La solidarité européenne existe

03/06/2013

L'Union européenne ne repose pas uniquement sur le marché et la concurrence. Les traités qui la régissent réservent une place de choix à la notion de solidarité. La manifestation la plus concrète de cette solidarité se trouve dans les fonds versés par le budget européen aux régions les plus pauvres. Les régions espagnoles et portugaises en ont beaucoup profité. À présent, c'est au tour des ex-pays communistes d'Europe centrale et orientale, notamment de la Pologne.
L'existence d'un fonds et d'un mécanisme européens de stabilité financière, qui octroient des prêts aux pays de la zone euro les plus endettés, est aussi l'expression d'une solidarité entre États. Enfin, le principe de la libre circulation des travailleurs, qui permet actuellement aux jeunes Grecs et Espagnols d'être embauchés en Allemagne sans avoir à obtenir un permis de travail, est aussi une forme de solidarité européenne.

L'acceptation de la solidarité européenne ne va pas de soi en cette période de retour aux égoïsmes nationaux. Dans les sociétés du nord de l'Europe (Allemagne, Pays-Bas), moins touchées par les difficultés économiques, se développe ainsi une opposition populiste contre les transferts financiers opérés vers les pays du Sud pour les aider à sortir de la crise. En Allemagne, un nouveau parti, appelé Initiative für Deutschland, mène campagne sur le thème « le laxisme de l'Europe du sud en veut à l'épargne des citoyens allemands ».

Nos traits partagés

Ce populisme des mieux lotis n'est pas l'apanage de l'Union européenne. Il existe depuis plusieurs années au sein même des États. En Italie, la Ligue du Nord critique les transferts budgétaires opérés par Rome vers une Italie du sud présentée comme paresseuse et profiteuse. En Belgique, les Flamands disent régulièrement ne plus vouloir payer pour une Wallonie qui se laisse vivre. En Espagne, le discours nationaliste catalan, avant que Barcelone n'ait dû recourir à l'aide financière de Madrid, affirmait ne plus vouloir payer pour une Andalousie arriérée.

Ces manques de générosité ne sont pas banaux, car derrière la solidarité se profile une autre notion clé de la démocratie : la citoyenneté. Cette dernière peut être définie comme le sentiment d'appartenance à une même communauté politique, conforté le plus souvent par un récit. Pour l'Union européenne, ce récit a longtemps mis en avant la réconciliation et la paix. Il touche moins aujourd'hui les jeunes générations.

Il est donc important de recenser d'autres modes d'expression. Ils existent. Le Vieux Continent a en effet été forgé par une histoire qui lui confère sans conteste des traits particuliers. Le modèle de l'État providence, l'organisation de l'espace (notamment des villes), la capacité à s'interroger de manière critique sur sa propre histoire sont des caractéristiques partagées par les Européens. Plus concrètement encore, l'absence de contrôle aux frontières dans l'espace Schengen, ne pas avoir à changer d'argent dans la zone euro sont les éléments d'une citoyenneté. Il n'est pas inutile d'en avoir conscience, car l'Europe devient davantage plus réelle quand on a conscience qu'elle est porteuse non seulement de différences, mais aussi de traits partagés. Il faut souvent se trouver loin d'elle pour en prendre vraiment conscience.

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