Pérou: la législation des partis politiques

La première loi du système des partis politiques au Pérou date de 2003. La constitution de 1979 n'avait pas doté les partis politiques d'un statut juridique. L'article 68 de la constitution stipulait qu'ils étaient l'instrument fondamental de la participation politique tout en légalisant les mouvements politiques. La flexibilité du texte conjuguée à l'exercice du vote préférentiel a favorisé la participation et la victoire des candidatures indépendantes sur celles de partis politiques.

Dès 1989, un indépendant a remporté la mairie de Lima, Ricardo Belmont, et les partis n'ont obtenu que 66% des sièges aux élections législatives de 1990 contre les 94% de celles de 1984[1].   Ce détournement des partis politiques a été accéléré par la conjoncture politique des années 1980, où le principal et plus ancien parti politique du Pérou, l'APRA, a conduit le pays dans le gouffre lors de la présidence de la république par son représentant, Alan Garcia (1985-1989). La crise économique jumelée à la montée de la violence avec les exactions du Sentier Lumineux et de l'armée a éloigné les électeurs de la politique et des partis politiques en préférant soutenir des candidatures externes.

Ces différents facteurs, institutionnels et politiques, expliquent pourquoi le système des partis au Pérou, bien qu'organisé autour de quatre organisations (APRA, AP, PPC, UI) à ces débuts, s'est rapidement décomposé.

Suite à l'auto coup d'Etat de Fujimori en 1992, la nouvelle constitution de 1993 a réduit le statut des partis politiques à celui des mouvements politiques et candidatures indépendantes[2]. Fujimori est le représentant de l'anti politique qui a marqué le pas sur l'élection d'outsider en Amérique latine. La législation péruvienne a favorisé son ascension et Fujimori a renforcé la participation des indépendants. En 1995, les quatre partis[3] autour desquels s'était formé le système de partis n'ont obtenu que 16% des sièges au congrès.

Depuis la promulgation de la loi des partis sous le gouvernement de Toledo en 2003, les candidatures indépendantes continuent de séduire bien que le texte fixe des contraintes organisationnelles. Les partis politiques sont dorénavant les seules organisations légales à pouvoir participer aux élections nationales. Les mouvements politiques sont limités aux élections régionales et locales. Les partis politiques doivent être présents dans un minimum de 65 provinces, sur les 194 que compte le pays, réparties sur au moins 17 des 25 départements. Quant aux mouvements politiques, ils doivent être implantés dans la moitié plus une province de chaque département pour les élections régionales et dans la moitié plus un district pour les élections locales[4]. Outre, leur nombre d'adhérents doit être équivalent ou supérieur à 1% des électeurs des élections précédentes sur leur aire de participation. Ces mesures n'ont pas empêché l'inscription de plus de 25 partis politiques pour les législatives de 2006 et la candidature de 13 candidats pour les présidentielles.  Or, les résultats des élections législatives ont rendu compte d'une réduction significative de la fragmentation et les élections présidentielles ont été marqué par la réélection du représentant de l'APRA, Alan Garcia, aux présidentielles. Pour les élections de 2011, le nombre de candidature a été réduit à dix et seuls cinq candidats sont encore en liste à la veille du premier tour. Aucune candidature n'est cependant représentative d'un parti mais uniquement le résultat d'alliances entre diverses organisations.

 

[1] Source : KENNEY, Charles. Muerte y renacimiento de un sistema de partidos 1978-2001. Elecciones, ONPE, n°4, diciembre 2004, pp242-244. disponible sur www.onpe.gov.pe.

[2] Article 35 de la Constitution de 1993 : « Les citoyens peuvent exercer leurs droits individuellement ou au travers d'organisations politiques tel que les partis politiques, mouvements politiques ou alliances... ».

[3] Les quatre partis sont l'APRA, PPC, AP et UI.

[4] Article 80.

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