Partie II: Du communautarisme ou de l’intégration : dynamiques contradictoires de l’immigration à Valparaíso. L’exemple de la communauté allemande.
PARTIE II : LE FONCTIONNEMENT ACTUEL DES INSTITUTIONS ET LA VOLONTE DE PRESERVATION DE L’IDENTITE ALLEMANDE
Parmi les diverses institutions fondée par la communauté allemande et subsistant actuellement, nous allons nous intéresser spécifiquement au fonctionnement du Club allemand, de la Deutsche Schule et de l’Eglise luthérienne. Nous avons déjà observé en première partie le rôle important détenu par ces organismes à leur création. Elles nous paraissent aujourd’hui encore être des pièces maîtresses du fonctionnement de la collectivité au sein de la ville et il semble dès lors pertinent d’étudier leur évolution, dans la mesure où les modifications qu’elles connaissent peuvent refléter en partie l’état de la communauté allemande.
Nous tenterons donc d’examiner l’action de ces trois institutions à la lumière de la problématique suivante : Comment le fonctionnement du club, du collège et de l’église allemande à Valparaíso témoignent-il à la fois une volonté de préserver l’identité allemande des descendants de migrants et de leur intégration progressive à la société porteña ?
Pour répondre à cette question, il convient non seulement d’envisager l’action de ces institutions mais aussi leur popularité au sein de la communauté et leur poids réel dans la ville de Valparaíso. Pour ce faire, nous tenterons de tracer une évolution chiffrée de leur fréquentation et de leur importance. Disposant des recensements du nombre d’étrangers dans la province de Valparaíso pour les années 1942, 1972 et 2002, nous avons choisi de nous baser sur ces trois années pour effectuer, à partir des archives des institutions étudiées, une modeste étude générationnelle des transformations subies par ces organismes. Dans le cas du club allemand, cependant, il n’existait pas de registres des membres accessibles permettant d’examiner son évolution, nous devrons donc nous baser sur les différents entretiens effectués pour obtenir une idée de son évolution.
I. Une action pour valoriser la culture allemande
A) Des institutions héritage de l’immigration
Dans chacune des institutions que nous avons pu étudier, la variable communautaire et l’héritage de l’immigration sont des éléments à prendre en compte. Tout d’abord, toutes témoignent de leur histoire à travers la célébration de leurs anniversaires de naissance. C’est ainsi que le Collège allemand a sorti un grand livre retraçant toute son évolution à l’occasion de ses 140 ans d’existence, fêtés en 1997. Images d’archives, photos des premiers professeurs et élèves, bulletins de notes et autres documents historiques y sont exposés et le livre fait référence dans l’étude des communautés européennes à Valparaíso. Dans le cas de l’Eglise, la célébration n’est pas aussi importante, mais le pasteur Obermöller nous confie tout de même avoir célébré son premier culte en allemand d’un bout à l’autre pour l’anniversaire des 113 ans de la construction du temple de la Santa Cruz. Enfin, l’institution dans laquelle la célébration des anniversaires est sans doute la plus institutionnalisée est le Club allemand. Fort de son statut de premier club social européen au Chili, fondé dès 1838, il organise chaque année des festivités en mémoire de sa création. Le club s’affirme ainsi héritier du travail des pères fondateurs et entend s’inscrire dans la continuité de leur action originelle : “Cuando hoy día el Club Alemán se abre de nuevo a la comunidad porteña ofreciéndole realizaciones culturales de la más diversa índole, se encuentra dignamente en las huellas de aquellos jóvenes que con tanto ímpetu abrieron el paso a una grata recreación en un entorno que la acogió favorablemente” .
b) La préservation de l’identité allemande aujourd’hui
Cependant, mettre la culture allemande à l’honneur, nous le comprenons en étudiant ces institutions, ce n’est pas seulement rappeler le souvenir des migrants à l’origine de leur création. C’est au quotidien que ces associations tentent de maintenir des liens avec la patrie d’origine. Malgré un relatif détachement de ses missions originelles, on note par exemple que l’Eglise organise depuis peu de temps des cours d’allemand très peu chers et ouverts à tous. Pour ce qui est du Collège allemand, l’attachement à la culture germanique est particulièrement flagrant. Chaque année des échanges linguistiques sont organisés avec l’Allemagne. La préparation de ce voyage de trois mois demande beaucoup d’énergie au directorat du collège, mais il est un passage obligé pour tous les élèves âgés d’environ 17 ans, effectuant leur avant-dernière année à l’école. Souvent, ce séjour ouvre des horizons nouveaux et incite certains à continuer leurs études en Allemagne. De plus, malgré la relative perte de la langue dans le collège et le désintérêt des jeunes dont parle la directrice Dagmar Loos, l’établissement continue de chercher à mettre en valeur son identité. Il tente de véhiculer certaines valeurs qu’il estime hériter de la culture germanique et de conserver une certaine éthique d’indépendance et de discipline. Pour le directorat, cela passe par une certaine sélection des élèves :
“¿Hay un tipo de selección para que entren los alumnos?
