La Havane
Depuis les premières années de la révolution, le régime communiste cubain entretient des relations complexes avec la culture, avec pour ligne politique la fameuse règle « Avec la révolution tout, en dehors de la révolution rien ». La volonté de mettre les artistes au service de la révolution n’a pas nécessairement déplu aux muralistes inspirés par l’expérience mexicaine. Les artistes ont toutefois rapidement revendiqué leur liberté, suscitant répression et exil. Le street art ne fait pas exception. Son potentiel subversif est double : il peut véhiculer des messages contestataires et il occupe l’espace public. Malgré tout, de nombreux artistes se risquent à intervenir sur les murs, souvent en ruine, de La Havane. Photos prises en 2012, 2015, 2016 et 2018.
Artistes rencontrés
Comme d’autres artistes, 2+2=5 ne cherche pas nécessairement la provocation ou la confrontation. Inspiré par Georges Orwell, il donne néanmoins à voir l’absurdité et les impasses du régime. Son personnage-signature porte un masque, afin de mettre en scène un Cubain anonyme dont il évoque les difficultés quotidiennes.
Happy Zombie moque la passivité des Cubains avec d’étranges créatures.
Yulier a créé une galerie de personnages aux allures d’Alien, sans oreilles ni bouches. Une telle métaphore de l’absence de liberté ne lui a pas immédiatement valu des ennuis avec la police. Depuis 2017, il est toutefois interdit de peindre dans l’espace public. Son objectif reste d’ouvrir les yeux de ses compatriotes.
Autres artistes
Plus encore qu’ailleurs, l’intervention artistique dans l’espace public reflète une audace et traduit un engagement en faveur des libertés. La démarche est le plus souvent individuelle, car aucune mobilisation sociale n’est possible à Cuba. La dimension esthétique importe peu. Seul le geste compte. Il montre que la provocation est possible. Dans certains cas, des slogans officiels occupent des espaces. Ils sont d’ailleurs parfois détournés et moqués.
Le portrait peut sembler politiquement neutre et, à ce titre, plus acceptable pour le régime. Les portraits de jeunes enfants de Maisel López (artiste de La Havane), par exemple, sont validés par les autorités. Pour autant, certains artistes mettent en scène des monstres ou des attaques de panique qui parlent du quotidien des Cubains.