Etre cachemiri à New Delhi. L’expérience du nationalisme à distance
Charlotte Thomas
La mort de Burhan Wani, combattant armé leader des Hizbul Mujahideen, a initié en juillet 2016 une nouvelle phase insurrectionnelle au Cachemire, où la population se mobilise contre l’Etat indien en réclamant l’azadi, la liberté. Le détour par New Delhi permet d’étudier le sentiment national des Cachemiris en s’intéressant aux frontières du groupe et aux dynamiques de différenciation par rapport aux Indiens. Le nationalisme cachemiri se définit davantage dans sa dimension négative (ce qu’il n’est pas) que positive (ce qu’il est). Le glissement progressif du contenu des prétentions à l’azadi est également l’un des enjeux du nationalisme cachemiri. D’abord demande de respect de l’autonomie politique du Jammu-et-Cachemire au sein de la République indienne, l’azadi signifie désormais l’indépendance du territoire cachemiri. Les revendications des Cachemiris traduisent de surcroît un fort rejet de l’affiliation nationale et citoyenne indienne, nourri par la négation de la dimension nationaliste de la lutte des Cachemiris opposée par New Delhi. L’insurrection en cours semble avoir encore accéléré ce processus, d’autant qu’aucune solution politique impliquant l’ensemble des parties prenantes au conflit n’est envisagée. Au-delà de la question du Cachemire, c’est le fonctionnement de la démocratie et de la nation indiennes qu’éclaire l’étude du nationalisme cachemiri.
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