Critique internationale - Sommaire
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Traiter la question de l’État et de la communautarisation de l’espace irakien dans la durée implique de revenir sur le passé. À cet égard, il convient d’abandonner toute lecture monocausale et de tenter, à partir d’une série de contradictions et de paradoxes, de comprendre les ruptures de l’histoire irakienne. Cette démarche permet de réfléchir ensuite à la fragmentation actuelle de la société de ce pays, fragmentation qui est à la fois la conséquence et l’une des causes de l’impossibilité de reconstruire l’État, et de suggérer enfin, en partant de la notion des marges, que, derrière l’événementiel comme « faits divers » et la violence comme phénomène multiforme, se profilent de nouvelles configurations dont la portée pourrait dépasser de loin le cadre irakien.
Le conflit civil irakien résulte à la fois de l’héritage de l’ancien régime et des préconceptions américaines. Le régime de Saddam Hussein était caractérisé par un effort systématique de déconstruction nationale qui a poussé les Irakiens à se replier sur la sphère du privé. Cela explique la faible capacité de mobilisation des acteurs politiques longtemps exilés qui, de retour en Irak, ont cherché à monopoliser les ressources plus qu’à mettre en œuvre un projet politique. Cette anomie généralisée a permis aux Américains d’imposer leur grille de lecture de la société irakienne, perçue comme segmentée en trois entités ethnico-confessionnelles. C’est ainsi que la violence, au départ tournée contre les troupes de la coalition, s’est rapidement transformée en affrontements interconfessionnels, qui ne doivent cependant pas occulter un phénomène tout aussi significatif de privatisation de la violence. L’incapacité des Américains à gérer la transition a également conduit à une perte de crédibilité de la démocratie, conduisant in fine à une dépolitisation du politique.
L'étude des sources internes à l'opposition armée en Irak permet de se faire une idée précise de la réalité sur le terrain militaire et idéologique. En prenant comme base les différentes publications des groupes insurgés sunnites, il est possible de définir les acteurs du mouvement jihadiste en Irak et de retracer l'évolution du jihadisme depuis le début de la guerre. Cette vision de l'intérieur permet également de comprendre la dynamique conflictuelle qui anime les différentes milices, contribuant ainsi à l'extension de la violence interconfessionnelle. L'analyse des arguments idéologiques des principaux groupes montre que la lutte armée se nourrit essentiellement de la notion de « jihad » qui apparaît aujourd'hui comme la principale légitimation d'une violence aveugle. Pour le mouvement jihadiste, la guerre d’Irak aura été un tournant idéologique et historique.
Le modèle des « guerres en réseaux » ou « configurations conflictuelles régionales » (CCR) ne constitue qu’un tout premier pas dans la compréhension des relations complexes entre les conflits qui agitent l’Irak, la Syrie et le Liban. Certes, les niveaux d’analyse qu’il propose du trafic transfrontalier des personnes et des biens sont sans aucun doute un préalable indispensable à l’étude des liens entre les différents conflits de la région. Mais une description qui en resterait là ne ferait qu’alimenter la myopie des politiques actuelles du gouvernement américain au Moyen-Orient. C’est pourquoi il est urgent d’intégrer à cette approche la notion de régionalisation du capital symbolique qui, seule, permet de comprendre que l’Occident n’est pas un acteur exogène aux conflits régionaux et de reformuler en conséquence l’analyse et les politiques. Par ailleurs, compte tenu de l’importance du capital symbolique et des interventions extérieures dans les conflits régionaux, la vision statique et excessivement simpliste de la politique identitaire développée par le modèle des CCR (RCFs) doit être revue afin d’intégrer trois éléments : les liens matériels transfrontaliers, le capital symbolique régional et les interventions extérieures
