988, n°9:106).
Après la guerre, les déportations se poursuivent : une résolution du Conseil des Ministres de l'URSS du 29 mai 1949 ordonne la déportation du Sud Caucase de tous les Turcs, Grecs et Dachnaks (révolutionnaires) arméniens, sans préciser leur nombre (Bugaj, Gonov, 1998:222). Les frontières turco-soviétiques sont ainsi littéralement nettoyées de tout « élément suspect », en premier lieu des Musulmans.
Entassés dans les wagons de fret, les déportés sont maintenus dans l'ignorance de leur sort. Lors du trajet – près d'un mois -, l'absence d'hygiène, d'eau et d'alimentation les affaiblit et les décime. Ceux qui meurent de faim, de froid ou de maladies sont jetés hors des wagons, parfois enterrés à la hâte dans les congères. Les estimations font état de 15 000 à 18 000 morts lors du transfert. La situation s’avère tout aussi dramatique une fois arrivés en Asie centrale. Lors des premières années d'exil, jusqu'à 30 % des déportés périssent. Le taux de mortalité dépasse de loin le taux de natalité, tendance qui ne s'inverse que vers 1949 (Zemskov, 2003:203).
L'hiver rigoureux, les nombreuses épidémies de typhus et la faim sont les principales causes de mortalité. Il n'existe aucune statistique officielle permettant d'évaluer l'impact réel de la déportation et de ses conditions sur l'évolution démographique des « Turcs » et autres déportés de Géorgie. Des recoupements opérés avec les autres peuples déportés permettent toutefois d'avancer qu'entre 10 % et un tiers des déportés ont succombé aux conditions imposées par le trajet et l'exil forcé.
Les déportés sont assignés à des emplois pour lesquels ils n’ont bien souvent aucune compétence. Pour survivre, enfants, femmes et personnes âgées doivent travailler. Tous sont alors des « colons spéciaux », main-d'oeuvre malléable et sous-payée soumise à des contrôles stricts. Il n'est pas rare que les membres d'une même famille soient exilés dans des villages différents, voire des républiques distinctes. Toutefois, des communautés de Meskhètes, de Kurdes et de Khemchiles se forment progressivement, soudés par le traumatisme de la déportation et l'incompréhension de leur stigmatisation. L'endogamie semble généralisée, certes par tradition mais aussi elle est due à leur situation d'isolés, de stigmatisés, de « peuples punis ».
Dès 1956, après la politique de déstalinisation entamée sous N. Khrouchtchev, des leaders meskhètes (aussi appelés Turcs Meskhètes) fondent un mouvement de lutte pour le retour en Géorgie, le VOKO (Comité organisationnel temporaire pour la libération) probablement sur le modèle des Tatars de Crimée, leurs compagnons d'infortune. Mais ce mouvement n'obtient aucune réponse à ses nombreuses pétitions et lettres ouvertes. Sa faiblesse structurelle et ses divisions internes l'empêchent d'être un véritable foyer d'agitation dans une URSS hégémonique, sourde à toutes revendications identitaires aussi légitimes soient-elles.
Les témoins
Il semble évident que des témoins ont observé et même vécu les déportations, ne serait-ce que les conjoints de déportés qui n'ont pas été raflés. Cependant, il existe à notre connaissance très peu de témoignages écrits permettant d'entrer dans les détails des rafles effectuées ces cinq jours de novembre 1944.
L'un des témoignages les plus précieux est celui que Nazira Vatchnadze nous livre dans ses mémoires (2004). Précieux car riche de détails inédits mais aussi précis dans ses observations. Nazira a 18 ans lors de la déportation. Son récit est le seul qui mentionne la présence des soldats du NKVD dans les villages musulmans bien avant la déportation, étayant la thèse d'une organisation préparée longtemps à l'avance. Elle raconte notamment l'emprisonnement préventif et systématique des hommes revenus du front, seuls capables d'inspirer un semblant de résistance au moment des rafles. Elle est aussi la seule qui rapporte le témoignage d'amis présents lors des incendies volontaires des archives de l’Etat Civil en Meskhétie, actes qui permettent la disparition de toute trace officielle concernant les déportés, leur identité et leur origine ethnique. Sa description de la déportation confirme le haut degré de préparation de ces opérations, d’où leur efficacité, leur rapidité et leur parfaite organisation.