Si, se hace un examen y las notas de alemán son requisitas.
“¿Dentro de los programas escolares hay mucha historia de Alemania, muchas clases de alemán?
Si, si, claro se trata de despertar la conciencia por la cultura que estamos representando.”
Dès lors, le travail effectué par ces institutions n’est pas uniquement un travail au niveau national. La revendication de l’identité passe par l’établissement de liens véritables avec l’Allemagne. C’est ainsi que les seules subventions reçues par le Collège sont allemandes (l’Etat chilien n’aide pas à son fonctionnement). Il y a quelques années, le pays a d’ailleurs aidé à la réfection du toit de l’ancien Collège du cerro Concepción, classé monument historique de la ville de Valparaíso. Dans le Club enfin, il est traditionnel que les autorités allemandes de passage à Valparaíso soient reçues et effectuent un discours pour la communauté de descendants de migrants. L’identité allemande est encore très fortement revendiquée, notamment par les classes les plus âgées qui forment la majorité des membres régulièrement présents au Club. Ceux-ci réclament l’organisation d’activités autour de la culture germanique et la possibilité de se réunir pour parler la langue de leurs parents. D’ailleurs, le fonctionnement de l’institution est assuré par un directorat totalement bilingue et nous pouvons noter qu’il dispose, pour contribuer à son financement, d’un restaurant qui sert des spécialités importées par les immigrants.
II. Evolution des institutions : chronique d’un déclin inexorable et stratégies de survivance entre tradition et modernité.
A) Le vieillissement du Club allemand
“ ¿Hoy en día cuántos socios hay en el Club? 180 más o menos. Han ido disminuyendo los últimos años, más que nada porque han ido falleciendo los más los viejitos. Y hay menos que ingresan que los que fallecen.”
Malgré l’absence de registres précis, la réponse du président Jan Karlsruher à notre question sur le nombre de membres que compte le club allemand suffit à cerner la situation de l’association. Depuis une cinquantaine d’années, ce chiffre a été divisé par deux. De plus, parmi les membres que compte l’organisation, le président nous confie qu’à peine une centaine est réellement active dans l’association. D’autres payent leur cotisation par habitude ou tradition mais sont rarement présents dans les locaux du club. Dès lors si, à l’origine, la sélection était stricte pour être accepté dans l’association, aujourd’hui, le Club n’a plus les moyens d’opérer un sévère tri parmi ces adhérents. Il a donc développé des stratégies d’ouvertures et ses statuts mixtes pour pouvoir se maintenir en fonctionnement. Par exemple, il n’a plus pour unique objectif de promouvoir la culture allemande, mais d’alimenter toutes « les relations sociales chileno-allemandes ». Son président affirme : “El Club Alemán cuida y fomenta la cultura y la tradición alemanas, pero al mismo tiempo se ha ido adaptando a los tiempos actuales y anhela modernizarse aún más.[…] Así, hemos abierto nuestras puertas a todas las personas, independiente de su nacionalidad.” Le club compte désormais deux catégories de membres : les membres « ordinaires » et les membres « extraordinaires ». Les premiers sont ceux qui parlent allemand, les seconds ne connaissent pas la langue : nous sommes bien loin des débuts du club où celui-ci était réservé aux migrants de nationalité allemande.
