Critique internationale - Sommaire
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Quand un juge d'instruction est chargé d'enquêter sur des crimes commis à l'étranger, non seulement ses marges de manœuvre sont plus réduites que dans les enquêtes menées sur le territoire national, mais la légitimité même de sa démarche est mise en cause par les avocats de la défense, qui cherchent à prouver l'incompétence du tribunal. Comment le juge d'instruction peut-il retrouver sa capacité d'action ? Doit-il s'appuyer sur les données que lui apportent les ONG, qui, souvent, disposent de plus de moyens que lui ? Et ce qu'il gagne en documentation ne le paye-t-il pas en perte d'indépendance ? À partir de l’examen de deux affaires de compétence universelle, l'affaire Habré et l'affaire des « quatre de Butare », l'auteur se demande comment l'appui logistique offert par les ONG influe sur la crédibilité d'une enquête internationale.
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Cet article vise à ouvrir la « boîte noire » d’une prise de parole militante, en analysant le discours d’Amnesty International sur la crise ivoirienne en cours depuis septembre 2002, à partir d’une observation participante menée au sein du Bureau parisien de recherche du Secrétariat international de l’organisation. En utilisant le droit comme point d’entrée, la prise en compte des stratégies d’énonciation mobilisées par cette organisation ainsi que du contexte plus général dans lequel sont inscrits les producteurs de ce discours révèle des aménagements pragmatiques progressifs, renvoyant à la construction de l’expertise au sein de l’organisation. Ce pragmatisme apparaît également non seulement dans les stratégies développées par l’organisation pour s’adapter à la nouvelle donne du contexte postbipolaire, en particulier « l’urgence » des conflits armés, mais aussi dans l’évolution des règles d’impartialité formant la base de son autorité morale.
Depuis le génocide des Rwandais tutsis, perpétré en 1994, les interventions diplomatiques et militaires de la France au Rwanda, menées d’octobre 1990 à août 1994, ont fait l’objet de campagnes dénonciatrices menées par des publicistes. Il s’agissait, pour ces auteurs et leurs éditeurs, de révéler les agissements secrets et criminels imputés à de hauts responsables civils et militaires. De 1994 à 2004, la période étudiée, ces accusations ont convaincu surtout le milieu restreint des militants déjà engagés dans le dévoilement des complots politiques. En 2004, année de la dixième commémoration du génocide, siégea une « Commission d’enquête citoyenne sur le rôle de la France au Rwanda durant le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 », organisée par des publicistes associés à des juristes. Selon les conclusions du rapport publié par cette Commission, la France aurait non seulement facilité mais conçu le plan d’extermination des Tutsis. L’article étudie les modèles d’enquête mis en œuvre par la Commission et leur effet de cohérence, jugé suffisant pour affirmer l’implication de la France dans le génocide.
L’affaire Kravchenko apparaît aujourd’hui comme un moment essentiel dans la dénonciation des crimes du régime soviétique. Il s’agit dans cet article de revenir de manière détaillée sur le procès qui opposa en 1949 Kravchenko, transfuge ukrainien, à l’hebdomadaire communiste Les Lettres françaises qui avait lancé contre lui une campagne calomnieuse. En effet, les spécificités juridiques de l’accusation de diffamation tout comme le cadre d’un tribunal correctionnel parisien de 1949 imposaient des contraintes particulières aux parties en présence, dont les objectifs respectifs – bien au-delà de la diffamation – étaient la dénonciation des crimes soviétiques et la condamnation de l’antisoviétisme. Les avocats jouèrent un rôle décisif dans la construction croisée d’argumentaires capables d’appuyer ces points de vue opposés, et ce en pleine guerre froide. Ce procès, dont les enjeux politiques et idéologiques apparurent immédiatement aux acteurs de l’époque, est un exemple atypique et passionnant des relations complexes que peuvent entretenir justice et crises extrêmes.