Le témoignage de Latifchakh Baratachvili est tout aussi éclairant (1988). Il décrit soigneusement les conditions de vie dans les wagons, et fait part de sa totale incompréhension face aux événements alors même qu'il est membre du Parti et fervent patriote. Le recueil de témoignages de déportés de S. Alieva (1993), les articles de K. Baratachvili parus dans le bi-hebdomadaire l'Accent Caucasien (2000-2006) et l'ouvrage de Marine Beridze (2005) sont les trois principales sources rapportant les récits de vie de quelques déportés ou enfants de déportés. Tous ont en commun leur parution tardive, concomitante de l'effondrement de l'URSS.
Pratiquement aucun témoin tiers (bystander) ne s'est exprimé sur ce sujet. Le témoignage de Gola Khvedidze (Meditsinis muchaki, 27/06/1990) est une exception. Réquisitionné comme médecin dans un des trains lors de la déportation, il rapporte quelques paroles échangées avec des Meskhètes, paroles qui forgent son opinion quant à leur origine ethnique géorgienne, ce qui va à l'encontre de la propagande soviétique les présentant comme des espions turcs.
Deux interprétations permettent de comprendre cette indigence de témoignages. D'une part, il est formellement interdit de faire l'histoire de la déportation. Les témoins directs et tiers sont soumis à toutes sortes de contrôles. Ils craignent la délation incitée par les autorités et sont contraints d'accepter le tabou imposé à leur mémoire. D'autre part, il se peut, comme l'avance K. Tomlinson (2002), que le silence des Meskhètes et leur apparente apathie mémorielle soit le fait d'une stratégie de survie psychologique. Le refoulement des événements traumatisants leur assurerait un équilibre de vie centré sur leur présent et non accaparé par un passé problématique. Toutefois, cette théorie est contestable. En effet, l’hémorragie mémorielle dont font preuve les Meskhètes lorsqu’ils sont interrogés sur leur expérience, et leur besoin de s'exprimer sont évidents. Le contexte même de la prise de parole est alors à prendre en considération. K. Tomlinson reconnaît que ses interlocuteurs étaient constamment sur le qui-vive, craignant trop parler, comme si, dans le Caucase russe, la délation persistait des années après la disparition de l'URSS. On peut aussi tenter une troisième explication à ce silence : les témoins avides de raconter ne rencontrent pas d’oreilles désireuses ou capables d’écouter. Cela signifie qu’aujourd’hui encore, les Géorgiens ne sont pas prêts à entendre une histoire et une mémoire qui ne correspondent ni à leur histoire officielle ni à leur mémoire collective.
Les mémoires
La mémoire collective géorgienne s'est construite sur des trous et des pages blanches qui sont progressivement devenus des dénis. Le non-événement que constituait la déportation des Meskhètes en URSS est alors devenu un oubli volontaire, un « angle mort » de l'histoire officielle de la Géorgie actuelle, totalement absent des manuels scolaires et universitaires. Alors que, dans un premier temps, les témoins sont contraints au silence par le pouvoir en place, une fois libérés de leur mutité forcée après 1989, ils se heurtent à la surdité volontaire des Géorgiens.
Le difficile travail de mémoire s'explique aussi par l'impossibilité de commémorer les dates clés de l'histoire contemporaine des Meskhètes. En effet, les dates anniversaires de 1994 et 2004 n'ont donné lieu à aucune manifestation commémorative, malgré l'activisme de quelques associations meskhètes. Le gouvernement géorgien, toujours réticent à ouvrir le dossier de leur réhabilitation, entretient des rapports ambigus avec une population selon lui non clairement identifiée. Les origines ethniques turques ou géorgiennes des déportés sont encore au centre d’âpres débats qui obèrent toute réflexion sur leur situation présente d’apatrides, de déracinés et « d’oubliés de l’histoire » (Tournon, 2004).