Dans le discours du président, un autre problème apparait particulièrement préoccupant : celui de la jeunesse. Nombreux sont les interviewés qui nous confient que les jeunes ne s’intéressent guère à ce genre d’organisations. Pour eux, qui sont nés chiliens de parents ne parlant plus allemand, le lien avec la patrie de leurs ancêtres est loin d’être évident. Le vieillissement du public du Club entraîne un détachement encore plus grand de la jeunesse qui se sent en décalage avec la génération fréquentant habituellement les locaux. Ainsi, le Club allemand a créé une troisième catégorie d’adhérents dite de « socios juveniles », de « membres jeunes », qui compte une trentaine de personnes. Le but de cette manœuvre est d’attirer une population moins âgée dans le club, en organisant des activités spécifiques pour l’intéresser aux traditions allemandes. La diversification de son public est nécessaire à sa survivance, toutes les catégories doivent donc trouver leur compte dans l’association qui souhaite « buscar más intereses, no solamente para los jóvenes sino también para los profesionales jóvenes » . L’idée d’attirer des jeunes professionnels permettrait en effet un retour de la fréquentation des familles et, avec les enfants, assurerait une pérennité à l’organisation. Cette ouverture se traduit forcément par un détachement du fonctionnement habituel du club. Néanmoins, les défis futurs de l’association sont nombreux et, en premier lieu, celle-ci doit constamment inventer de nouveaux moyens de fonctionner avec des fonds restreints, d’où un recours massif au bénévolat pour continuer d’organiser des activités attractives et gratuites pour la communauté (conférences, fêtes, activités culturelles etc.). Le bénévolat, cependant, compte essentiellement sur l’action des personnes âgées qui disposent de plus de temps que les actifs et l’on voit mal comment cela permettrait de rompre le cercle de vieillissement général du club.
B) L’intégration forcée de la Deutsche Schule
Pour ce qui est du Collège allemand, d’autre part, la difficulté ne réside pas dans la réduction de son succès
auprès des élèves. Aujourd’hui, il compte 1190 étudiants, ce qui est beaucoup plus élevé qu’au temps de sa fondation, mais cela vient du fait qu’il s’est largement ouvert et intégré au système d’éducation chilien. De nombreux parents confient leurs enfants à cette école, malgré une scolarité payante, car elle a la réputation de bien préparer les élèves à l’entrée dans les universités chiliennes. Ainsi, parmi le nombre croissant d’élèves, on compte de moins en moins de descendants d’immigrés allemands, comme nous le permettent d’observer ces chiffres concernant les élèves de terminale du collège :
Si en 1942, 50% des élèves possèdent la nationalité allemande, ils ne sont plus que 1,85% en 1972. Le fait que cette part augmente de nouveau en 2002, ainsi que la part d’enfants possédant une nationalité chileno-allemande, est dû au nombre croissant de nouveaux immigrants ces dernières années. En effet, les familles allemandes qui s’installent aujourd’hui à Valparaíso choisissent le collège pour y scolariser leurs enfants. Le nombre de non-descendants d’immigrés allemands, quant à lui, n’a cessé de croître pour atteindre 43,59 % en 2002. Cependant, en 2002, il existe toujours une même proportion d’élèves non-descendants que d’élèves dont les parents ou grands-parents étaient allemands. Les liens avec la communauté ne sont pas totalement rompus, bien que ces petits-fils de migrants ne possèdent pas la nationalité allemande. Chez ces jeunes, cependant, l’ascendance est souvent trop lointaine pour que le sentiment d’avoir une véritable identité germanique soit présent et tous ne parlent plus qu’espagnol à la maison.
Cette évolution pose un drastique problème de maintient de la langue allemande. « Si los padres no hablan alemán con ellos en casa, entonces los alumnos no ven la necesidad » nous dit Dagmar Loos, soulignant ainsi que l’absence d’intérêt pour la langue vient des parents avant même que de s’exprimer chez les enfants. D’ailleurs, la transmission de la langue n’est pas facilitée non plus par le fait que le Collège ne compte que 6 professeurs allemands. Parmi eux, trois occupent les fonctions de recteur et directeurs et sont entièrement payés par le gouvernement allemand et trois autres ont un salaire à moitié financé par l’Allemagne et à moitié par le Collège. Pour le reste, Dagmar Loos précise : “En la administración son todos chilenos y dentro de los profesores hay muy pocos chileno-alemanes. Tenemos muchos problemas para tener profesores, profesores que impartan las clases en alemán, profesores que sean chileno-alemanes.”