L’analyse de données officielles recueillies auprès des représentants des États membres du Conseil de l’Europe et celle des entretiens semi-directifs conduits auprès d’acteurs sociaux, judiciaires ou politiques permettent d’apporter quelques éclaircissements sur les problèmes que posent les mariages forcés. Quels sont les instruments juridiques qui permettent d’empêcher ou d’annuler les unions non consenties et d’en sanctionner les auteurs et les complices ? Quels sont les dispositifs et les actions politiques mis en place pour prévenir et lutter contre ces pratiques ? Enfin, en quoi les moyens proposés sont-ils en adéquation avec l’expérience des personnes qui sont confrontées à un mariage forcé ? L’analyse comparée est ici limitée à cinq pays d’Europe : la Belgique, la France, la Norvège, le Royaume-Uni et la Suède
Le 13 septembre 2004, au cours d'une apparition télévisée, le Président russe Vladimir Poutine a annoncé, parmi d’autres réformes politiques, la suppression des élections pour les représentants du pouvoir exécutif dans les régions de la Fédération de Russie. Ce retour à la nomination des gouverneurs parachève la politique de recentralisation engagée en 2000 en réaction au processus spontané et peu maîtrisable de régionalisation des années 1990. Quelles sont les sources de cette politique de recentralisation, ses principes et ses intérêts fondamentaux ? Comment ces facteurs ont-ils influencé son cours et ses résultats ? Quelle est l'importance de cette recentralisation dans le développement politique de la Russie et quelles en sont les perspectives ? Pour répondre à ces questions, il convient tout d’abord de revenir sur le processus de régionalisation des années 1990, puis d’examiner les idéologies et les intérêts qui ont animé les acteurs politiques russes lors de la recentralisation des années 2000 et leur influence sur le cours de la réforme fédérale, que l'on peut qualifier de « nouveau centralisme » (par opposition à « l'ancien centralisme » de type soviétique), enfin d’analyser la mise en œuvre de cette nouvelle politique et ses effets sur le processus de réforme de l’État.
Créé par l’État d’Israël, le titre de « Juste parmi les Nations » désigne les non-Juifs qui ont aidé des Juifs pendant la seconde guerre mondiale. Depuis le début des années 1990, ce titre fait l’objet d’une réappropriation par les différents pays de l’ancienne Europe occupée. L’analyse de leur insertion dans la mémoire historique polonaise et le rappel de ses précédents depuis 1945 permettent une approche renouvelée des phénomènes dits de transition. Largement conçue en termes de politique étrangère, la mobilisation de la figure du Juste au sein de la mémoire historique polonaise est le reflet de la marginalité et de l’exclusion des Juifs de la société de ce pays. Ainsi, ses récentes évolutions semblent pouvoir être rattachées à une modification en cours de l’espace public polonais.
L’analyse des résultats du quatrième sommet des Amériques qui s’est tenu à Mar del Plata en novembre 2005 fournit les raisons qui ont mené à la formation de deux groupes de pays opposés dans le cadre du processus de négociations commerciales hémisphériques. Toutefois, contrairement à l’idée répandue selon laquelle ces négociations s’acheminent vers la formation de deux blocs commerciaux organisés à partir de l’ALENA et du MERCOSUR, l’article souligne que les résultats de ce sommet ouvrent la voie à une arborescence d’accords commerciaux arrimés aux États-Unis et à l’isolement des opposants au régionalisme nord-américain. Le Brésil ayant peu à offrir à ses voisins sud-américains, les États-Unis profiteront de la conjoncture pour étendre le modèle de l’ALENA à l’ensemble du continent, ce qui contredit les principes qui avaient été placés au cœur du processus menant à une éventuelle Zone de libre-échange des Amériques.
Ian Shapiro, The State of Democratic Theory, Princeton, Princeton University Press, 2003, XI-183 pages.
Archon Fung, Empowered Participation : Reinventing Urban Democracy, Princeton, Princeton University Press, 2004, 278 pages.
Nicolas Guilhot, The Democracy Makers : Human Rights and International Order, New York, Columbia University Press, 2005, 288 pages.
Anne Applebaum, Goulag : une histoire, Paris, Grasset, 2005, 716 pages.