La Géorgie, terre d’origine des déportés, cherche par tous les moyens à ne pas se souvenir de la déportation et à éviter toute allusion à un éventuel retour, malgré l’obligation de rapatrier les Meskhètes dans les 12 ans imposée par le Conseil de l’Europe en 1999. En outre, la Géorgie parvient à se déculpabiliser en soulignant la responsabilité de la Russie, juridiquement seule héritière de l’URSS. De son côté, la Russie s’appuie sur le droit et les recommandations internationales (ONU) qui privilégient la solution du rapatriement pour tous les réfugiés. Elle affirme que la Géorgie se soustrait à ses obligations morales et historiques en refusant tout droit aux Meskhètes, les enfermant volontairement dans le statut de réfugiés permanents. Pour autant, la Russie n’a pas non plus opéré ce qu’il est désormais convenu d’appeler un retour sur soi via un « devoir de mémoire ». Les déportations ne sont toujours pas des événements incorporés dans l’histoire officielle ni intégrés dans la mémoire collective, et ce malgré quelques travaux de qualité (Zemskov, 2003 ; Bugaj et Gonov, 1998). De plus, la région de Krasnodar est la seule à ce jour à refuser la citoyenneté russe aux 15 000 réfugiés meskhètes y résidant, dont une grande partie s’est déjà rendue aux Etats-Unis grâce au programme américain d’aide aux réfugiés (Swerdlow, 2007).
L’histoire et la mémoire de la déportation des Musulmans de Meskhétie auraient pu sombrer dans un oubli total si un autre événement traumatisant ne les avait ravivées de manière spectaculaire. En juin 1989, des pogromes – des émeutes spontanées selon Osipov (2004) – visant la minorité meskhète dans la vallée de Ferghana, en Ouzbékistan, deviennent l’un des symptômes les plus médiatiques et les plus dramatiques de l’effondrement de l’URSS. Ces pogromes, qui font officiellement 100 morts et 500 blessés essentiellement parmi les Musulmans de Meskhétie, réduisent à néant le mythe de l’amitié entre les peuples (Lur’e, Studenikine, 1990). Ils révèlent au public soviétique l’existence d’une population jusque là inconnue. Dès lors, les Meskhètes deviennent objet d’histoire, mais d’une histoire qui dérange et qui est immédiatement marginalisée. Parce qu’ils apparaissent au moment où les républiques soviétiques acquièrent leur indépendance et se détachent de leur passé soviétique, alors qu’ils étaient des exilés soviétiques hyper-médiatisés, les Meskhètes deviennent des réfugiés apatrides retombés dans l’oubli. La mémoire de la déportation est alors reléguée en marge d’une histoire des nationalismes russes et géorgiens renaissants. Les hauts faits d’un passé géorgien glorifié prennent le dessus sur les pages sombres d’une histoire des déportations non assumée par l'Etat géorgien.
Actuellement, en Géorgie, les discours sur la déportation des Musulmans de Meskhétie investissent la scène politique. Pour les uns, la déportation constitue l'événement fondateur de l'histoire contemporaine des Meskhètes, elle marque à jamais leur mémoire collective, fonde leur identité. Deux opinions s'opposent toutefois: selon l'une, les Meskhètes sont des Turcs (Junusov, 2000) qui doivent retourner en Meskhétie, leur terre historique, avec des droits culturels adaptés à leur langue et leur confession. Dans ce cas, le terme Turc Meskhète , voire même Turc Ahiska , est préféré. Selon l'autre opinion, les déportés sont majoritairement des Géorgiens musulmans, appelés alors des Meskhs , réclamant leur rapatriement. Dans les deux cas, le gouvernement géorgien se refuse à tout dialogue, arguant de difficultés économiques, sociales et ethniques dans un pays déjà secoué par des conflits réels ou latents aux périphéries (Abkhazie, Ossétie, Djavakhétie.) Par ailleurs, les nationalistes géorgiens et une grande partie de la population géorgienne opposent à la déportation de 1944 la mémoire des conflits de 1918 (G. K'amadze, 2004). Le souvenir sporadiquement hypertrophié de l’alliance turco-meskhète de 1918 sert à légitimer la déportation des « Turcs » de Géorgie.