Pour maintenir son héritage linguistique et son niveau, le Collège se voit donc obligé de recourir à des stratégies parfois élitistes. Par exemple, l’établissement a obtenu d’être considéré comme un institut de niveau international et, pour ce faire, il prépare certains élèves au passage du baccalauréat international. Néanmoins, seuls quelques bons étudiants sont présentés à cet examen, et ce sont eux qui bénéficient le plus de l’enseignement des professeurs venus d’Allemagne. Pour la majorité des élèves, les cours suivis sont en castillan et, d’une manière générale, l’ouverture de l’école et son intégration à la société chilienne a fait que celle-ci s’est vue obligée de se conformer aux programmes scolaires nationaux.
C) L’ouverture volontaire de l’Eglise luthérienne
Enfin, l’Eglise luthérienne représente un cas assez particulier. Son déclin par rapport à l’époque de l’immigration est incontestable, puisqu’elle compte aujourd’hui environ 120 familles de fidèles alors qu’elle représentait auparavant l’institution de référence des migrants. Comme nous l’avons dit en première partie, à l’époque de l’immigration la communauté allemande reste effectivement très imperméable à la société chilienne du fait, principalement, de son identité culturelle. La religion joue alors un rôle important dans l’endogamie de la communauté, mais il est intéressant de constater que, parmi les trois institutions que nous considérons, l’Eglise luthérienne est celle qui revendique le moins son héritage allemand. Par exemple, alors que la directrice du Collège nous confie ses préoccupations quand au manque d’intérêt pour la langue allemande en ces termes : “en 1942 tener un nombre alemán significaba que hablaban alemán en su casa.Yo pasé por el colegio alemán también, y en mi época, yo salí en 1971 del colegio, y la mitad hablaban alemán en su casa. Y hoy en día en todo el colegio, con 1190 alumnos tenemos, hay solamente 9 alumnos que hablan alemán en casa. O sea, hay un cambio dramático.” ; le pasteur Rodolfo Olivera Obermöller affirme quant à lui : “yo no soy muy amigo de ‘lo alemán’, porque la iglesia tiene que ser abierta para todos” .
La personnalité du jeune pasteur Obermöller, exerçant ses fonctions depuis à peine 5 ans, est à l’origine de cette différence de politique dans les institutions de la communauté. Pour lui, il est primordial d’insuffler à l’Eglise un renouveau basé sur l’intégration de jeunes et de personnes de tous horizons et la foi doit, en tous les cas, primer sur l’appartenance ethnique. Néanmoins, parmi les fidèles, il estime que la moitié est formée par des descendants d’allemands. Ses propres grands-parents, nous confie-t-il, sont nés en Allemagne et il connait la langue de ses aïeuls. Il fait partie de la majorité des fidèles de l’Eglise luthérienne qui, comme nous le montrent les chiffres suivant sont des descendants d’immigrés de 2e ou 3e génération (66,67% des enfants baptisés en 2002 ont des grands-parents ou arrières grands-parents allemands, cependant, leurs parents ne sont pas nés en Allemagne).
Nous observons grâce à ces tableaux que le pourcentage de non-descendants d’immigrés allemands baptisés à l’église a augmenté au fil des années. L’ouverture de l’Eglise est donc un fait avant que d’être une orientation spécifique que le pasteur Obermöller entend donner à l’Eglise. Néanmoins, depuis son arrivée en 2006, il n’a cessé de mener des politiques de diversification des activités de la communauté luthérienne. Notamment, il a développé l’aide sociale et, ce faisant, a transformé la paroisse en un allié important de la ville. Pendant le tremblement de terre, par exemple, l’Eglise a joué un très grand rôle d’intermédiaire en réceptionnant les dons et en se chargeant de les redistribuer aux personnes dans le besoin. Parmi d’autres activités, la communauté des fidèles a également entrepris de donner gratuitement des cours de soutien scolaire à des enfants de quartiers pauvres et d’aider des familles ayant connu un drame personnel à se réinsérer dans la société. Le pasteur espère ainsi pousser ces fidèles à l’action pour “commencer une nouvelle aire” au sein de l’Eglise : “tenemos la ayuda social: todos los jueves a la noche hay un grupo que sale al centro de Viña a dar pan y café caliente a gente que vive en la calle. Eso era imposible hace 50 años! Una locura!”
