Au-delà des universités, un grand nombre d’institutions sont, en France, acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche. Toutes ces institutions fonctionnent selon leurs propres règles, liées à leur propres missions, cultures et instruments (outils budgétaires, logiciels de gestion, dispositifs de pilotage…).
Résultats ? Difficultés d’échanger, redondances, temps perdu, personnel mal employé, et au final un service rendu aux “usagers” jugé perfectible.
Décidé à renforcer l’efficacité du système, le Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR) a engagé, en 2016, un programme ambitieux de simplification et a voulu, dès l’origine, que ces mesures soient évaluées au long cours. Clément Pin, jeune chercheur au sein du Laboratoire d’évaluation des politiques publiques (LIEPP) de Sciences Po, est chargé de conduire cette évaluation.
Depuis au moins 10 ans, un mouvement intense et continu de reconfiguration de l’enseignement supérieur et de la recherche a été engagé en France : Pacte pour la recherche en 2006, Loi relative aux libertés et responsabilités des universités en 2007, Plan Campus en 2008, Programmes d’investissements d’avenir depuis 2010, Loi Fioraso en 2013. Dans le même temps, de nouvelles institutions se créent (comme le HCERES et l’ANR) et des procédures déjà existantes se renforcent.
L’ensemble de ces réformes a complexifié le fonctionnement d’ensemble. D’où le lancement de ce plan de simplification, conçu comme un levier pour améliorer la performance du système de l’enseignement supérieur et de la recherche, faciliter les mobilités en son sein et réduire le coût de son fonctionnement tout en garantissant une bonne qualité de service. Mais compte tenu de la multiplicité des enjeux de coordination, les démarches de simplification ne peuvent elles-mêmes qu’être complexes.
Portant sur des aspects très opérationnels, le plan de simplification est composé de 70 mesures se déployant à une échelle très fine : outils, procédures, circulation de l’information. Concrètement ces mesures touchent 4 domaines : vie étudiante, carrière des personnels, activités de recherche et gestion des établissements. Elles mettent en œuvre plusieurs logiques transversales.
La plus importante, celle de la dématérialisation des procédures et plus largement de la transformation numérique, concerne l’inscription des étudiants, leurs demandes de bourses, leurs conventions de stages, les campagnes de recrutement des personnels enseignants et administratifs, ou encore le vote aux élections internes.
Un deuxième ensemble de mesures concerne l’harmonisation des pratiques administratives par l’alignement de procédures et la mutualisation des outils de gestion.
D’autres mesures suivent une logique plus politique, voire prospective, en soutenant le passage aux Responsabilités et compétences élargies (RCE) – c’est à dire l’autonomie – des Communautés d’universités et d’établissements (COMUE) ou, encore, la déconcentration de la gestion des personnels supports de la recherche.
Si, étymologiquement, simplifier signifie passer de ce qui est multiple à ce qui est unifié, objectivement, simplifier une action (appréhendée comme un processus) consiste à réduire le nombre de séquences et étapes intermédiaires permettant à quelqu’un d’atteindre un but. Ainsi la démarche d’évaluation consiste tout particulièrement à identifier et à analyser, pour mieux les comprendre, les obstacles pratiques et cognitifs à une meilleure coordination des institutions et des acteurs.
Mais l’idée de simplification comporte aussi une dimension subjective : celle de réduire la perception de l’effort perçu comme nécessaire par un usager pour bénéficier d’un service, en termes de dépense de temps et d’énergie
Pour conduire cette évaluation, un dispositif d’enquête est mis en place à trois niveaux : celui de l’administration centrale ; celui des établissements (en l’occurrence les universités) ; celui des publics ciblés (les étudiants, les personnels académiques et administratifs). Réalisé auprès d’un nombre limité d’universités, retenues pour leurs caractéristiques contrastées en termes institutionnels, démographiques et sociaux, il se focalise sur une dizaine de mesures impliquant des systèmes d’actions variées, censées bénéficier à différentes catégories de publics. Dans son volet touchant à la qualité de service, il s’agit d’analyser les conditions de réception des interventions, en particulier par les usagers que sont les étudiants, et mesurer leur prise en compte opérationnelle par les décideurs.
Au total, l’enjeu est d’analyser la façon dont interagissent les différentes institutions et les différents niveaux, la manière dont ces interactions s’organisent et si elles permettent – ou non – aux informations et aux connaissances nécessaires à l’action et à son amélioration, de circuler.
Description complète du projet
Clément Pin est sociologue, post-doctorant au LIEPP.