Cette opposition mémorielle, cette mise en concurrence des victimes géorgiennes et meskhètes visent à relativiser l'impact historique de la déportation et à dénier tout droit au retour des déportés. De même, elles tendent à dédouaner la Géorgie non seulement d'un « devoir de mémoire », mais aussi et surtout d'un « devoir d'histoire ». L'histoire nationale géorgienne ignore les mémoires de ses minorités. Ainsi, la déportation est-elle envisagée comme un événement non géorgien, donc indigne de figurer dans l’histoire nationale.
Interprétations et qualifications des faits
Les archives soviétiques, ouvertes depuis une quinzaine d'années, fournissent de nombreux documents sur les déportations. Toutefois, les chiffres avancés dans les rapports classés « secret absolu » sont à manier avec précaution. Ainsi en est-il, dans le cas des Musulmans de Géorgie, du terme de « Turc soviétique ». D’autre part, l’absence formelle d’accusation justifiant la déportation aux yeux des autorités est une porte ouverte à toutes les interprétations. Des zones d’ombres persistent en ce qui concerne les causes de ces déportations. Bien des conjectures, des plus paranoïaques au moins scrupuleuses, expriment une idée sur la question.
Deux chercheurs américains, S. E. Wimbush et R. Wixman (1975), mettent en avant le concept de Türlük , ou « turcité » des Meskhètes qu’ils rattachent au monde turc, et font de ce caractère identitaire la cause de leur déportation. Ces auteurs affirment que la déportation serait le fait des Arméniens qui entretiennent une « animosité traditionnelle » envers tout le monde turc depuis les massacres de la fin du XIXe siècle et le génocide de 1915. Le but des Arméniens aurait été de nettoyer ce qu'ils considèrent comme leur terre historiquement arménienne des « Turcs » les peuplant. Ainsi, en pleine guerre, des articles d'universitaires arméniens publiés dans la presse soviétique revendiquent ces territoires. Mais ces arguments particulièrement arménophobes paraissent bien minces au vu des éléments historiques. Les Arméniens ne sont pas les seuls à revendiquer des territoires en Anatolie, les Géorgiens aussi font de telles déclarations visant le retour du Lazistan turc. Or ni l'une ni l'autre de ces républiques soviétiques ne peuvent avoir d'initiative dans un domaine aussi sensible et stratégique que celui des frontières internationales. Bien au contraire, ces revendications nationalistes sont incitées et instrumentalisées par le Kremlin, qui entreprend une politique d'agression verbale et diplomatique contre Ankara. Le but des dirigeants soviétiques est alors de donner une assise historique à leurs propres revendications territoriales impérialistes qui vont jusqu'à inclure les détroits turcs. Or, les deux auteurs tournent tous leurs arguments à seule fin de faire croire que la RSS d'Arménie serait assez puissante pour dicter ses prétentions à Moscou et pour inciter la déportation d'éléments turcs d'URSS. Toutefois, rien ne vient corroborer l'existence d'un tel lobby arménien autour de Staline.