Il reconnait néanmoins que les personnes âgées de la communauté allemande continuent d’être majoritaires au culte. Dans l’investissement personnel ils sont également très présents, notamment une tranche d’âge de 50 à 60 ans, alors que les plus de 70 ans s’investissent peu –du fait peut-être d’un désaccord avec la politique d’ouverture menée ces dernières années. Enfin, il reconnait également qu’il s’agit souvent des mêmes membres qui sont globalement engagés dans d’autres institutions de la collectivité telles que la Sociedad de Beneficiencia (dont il fait lui-même partie), le Club ou le Collège allemand. Néanmoins, l’action du pasteur est notable car, malgré le désir de certaines personnes âgées qui aimeraient voir restaurer le culte luthérien en allemand ou encore voir réserver le directorat de l’église aux gens de nationalité allemande, Rodolfo Olivera Obermöller est bien résolu à ne pas se soumettre à la dictature de l’ethnicité. Ce disant, il nous avoue cependant son amour particulier pour l’église du cerro Concepción construite par les migrants, véritable patrimoine sacré qu’il entend préserver de toutes ces forces. D’ailleurs, il explique lui-même “una cosa es no prediquemos en alemán, y otra cosa es que perdamos el alemán” , concluant sa réponse sur le défi futur de l’Eglise : arriver à se rénover dans le respect des traditions.
Conclusion globale
L’immigration allemande à Valparaíso, comme nous l’avons démontré, est un phénomène d’une ampleur quantitative assez modeste mais dont l’impact sur le port est incontestable. Cette collectivité possède une identité forte et reste longtemps un groupe homogène détaché de la population locale. Les institutions qu’elle créé, ainsi que le contexte national (le Chili étant un pays catholique) et international (la mise au banc des Allemands pendant la Première Guerre Mondiale) sont autant de facteurs favorisant l’imperméabilité de la communauté. Néanmoins, au fur et à mesure de nos recherches, nous avons pu que confirmer le fait que deux dynamiques s’exercent lors de l’installation d’individus dans un lieu et que la volonté de préserver son identité originelle n’empêche pas l’inexorable intégration des immigrants dans la ville. Plus avant dans notre réflexion, on pourrait même se demander si les associations fondées pour le confort des migrants à Valparaíso n’étaient pas une étape nécessaire à leur installation, et par conséquent à leur intégration. On peut effectivement imaginer que, sans elles, les familles allemandes n’auraient pas trouvé de motivation suffisante pour demeurer dans un pays dont la culture est si éloignée de celle de leur patrie d’origine. Quoi qu’il en soit, de nos jours, le sentiment d’appartenance à un groupe spécifique d’individus n’existe plus chez les jeunes descendants de migrants, même si la solidarité et la forte endogamie de la communauté ont longtemps préservé l’identité allemande. Le déclin des organisations de la communauté confirme cette intégration globale des fils d’européens à la société chilienne. Dès lors, pour des institutions telles que le Club allemand, la Deutsche Schule ou l’Eglise luthérienne, la politique à suivre, entre communautarisme et intégration, perpétuation de l’identité originale et mixité ethnique, n’est pas toujours claire. Ainsi, la communauté évolue dans le temps d’une manière singulière qui la fait parfois hésiter entre tradition et modernité. Paradoxalement, opter pour la modernité et se détacher du lien avec l’histoire de l’immigration permet la plupart du temps de mieux valoriser l’identité allemande et s’impose même comme l’unique alternative pour permettre la survivance des institutions communautaires.
Bibliographie :
Livres :
Deutsche Schule Valparaíso – 1857-1997, 140 Años, Un Aporte a su Historia, Valparaíso, 1997.
Travaux académiques et articles :
SALINAS MESA René, Una comunidad inmigrante : Los Alemanes en Valparaíso, 1860-1960 (Estudio Demográfico).
VERA PEREIRA Doris, Capilla Evangélica Alemana: Tardío testimonio de la presencia Alemana luterana en Valparaíso, durante el siglo XIX, tesis dirigida por Jorge Salomó Flores, Facultad de Educación y Humanidades, escuela de Historia, Universidad Marítima de Chile, Viña del Mar, abril 2005.
VON LOE Elizabeth, La comunidad evangélica alemana en Valparaíso, 1867-1940, Informe de seminario. Programa de Magister en Historia, Universidad Católica de Valparaíso, 1988
.WENDT Günther, 65 años, Iglesia Evangélica Alemana en Valparaíso, Reminiscencias, 1932.
