Le 27 septembre, la Chaire Digital, Gouvernance et Souveraineté a eu le plaisir d’accueillir Bénédicte Bévière-Boyer, Maître de conférences-HDR en droit privé à l’Université de Paris 8, à l’occasion de la présentation de son policy brief intitulé « les enjeux paradoxaux de l’identité numérique régalienne », ainsi que la Préfète Anne-Gaëlle Baudouin, directrice de l’Agence nationale des titres sécurisés, et Florent Tournois, directeur de projet chargé du programme France Identité.
Il s’agissait d’un événement hybride qui s’est tenu dans l’Amphithéâtre Simone Veil à Sciences Po et qui a également été diffusé à une large audience sur Zoom.
La discussion a été modérée par Florence G’sell, titulaire de la Chaire Numérique, Gouvernance et Souveraineté, qui a ouvert la conférence en rappelant notre dépendance croissante aux services d’authentification en ligne proposés par les grandes entreprises du numérique.
Bénédicte Bévière-Boyer a ensuite présenté son étude en commençant par délimiter le périmètre de son travail et en insistant sur la nécessité pour l’Etat de développer des services d’identité numérique au service de la protection des personnes face au développement de services privés qui sont soumis à des intérêts économiques. Elle a présenté différents efforts menés par l’Union Européenne et la France en matière de dématérialisation des services publics et de services d’authentification en ligne en montrant à quel point ces services constituent désormais des outils stratégiques pour la souveraineté numérique des Etats. Puis, elle a montré que bien qu’essentiels, ces projets présentent également de nombreux risques, notamment en termes de robustesse technique, mais également du fait de dérives potentielles menaçant la protection de la vie privée et des libertés fondamentales. Elle a cité par exemple la collecte massive d’images par l’entreprise Clearview AI au profit de systèmes de reconnaissance faciale ou la surveillance mise en place à l’aide du système de crédit social en Chine. Elle a conclu en appelant les Etats européens à développer ces services tout en maintenant un niveau élevé de vigilance et en mettant en place des garanties techniques et juridiques.
Anne-Gaëlle Baudouin a réagi à cette présentation, en précisant tout d’abord que la France est à la fois leader dans le domaine de l’identité numérique, notamment du fait de son écosystème fort d’entreprises numériques, mais accuse dans le même temps un retard en ce qui concerne l’identité numérique régalienne, marqué par plusieurs échecs dans le passé. Elle a ensuite présenté le projet France Identité, porté par l’ANTS et en cours de développement, en discutant les choix qui ont été faits pour garantir à la fois l’accessibilité et l’adoption la plus large et un niveau élevé de sécurité et de protection de la vie privée. Par exemple, le projet a choisi de ne faire appel qu’à des entreprises françaises et de ne pas utiliser la reconnaissance faciale, qui présente trop de risques, mais plutôt de s’appuyer sur la nouvelle carte d’identité biométrique électronique.
Les interventions ont été suivies de plusieurs questions dans la salle et sur Zoom, témoignant à la fois du fort intérêt et des préoccupations concernant le développement de ce type de système.
Bénédicte Bévière-Boyer est maîtresse de conférences-HDR en droit privé à l’Université de Paris 8 et rattachée au Centre de recherches juridiques de Paris 8. Ses travaux de recherches portent sur le droit de la bioéthique, de l’éthique et du numérique. Elle a dirigé 8 ouvrages collectifs, écrit plus de 70 articles et 80 chroniques d’actualités. Elle organise régulièrement des colloques sur des thèmes d’actualité en lien avec plusieurs universités chinoises. Elle dirige le M2 droit de la santé, numérique et intelligence artificielle à l’Université de Paris 8.
Anne-Gaëlle BAUDOIN, directrice de l’ANTS, directrice France Identité Numérique
Florent Tournois, directeur de projet chargé du programme France Identité
Florence G’SELL (modérateur), professeur de droit privé à l’Université de Lorraine et titulaire de la Chaire Digital, Gouvernance et Souveraineté de Sciences Po