30 ans de COP, 10 ans de l’accord de Paris: la diplomatie climatique aujourd’hui

Le monde d'aujourd'hui est en grande difficulté : que l'on regarde vers le Moyen-Orient, où une guerre horrible fait rage à Gaza ; vers l'Amérique du Nord, où un président de plus en plus autoritaire démantèle les institutions démocratiques ou vers l'Europe, où les gouvernements sont aux prises avec le populisme de droite, la dette et l'instabilité économique et politique, la situation semble désastreuse. Au milieu de toutes ces turbulences, il est facile d'oublier le changement climatique et ses conséquences néfastes. Pourtant, la crise climatique est toujours bien réelle, elle s'aggrave et elle est là pour durer. Les rapports scientifiques se succèdent pour avertir que les températures augmentent plus rapidement que prévu et que les conséquences sont de plus en plus importantes : inondations, vagues de chaleur, incendies de forêt et sécheresses mais pas uniquement !
Chaque année, en novembre, la communauté internationale se réunit afin de (re)mettre le changement climatique sur l’agenda politique, public et médiatique, dans un effort de trouver des solutions à la crise climatique. Les sommets annuels sur le climat – formellement les Conférences des Parties (COP) à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) - en sont désormais à leur 30e édition. A la mi-novembre 2025, pratiquement tous les pays du monde (la CCNUCC compte 198 parties, dont l'Union européenne) se réuniront à Belém, au nord du Brésil, pour discuter, une fois encore, du changement climatique.
La 30e édition des COP annuelles est symbolique à plusieurs égards. Elle marque non seulement trente ans de négociations onusiennes sur le climat, mais aussi les dix ans de l'accord de Paris. En 2015, sous le leaderhsip de la présidence française, le monde a adopté l'accord de Paris, premier accord universel sur le climat. Il engage tous les pays du monde, qu'ils soient « développés » ou « en développement », à communiquer et à mettre en place des plans nationaux plus ambitieux en matière de climat. A priori, ces plans, appelés « contributions déterminées au niveau national » (CDN), devraient nous conduire à une réduction des émissions mondiales, permettant ainsi de limiter le réchauffement climatique à « bien en dessous de 2 °C », et idéalement à 1,5 °C.
L'accord de Paris a constitué une avancée majeure dans les négociations climatiques. Il a été considéré comme un succès diplomatique énorme et il a été source d'espoir. Par à cet accord universel destiné à remplacer le protocole de Kyoto de 1997, les pays se montraient optimistes quant à leur capacité à enfin infléchir la courbe des émissions mondiales et à « résoudre » le problème du changement climatique.
Dix ans plus tard, où en sommes-nous ? Qu'est devenu l'accord de Paris ? Pourquoi continuons-nous à nous réunir chaque année pour la COP et que pouvons-nous attendre de la COP30 ?
Nous aborderons ces questions lors d'un événement organisé conjointement avec la KU Leuven, le projet Horizon Europe ENSURED (Transforming and Defending Multilateralism: European UnioN SUpport for more Robust, Effective and Democratic Global Governance) et PSIA. L'événement se déroule en deux parties : l'après-midi, un atelier plus académique qui sera suivi par une table ronde publique le soir.
La recherche sur le changement climatique et les négociations climatiques est en plein essor. Les chercheur(e)s s'intéressent en particulier aux COP annuelles : comment donner un sens à ces méga-événements qui rassemblent des dizaines de milliers de participants ? Quel est leur objectif maintenant que l'accord de Paris a été conclu et que nous en sommes à la phase de mise en oeuvre ? Les COP, dans leur format actuel, sont-elles efficaces, efficientes et équitables ? Comment pourrions-nous transformer, réformer et améliorer leur processus ? Les participants à l'atelier, parmi lesquels des chercheurs de Sciences Po, de la KU Leuven et de l'IESEG School of Management Lille, travaillent sur ces questions et ils pourront profiter de l'événement organisé à Paris pour échanger, trouver des pistes de recherches communes et se coordonner en vue de la COP30.
Dans la soirée, nous invitons également des acteurs politiques et des praticiens à dialoguer autour des enseignements tirés de l'accord de Paris et des attentes qu’ils ont pour la COP30. Nous réunissons quatre experts chevronnés de la diplomatie climatique : Paul Watkinson, ancien négociateur pour la France et membre de l'équipe de la présidence française de la COP21 qui a mené à l'accord de Paris ; Katja Biedenkopf, professeure de politique de la durabilité dans le groupe de recherche Leuven International and European Studies ; Christian Dietz, chercheur à l'unité Énergie, ressources et changement climatique (ERCC) du Centre for European Policy Studies (CEPS, Belgique) et Yamina Saheb, auteure principale du rapport du GIEC sur l'atténuation du changement climatique, cofondatrice du World Sufficiency Lab et chargée de cours à PSIA.
Paris a été en 2015 un moment d'espoir. Que sera Belém ? La présidence brésilienne a une tâche difficile à accomplir. Jusqu'à présent, les discussions ont principalement porté sur le choix de Belém comme ville hôte pour la « COP de l'Amazonie » et sur les prix invcroyablement élevés de l'hébergement dans cette ville. Plusieurs pays, et pas seulement du Sud, ont même remis en question leur présence ou annoncé une réduction importante de leurs équipes en raison de ces coûts. On ne sait pas si les États-Unis, qui se sont retirés – pour la deuxième fois – de l'accord de Paris (bien qu'ils fassent toujours partie de la CCNUCC), enverront une équipe. Toutefois, des attentes modestes et des équipes réduites permettront peut-être d'ouvrir la voie à des discussions techniques sérieuses. Une avancée politique majeure comme celle qui a eu lieu à Paris il y a dix ans est peu probable mais elle est peut-être inutile aujourd’hui que nous sommes dans « l'ère de la mise en œuvre ». Et celle-ci, contrairement aux négociations, se fait au niveau national plus qu’international.
Photo : Vue aérienne d'une forêt avec des icônes représentant un transport respectueux de l'environnement. Crédit Dee Karen pour Shutterstock.