“La Inmigración Alemana”, www.ciudadvalapraiso.cl
“Orígenes del Club y Primer Centro Cultural del Antiguo Valparaíso”, www.clubalemanvalparaiso.cl
“Saludo a los 170 años del Club Alemán de Valparaíso”, www.clubalemanvalparaiso.cl
“El Club Alemán de Valparaíso – Presente y Futuro”, www.clubalemanvalparaiso.cl
“Un Museo en el corazón de Valparaíso”, www.clubalemanvalparaiso.cl
Webographie
www.ciudaddevalparaiso.cl : site officiel de la ville de Valparaíso
www.clubalemanvalparaiso.cl : site du Club Alemán de Valparaíso
www.zdi.cl : site de la Confederación de Instituciones de Habla Alemana (ZDI)
www.condor.cl : site du journal chileno-allemand El Cóndor
Entretiens
KARLSRUHER Jan, président du Club Allemand de Valparaíso, le 15 novembre 2010
KOPPETSCH Julia, muséologue travaillant à la ZDI, le 6 août 2010
LOOS Dagmar, directrice de la Deutsche Schule de Valparaíso, le 30 octobre 2010
OLIVERA OBERMÖLLER Rodolfo, pasteur de l’Eglise luthérienne de Valparaíso, le 12 novembre 2010
VON LOE Elizabeth, professeure d’Allemand à l’université de Playa Ancha et auteure d’une thèse sur “La Presencia Alemana en Valparaíso en el siglo XIX”, le 27 octobre 2010
«Quand aujourd’hui le Club allemand s’ouvre de nouveau à la communauté porteña en lui offrant des réalisations culturelles de genres divers, elle suit dignement les traces de ces jeunes qui avec tant d’énergie ouvrirent la voir à une agréable distraction dans un environnement qui l’accueillit favorablement ». Extrait de l’article intitulé “Orígenes del Club Alemán y Primer Centro Cultural del Antiguo Valparaíso”. www.clubalemanvalaparaiso.cl“Il y a une sélection pour choisir les élèves? Oui, il y a un examen et nous demandons les notes d’allemand. Dans les programmes scolaires y a-t-il beaucoup d’histoire de l’Allemagne et de cours d’allemand ? Oui, oui, bien sur, nous tentons de stimuler l’intérêt pour la culture que nous représentons.” Entretien avec Dagmar Loos.« Aujourd’hui combien d’adhérents y a-t-il dans le club ? 180 plus ou moins. Il y en a de moins en moins ces dernières années parce que les plus vieux son décédés. Et ils y a moins de nouveaux entrants que de décès. » , Entretien avec le Dr. Jan Karlsruher S.« Le Club Allemand préserve et développe la culture et la tradition allemandes, mais en même temps il s’est adapté à l’époque actuelle et il désire se moderniser encore plus. […] Ainsi, nous avons ouvert nos portes à toutes les personnes, quelle que soit leur nationalité. » Extrait de l’article intitulé “El Club Alemán de Valparaíso – Presente y Futuro” du Président du Club allemand, Dr. Jan Karlsruher S. www.clubalemanvalparaiso.cl« Non seulement pour les jeunes, mais aussi pour les jeunes professionnels », extrait de l’entretien avec le Dr. Jan Karlsruher.
« Si les parents ne parlent pas allemand avec eux à la maison, alors les élèves n’en perçoivent le besoin ». Entretien avec Dagmar Loos.
« Dans l’administration, ils sont tous chiliens et parmi les professeurs il y a très peu de germano-chiliens. Nous avons beaucoup de difficulté à avoir des professeurs, des professeurs qui donnent des cours d’allemand, qui soient germano-allemands », entretien avec Dagmar Loos.
“En 1942, avoir un nom allemand signifiait que l’on parlait allemand à sa maison. Je suis passée par le collège allemand et à mon époque, je suis sortie en 1971 du collège, la moitié parlait allemand chez soi. Et aujourd’hui, sur les 1190 élèves que nous avons, seulement 9 parlent allemand chez eux. Autrement dit, il y a un changement dramatique.”, entretien avec Dagmar Loos.
“Je ne suis pas vraiment pour “l’allemand” en général, car l’église doit être ouverte à tous. »,
« Nous avons l’aide sociale : tous les jeudi soir il y a un groupe qui va au centre de Viña pour distribuer du pain et du café chaud aux personnes qui vivent dans la rue. Ça, c’était impossible il y a 50 ans ! Une folie ! », entretien avec le pasteur Rodolfo Olivera Obermöller.
« Ne pas prêcher en allemand c’est une chose, perdre l’allemand s’en est une autre », entretien avec le pasteur Rodolfo Olivera Obermöller.