Considérer les États-Unis comme un régime démocratique placé sous la tutelle des prescriptions chrétiennes relève d'un profond malentendu, car il s'agit bel et bien d'une république laïque dont les principes se trouvent clairement énoncés dans le Premier Amendement à la Constitution. En fait, deux logiques antagonistes s'entrelacent depuis les origines coloniales : un esprit de religion visant à placer tous les aspects de l'existence sous les auspices de la loi divine et un esprit de laïcité régulièrement consolidé par les avancées jurisprudentielles de la Cour suprême. On peut repérer sept grandes périodes chacune marquée par la dominance de l'une ou l'autre dynamique. Si la visée théocratique l'a parfois emporté, elle a toujours été contrecarrée par une réactivation de la perspective laïque. L'histoire de ces mouvements de flux et de reflux nous apprend que l'actuelle reviviscence fondamentaliste s'inscrit dans la lignée d'une tradition séculaire. Elle nous incite également à rechercher l'élément d'équilibre qui a permis à cette combinaison paradoxale de demeurer cohérente. La religion civile nous livre la clé de l'énigme. Elle renvoie à trois principes : le respect de Dieu considéré comme présidant aux destinées du pays, la conviction que le modèle républicain constitue un exemple offert à l'humanité tout entière et la volonté de défendre les valeurs qui le sous-tendent. Voilà comment, au-delà de la dimension potentiellement conflictuelle du mixte théocratico-séparatiste, la religion civile a rendu conciliables l'aspiration théocratique des protestants radicaux et la volonté séparatiste des partisans d'un État laïque.
En séjournant en Inde du 20 au 23 novembre 2006, le président Hu Jintao entendait sans nul doute marquer un nouveau jalon dans la construction d’une relation sino-indienne s'affichant comme déterminante pour l'ordre mondial. Il achevait par la même occasion une séquence temporelle qui avait été ouverte dix ans auparavant par son prédécesseur Jiang Zemin, le premier chef d’État de la République populaire de Chine à avoir effectué un déplacement chez le voisin indien. C’est l'évolution des relations entre l'Inde et la Chine qui est analysée ici. Un regard attentif sur la décennie qui s’est écoulée entre les visites respectives des deux Présidents inspire trois questions un peu provocatrices ou témoignant du moins d'un certain scepticisme, tant sur ce qui a changé que sur ce qui demeure. Qu’en est-il aujourd’hui de la question frontalière ? Car, en dépit des efforts réalisés depuis 1996, les deux voisins restent pour l'essentiel incapables de régler un différend territorial qui porte les stigmates de la guerre éclair de 1962. Que faut-il penser du Partenariat économique des années 2000, célébré comme un bienfait; alors qu’il n'est pas sans générer des frictions ? Et que signifient les infléchissements récents de la Chine concernant la possibilité d'une coopération nucléaire civile en faveur de l'Inde, qui ne résolvent en rien la question des arsenaux nucléaires militaires, pourtant au cœur de l'équilibre sino-indien ?
Par facilité ou par parti pris, les grands médias internationaux ont constamment fait le lien entre la victoire de Hamas lors des élections pour le Conseil législatif de janvier 2006 et la multiplication des heurts interpalestiniens de la fin de l’année 2006 et du début de l’année 2007. Pourtant, les violences partisanes ne sont pas nées de cette victoire. Depuis plusieurs années, la corruption(fasâd), l’anarchie (fawda) et la débâcle sécuritaire(falatân) alimentaient une dynamique dont l’issue, une « guerre civile »(fitna), était connue de la population, redoutée et condamnée. Pour les électeurs, Fath aurait, au mieux, échoué dans la lutte contre ces divers maux ; au pire, il en aurait été à l’origine. Du fait de sa réputation de probité et d’efficacité, Hamas s’est vu investi de la confiance populaire pour mener à bien la mission de vaincre la logique de la « guerre civile ». Mais, en empêchant Hamas d’exercer son mandat, le Président Mahmoud Abbas, Fath, Israël et la communauté internationale ont contribué, chacun à son niveau, à transformer la débâcle sécuritaire en une « guerre civile » dont les prémices se sont manifestées dès l’été 2006. Après avoir analysé les différents éléments constitutifs de cette dynamique et leurs articulations, cette étude resitue le processus en cours dans l’histoire du mouvement national palestinien de ces dernières années.
Vers un nouveau désordre mondial : politique comparée et anthropologie pluraliste selon Clifford Geertz
Robert C. Lieberman, Shaping Race Policy: The United States in Comparative Perspective, Princeton, Princeton University Press, 2005, XVIII – 312 pages.
Joan W. Scott, Parité ! L’universel et la différence des sexes, Paris, Albin Michel, 2005, 254 pages.
Nicolas Bauquet, François Bocholier (dir.), Le communisme et les élites en Europe centrale, Paris, PUF/Éditions ENS rue d'Ulm, 2006, 378 pages