Dans son article (1998), l’historien géorgien G. Mamoulia a pour objectif l'absolution des Géorgiens dans le processus de prise de décision concernant la déportation. En faisant reposer toute la responsabilité sur les donneurs d'ordre moscovites, il fait plus que disculper la Géorgie, il la glorifie en prouvant que Tbilissi avait non seulement voulu protéger ses Musulmans de la déportation en ne faisant que les déplacer, mais aussi en ayant réussi à sauver les Adjares. De cette manière, il lave la Géorgie de tout soupçon de collaboration active et volontaire avec Staline et Beria. Il affirme que son pays a fait montre de la meilleure volonté possible pour protéger les Musulmans de Meskhétie, que ces derniers ont toujours été considérés comme des citoyens géorgiens en voie d’être complètement intégrés linguistiquement et culturellement. Cet article poursuit deux buts. D’une part, il tente de faire admettre au gouvernement géorgien que le rapatriement est moralement nécessaire, d’autant plus qu'il n'est pas à l'origine de leur déportation. D’autre part, il cherche à prouver aux musulmans de Meskhétie, majoritairement sceptiques quant à l’amitié « naturelle et historique » des Géorgiens à leur égard, que leur patrie d’origine est et a toujours été leur alliée. Le seul coupable de la déportation est toute la hiérarchie soviétique et non le peuple ni les autorités géorgiennes.
L'historien russe P. Polân (2001) propose de classer la déportation des Musulmans de Géorgie dans la catégorie des « déportations totales à caractère préventif ». Pour cela, il rappelle qu'en 1950-1952, Iraniens et Assyro-Chaldéens de Géorgie sont à leur tour déportés. Il en déduit que tous les citoyens soviétiques ayant des liens réels ou supposés avec leur patrie d’origine supposée (l’Irak, l’Iran, la Grèce, la Turquie) sont systématiquement soupçonnés. Les frontières sont littéralement nettoyées de ces « éléments indésirables » menaçantes aux yeux d’un système stalinien sur la défensive. L’ennemi intérieur est ainsi préventivement démasqué afin de protéger la forteresse soviétique. Cette approche qui fait de la sécurisation des frontières internationales de l'URSS l'argument majeur justifiant les déportations est la plus communément admise au sein de la communauté scientifique. Seule la terminologie appliquée à l'acte même de la déportation diverge parfois selon les auteurs. Ainsi, J.O. Pohl (2002) est l'un des rares à qualifier les déportations de génocide, suivant en cela la définition onusienne. Ce faisant, il privilégie une approche plus juridique qu’historienne.
C'est surtout en Géorgie qu'un autre débat vient se superposer à celui de la terminologie : il s'agit de juger la déportation et ses conséquences. Comment faire de ce non-événement un événement intégré à la chronologie historique géorgienne sans risquer de culpabiliser les Géorgiens ? Comment aborder le thème sensible de leur retour en équilibrant les aspects purement juridiques et les questions politiques et identitaires ? Face à la déportation et à la question de la réhabilitation et du rapatriement des Musulmans de Meskhétie, les Géorgiens sont divisés. Ceux opposés au rapatriement insistent sur l’impossible cohabitation entre Géorgiens et « Turcs ». Dans ce cadre, la déportation, bien que tenue pour un acte criminel, aurait permis la normalisation de la situation d'une Géorgie qui, selon eux, doit être ethniquement homogène. Cette approche est privilégiée notamment par la classe politique et la plupart des médias. De leur côté, les partisans du rapatriement minimisent la mémoire des récents conflits turco-géorgiens et insistent sur le contexte soviétique. Ils cherchent à déculpabiliser le peuple géorgien, « victime » lui aussi de la politique soviétique, en l'exonérant de toute collaboration active et volontaire avec le pouvoir soviétique (Mamuliâ, 1998). La solidarité ethnique entre musulmans de Meskhétie et Géorgiens est soulignée afin de susciter un accueil positif de la politique de rapatriement auprès d'une population largement hostile aux « Turcs ». Suivant cette approche réconciliatrice, le rapatriement est un droit indiscutable, bien que certains souhaitent que seuls les Musulmans d'orientation géorgienne – les soi-disant « Meskhs » - soient réhabilités (K'amadze, 2005; M. Natmeladze, 2002 ; T. Putkaradze, 2005). Dans les deux cas, la déportation, souvent qualifiée de « crime contre l'humanité », est distinguée de la question du rapatriement. Cette dernière ne relève pas du droit international, mais dépendrait de la politique géorgienne et, dans une moindre mesure, des pressions d'organismes internationaux tel le Conseil de l'Europe.
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